Sélection variétale : vers des blés plus tolérants aux stress et aux bioagresseurs
Changement climatique, prolifération de certains insectes, évolution des maladies… Ces mutations orientent les axes de recherche des sélectionneurs de blé vers la tolérance variétale.
Changement climatique, prolifération de certains insectes, évolution des maladies… Ces mutations orientent les axes de recherche des sélectionneurs de blé vers la tolérance variétale.
Dans un contexte d’évolution climatique et réglementaire, beaucoup d’espoirs sont fondés sur la génétique. La demande de variétés tolérantes aux bioagresseurs et au stress climatique se fait de plus en plus pressante. La quête de la productivité doit donc désormais intégrer ces enjeux. « La tolérance aux maladies, la productivité et l’adaptation au stress sont les fils rouges de la sélection depuis de nombreuses années », confirme Emmanuel Sterlin, responsable marketing et communication chez Saaten Union. Cependant, le pas de temps de la recherche reste long, même si les nouveaux outils à disposition des sélectionneurs, tels que les NBT et la mutagenèse, ont tendance à l’accélérer.
Des résistances multigéniques pour éviter les contournements
« Avec la réduction de l’utilisation des produits phytosanitaires, nous recherchons à maximiser la tolérance aux maladies à l’aide de variétés qui disposent de gènes à la fois majeurs et mineurs pour des caractères définis », explique Olivier Borde, marketing manager chez Syngenta. En effet, l’accumulation de caractères multigéniques évite que le champignon pathogène contourne la résistance et puisse reprendre sa progression.
Pour répondre aux enjeux sociétaux, environnementaux et politiques liés à la production agricole, la gamme des variétés proposée sur le marché se veut diversifiée. « Selon le contexte pédoclimatique considéré, les producteurs et les collecteurs s’orientent vers des gènes d’intérêts différents comme la tolérance vis-à-vis de la cécidomyie orange, les mosaïques, les rouilles, le piétin verse ou les fusarioses », souligne Jérôme Vansuyt, chef produit céréales chez Florimond Desprez.
Saaten Union travaille sur un projet multipartenaire de tolérance à la cicadelle, responsable des pieds chétifs, qui devrait aboutir d’ici 2023. D’autres recherches essentielles sont en cours comme celles portant sur la résistance variétale au microdochium, à l’origine de fusarioses, ou aux pucerons vecteurs de la jaunisse nanisante (JNO).
Le changement climatique oriente la sélection vers des stratégies d’esquive. « L’utilisation d’outils de sélection génomique et de marquage moléculaire améliore nos connaissances sur les gènes d’intérêt dont dispose une variété en particulier », indique Maxime Sergent, chef marché céréales à paille chez LG (Limagrain).
Cette banque de données a permis notamment de travailler sur les précocités à épiaison et à maturité des variétés pour tenter de les armer face au gel de sortie d’hiver et à l’échaudage de fin de cycle. « Les modèles de prédiction accélèrent le gain génétique en identifiant les individus plus tôt, précise Sébastien Chatre, directeur recherche de RAGT 2n. Ils anticipent le comportement des futures variétés. »
Les efforts des différents sélectionneurs sont mutualisés au sein de programmes européens qui accélèrent la mise à disposition de ressources génétiques. « Avec ce maillage à grande échelle, nous pouvons mesurer la performance et la régularité des variétés dans divers environnements, affirme Olivier Borde. L’investissement dans des laboratoires de marquage moléculaire permet d’identifier les caractéristiques d’une variété dès un stade précoce. » Grâce à des outils de mesure aux champs plus performants, les notations sont davantage automatisées, améliorant ainsi la productivité du travail et le volume de variétés testées.
Feu vert pour la tolérance à la jaunisse
La société RAGT commercialise déjà la variété RGT Wolverine en Angleterre, tolérante au virus de la jaunisse nanisante. Une variété avec des caractéristiques identiques est annoncée pour le marché français pour les semis de 2022, ce qui sera une première. Bien que le blé soit moins sensible que l’orge à la jaunisse nanisante, ce virus fait l’objet d’enjeux importants pour la recherche.