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« Lactations longues : une opportunité pour repenser la conduite du troupeau caprin »

Pour faire face à la crise du chevreau en 2020, le Gaec des Isles, à Loriol dans la Drôme, a décidé de conduire une partie des chèvres en lactation longue.

Le choix de conduite en lactation longue fait par Xavier et Didier Gois a permis d'augmenter la production laitière et d'améliorer l'élevage des chevreaux.
Le choix de conduite en lactation longue fait par Xavier et Didier Gois a permis d'augmenter la production laitière et d'améliorer l'élevage des chevreaux.
© Aude Pasquet

Historiquement, 350 mises bas avaient lieu chaque année au Gaec des Isles. En parallèle, entre 60 et 70 chèvres étaient conduites en lactation longue. Il s’agissait principalement de chèvres en échec de reproduction et quelques-unes ayant une mamelle au plancher trop bas avec des risques au tarissement.

En 2020, en lien avec la crise sanitaire liée à la Covid-19 et la complexification du ramassage des chevreaux, Xavier et Didier Gois ont repensé la conduite de leur élevage. En soutien à la filière chevreau, mais aussi du fait des incertitudes sur leur prix de vente, les éleveurs drômois ont décidé de ne mettre qu’un petit nombre de chèvres à la reproduction au mois d’avril 2020. De ce fait, à l’automne, 270 mises bas ont eu lieu, et 145 chèvres ont poursuivi leur lactation, soit 35 % du troupeau.

Plus de place et plus de temps

Cette pratique a permis aux éleveurs d’élever moins de chevreaux dans de meilleures conditions : plus de place au sein du bâtiment et plus de temps à leur consacrer. Ils ont aussi gagné 30 000 litres de lait sur la campagne. Les deux associés ont décidé de reconduire l’expérience tout en augmentant la proportion de lactations longues.

« Les chèvres étant en quatrième lactation ou plus ainsi que celles présentant des mamelles avec un plancher trop bas n’ont pas été mises à la reproduction, expliquent les éleveurs. De plus, nous avons vendu une trentaine de chèvres en lactation longue pour faire de la place dans le bâtiment. Celles produisant moins de 2 litres de lait par jour avec des mamelles déséquilibrées, des problèmes d’aplomb ou des symptômes de Caev (arthrite encéphalite virale caprine, NDLR) ont été réformées. Le reste des lactations longues a donc été conservé. »

Choix des lactations longues

En 2021, les chevrettes et une trentaine de chèvres, jusqu’à trois lactations, ont été mises à la reproduction en saillie naturelle et environ 150 chèvres à l’insémination artificielle (IA). Le reste du cheptel a poursuivi sa lactation.

Les résultats cette année-là sur les chèvres à l’IA n’ont pas été satisfaisants, 51 % de réussite, contre 70 % habituellement, entraînant seulement 192 mises bas au total.

Ainsi, pour l’année 2022, les objectifs des éleveurs diffèrent : effectuer plus de saillies naturelles qu’en 2021 et améliorer les critères de choix des chèvres à mettre en lactation longue. Elles sont pour le moment choisies par défaut, après la sélection des chèvres destinées à la reproduction. Les éleveurs ont donc décidé de ne pas mettre à la reproduction des chèvres de cinq ans et plus. Parmi elles, ils ont gardé celles qui ont une bonne persistance laitière. Les autres chèvres ont été inséminées ou saillies en monte en main. Pour la première fois, ils ont laissé plusieurs boucs dans les lots pour les retours par peur d’échecs de reproduction trop importants.

Quantité et qualité du lait

« Notre objectif à long terme est d’avoir les deux tiers du troupeau à la reproduction et un tiers en lactation longue », exposent Xavier et Didier Gois.

Les lots sont créés en fonction de l’âge des chèvres. Les chèvres âgées de cinq ans ou plus se retrouvent toutes dans le même lot. Puisque la saillie est réalisée en IA ou en monte en main, la composition des lots ne change pas au cours de l’année. Ainsi, les chèvres en lactation longue sont mélangées aux autres chèvres toute l’année, excepté pendant le tarissement.

Les chèvres destinées à la reproduction et plus précisément à l’IA sont sélectionnées en priorité : celles en qualification A et ayant moins de 4-5 ans (environ 150 à 160 chèvres). « Pour pouvoir les trier, nous regardons le niveau de production global et surtout la quantité de lait au dernier contrôle avant la reproduction. Nous pointons également toutes les mamelles et les aplombs », expliquent-ils.

Davantage de lait produit

Les chèvres ayant un problème de conformation ou de locomotion (aplomb, boiterie, mamelles déséquilibrées…) important sont réformées. Celles ayant des petits défauts d’aplomb ou de mamelles (pouvant être abîmées par le tarissement) ainsi que celles étant âgées, mais possédant de bons index, poursuivent en lactation longue.

Le reste des chèvres et des chevrettes sera sailli en monte en main en faisant attention à la consanguinité. Pour cela, leurs éleveurs préparent, avant la reproduction, une fiche notifiant les boucs interdits à la saillie pour chaque chèvre et chevrette. De plus, ils notent chaque accouplement afin d’avoir un renouvellement avec une filiation père et mère correctement renseignée.

Si la volonté de départ était de réduire le nombre de chevreaux, Xavier et Didier Gois voient de nombreux avantages aux lactations longues : augmentation de la production sur la campagne, moins de travail lors des mises bas, diminution de problèmes sur les chevreaux et une consommation moindre de fourrage sur l’année. Point de vigilance selon eux, la baisse de production des chèvres étant en lactation longue trop longtemps.

Aude Pasquet, Adice

L’avis d’Aude Pasquet, conseillère d’élevage caprin à Adice

« Gain de production et organisation simplifiée »

« Au Gaec des Isles, la conduite des chèvres en lactation longue a été simplifiée au maximum. Avec la saillie exclusivement en insémination ou en monte en main, elles sont mélangées quasiment toute l’année au reste du troupeau. La conduite d’une partie des animaux en lactation longue a vraiment permis de réduire le nombre de chevreaux. De plus, les conditions d’élevage des chevreaux (renouvellement et boucherie) ont été améliorées. Cette conduite a aussi permis de gagner en production globale sur la campagne, avec un résultat non négligeable économiquement. »

Chiffres clés

Le Gaec des Isles

417 chèvres de Saanen
515 000 l de lait livrés (≈ 1 200 l/chèvre)
2 UTH
65 ha de SAU
Mises bas principalement à l’automne, 150 IA, 40 à 45 % de lactations longues

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