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Trois stratégies de récolte de l’herbe en fauche précoce

Combiné presse-enrubanneuse, ensileuse automotrice, remorque ensileuse autochargeuse… Quels sont les avantages et inconvénients de ces différents modes de récolte de l’herbe ?

Pour obtenir une herbe de qualité, dense en énergie et protéine, la meilleure solution est de récolter des coupes précoces. Outre la valeur alimentaire élevée, l’intérêt est aussi de permettre des repousses rapides. « Ces dernières années, on observe le développement de chantiers de fauche de petits volumes à forte valeur protéique, relève Stéphane Chapuis de la FNCuma. Aujourd’hui, les éleveurs cherchent moins à récolter une grande quantité d’un seul coup ; ils favorisent davantage des coupes plus précoces et plus fréquentes, en vue d’optimiser la valeur alimentaire de l’herbe récoltée. »

Mais qui dit plus petits volumes, dit aussi plus de surfaces à faucher, ce qui implique une logistique de chantier différente et des chaînes de récolte à plus grand débit. « Parmi les investissements récents dans nos réseaux, on constate que les combinaisons de matériel de fauche avant et arrière sans conditionneuse gagnent du terrain. » À main-d’œuvre et puissance de traction équivalentes, cette stratégie permet de doubler le débit de fauche quasiment au même prix. Un constat partagé par Mickaël Coquard, de Rhône Conseil élevage. « Aujourd’hui, les solutions mises en œuvre sur le terrain (ndlr : fauche à plat, andaineur grande largeur par tapis, groupeur sur faucheuse triple « papillon »…) permettent de ramener globalement plus de souplesse et d’exploiter des fenêtres météo plus serrées. »

Avec quel matériel récolter ? Entre l’ensileuse automotrice, la remorque autochargeuse-ensileuse ou le combiné presse-enrubanneuse, l’arbitrage est souvent multifactoriel. Il dépend du volume récolté, de la main-d’œuvre, de l’environnement (présence ou non de Cuma ou d’entreprise), et du mode de distribution. La notion de coût n’intervient souvent qu’après. « Ce critère n’apparaît pas un facteur décisionnel, affirme Mickaël Coquard. Ce qui pèse le plus dans le choix, c’est l’accès ou non à l’entraide. Tant qu’il y en a, les éleveurs optent à 90 % pour l’ensileuse automotrice. Si l’entraide n’est pas possible ou devient trop compliquée, notamment du fait de la disparité des exploitations au sein d’une même Cuma, ils se tournent alors vers l’ensilage à l’autochargeuse ou l’enrubannage. »

 

 
 © Krone
© Krone

 

1 L’ensilage à l’automotrice : le meilleur débit

Le chantier à l’ensileuse automotrice est celui qui présente le meilleur débit instantané. « S’il se montre particulièrement adapté quand il y a du rendement, c’est moins vrai pour des coupes à plus petits volumes. Dans ce cas, il faut récolter une surface conséquente », avance Stéphane Chapuis.

Cette stratégie suppose d’avoir la capacité de stockage et suffisamment de main-d’œuvre disponible à l’instant t pour le transport des bennes. Or, au printemps, la capacité à mobiliser cinq ou six personnes peut être limitante entre l’épandage des effluents, les semis de maïs… « Certains exploitants font le choix de déléguer tout le chantier, mais dans ce cas, la facture est salée ! C’est là qu’ils se rendent compte du coût réel d’un tel chantier main-d’œuvre incluse, et que l’entraide ne coûte pas rien ! », relève Mickaël Coquard. Et de rappeler que « ce mode de conservation reste celui où on a le moins de pertes nutritives si le chantier est bien fait ». Haché fin et récolté entre 30 et 40 % MS, ce fourrage s’avère très lactogène.

2 L’enrubannage au combiné pour la flexibilité

 

 
La stratégie enrubannage, souvent contestée pour ses tarifs, se révèle finalement assez compétitive pour des fauches qualitatives, à moindre rendement.  © Claas
La stratégie enrubannage, souvent contestée pour ses tarifs, se révèle finalement assez compétitive pour des fauches qualitatives, à moindre rendement. © Claas
Les combi presse-enrubanneuses permettent le pressage et l’enrubannage en un seul passage. Bien adaptée aux petits volumes et aux parcelles biscornues, cette stratégie s’avère la moins exigeante en termes de préparation de chantier. « C’est le choix de la facilité et de la souplesse », indique Stéphane Chapuis. En déléguant le travail au chauffeur de la Cuma ou de l’ETA, l’exploitant peut se permettre de ramasser les bottes plus tard. « Cela lisse le travail, même si globalement au final, on ne gagne pas forcément de temps par rapport à une stratégie avec ensileuse automotrice. »

 

Avec l'enrubannage, pas besoin d'ouvrage de stockage. « La conservation est un autre avantage, en particulier l’été, où les pertes au silo peuvent atteindre 10 à 15 % », estime Mickaël Coquard. Bien fait et bien stocké, le risque de mauvaise conservation est moins important que pour l’ensilage, mais attention toutefois aux risques de perforation liés aux nombreuses manipulations. En facilitant les petits chantiers, cette solution permet de s’adapter à la précocité des différentes parcelles et d’alloter les balles en fonction de leur qualité. « Mais cet avantage peut aussi être perçu comme un inconvénient si les bottes ne sont pas triées, la régularité n’étant pas la même qu’avec un silo », poursuit le conseiller. Le défaut majeur tient surtout à la reprise et la distribution, spécialement si l’exploitant utilise une mélangeuse qui distribue aussi du maïs ensilage. Incorporer une balle enrubannée se montre alors très énergivore et il reste difficile d’obtenir un mélange homogène.

« Économiquement, l’enrubannage a longtemps été décrié, mais il mérite d’être réhabilité pour les fauches qualitatives à petits volumes », considère Mickaël Coquard. « Par contre, plus le rendement est élevé, plus cette solution se révèle onéreuse », nuance Stéphane Chapuis.

3 L’ensilage à l’autochargeuse : plus de polyvalence

Simples et souples, les chantiers d’ensilage à l’autochargeuse mobilisent beaucoup moins de monde que ceux à l’ensileuse automotrice. Ils conviennent mieux pour récolter des petites coupes de qualité, et/ou des petites surfaces, comparé à l’automotrice qui se destine davantage aux gros volumes. « Cette stratégie est un bon intermédiaire entre l’ensilage à l’automotrice et l’enrubannage, en permettant de rester dans une logique de stockage en couloir tout en gagnant en flexibilité de chantier », analyse Stéphane Chapuis qui regrette que « cette solution peine à trouver sa place alors qu’elle se révèle pertinente économiquement et techniquement ».

Par rapport à une ensileuse automotrice, on réduit le niveau d’investissement mais le débit du chantier baisse également (2 à 2,5 fois moins de débit par heure). L’intérêt est de permettre à un seul chauffeur d’effectuer l’approvisionnement du silo. Néanmoins, l’autochargeuse sera d’autant plus efficace que la distance sera faible et le volume de caisse élevé.

Par ailleurs, pour améliorer la rentabilité des remorques, on peut miser sur leur polyvalence. « Elles peuvent s’utiliser pour l’affouragement en vert, comme bennes de transport pour l’ensilage de maïs, ou encore pour pailler les logettes tapis… » L’entretien et les pièces d’usure se montrent réduits. Par contre, elles requièrent une grosse puissance de traction. Au silo, les remorques amenant une grosse quantité de fourrage (quasiment toujours décompressée au rouleau), le travail du tas peut être plus délicat, mais on a plus de temps entre chaque remorque. À la reprise, les brins plus longs peuvent entraîner des difficultés de désilage selon le matériel de distribution. Enfin, par rapport à des chantiers d’enrubannage « clé en main », la récolte à l’autochargeuse nécessite d’ouvrir et refermer silo à chaque nouvelle coupe. « Certes, l’opération n’est pas des plus agréables, mais cela reste moins chronophage que le transport des balles d’enrubannage. »

Avis d'expert: Mickaël Coquard, Rhône Conseil élevage

« Ne pas appliquer une recette toute faite »

 

 
Mickaël Coquard, Rhône Conseil élevage © E. Bignon
Mickaël Coquard, Rhône Conseil élevage © E. Bignon
« Récolter l’herbe jeune permet d’améliorer sa valeur alimentaire. Mais cet objectif est-il pertinent dans toutes les situations ? Avant de décider du stade et de la chaîne de récolte la plus adaptée, il faut être au clair sur ses objectifs. Est-ce que je recherche un fourrage à haute valeur protéique pour une économie de correcteur ou ai-je surtout besoin d’assurer des stocks pour équilibrer mon bilan fourrager ? En fonction des besoins des animaux, la réponse ne sera pas la même. Il faudra trouver le bon compromis entre la valeur et le volume, et adopter une conduite adéquate. Rien ne sert de récolter un fourrage « nec plus ultra » pour des vaches à 6 000 l s’il manque un tiers du stock nécessaire... Attention au bilan fourrager global et au surcoût engendré par les petites coupes. La question de la rentabilité économique est encore plus importante avec de petits volumes récoltés à l’hectare. »

 

Pour en savoir plus

Le site Pérel (Pérenniser l’élevage par l’autonomie des fourrages), proposé par les chambres d’agriculture des Pays de la Loire, donne des repères détaillés concernant le coût des fourrages, et notamment l’herbe. Basé sur les barèmes BCMA 2013, ce référentiel inclut la production, la récolte et la distribution selon des modalités de conduite habituelle et quatre niveaux de rendement. Ramenés en €/ha et en €/tMS, les résultats sont affichés avec et hors main-d’œuvre.

 

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