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Tout connaître du ténia des ovins pour mieux lutter

Le ténia est un parasite majeur des ovins, surtout pour les agneaux. Le recours à une gestion sanitaire raisonnée reste la meilleure piste pour l’avenir.

« Les agneaux sont très sensibles au parasitisme, explique Boris Boubet, vétérinaire au GDS de la Creuse. Et on observe ces dernières années une recrudescence du ténia avec des difficultés de gestion dans certains élevages ».

Le Moniezia expansa, le ténia des ovins, est un parasite composé de segments disposés en chaîne et munis à leur extrémité d’un organe de fixation. Le ténia adulte peut mesurer de 3 à 5 m pour une largeur de 1 à 2 cm. « Il peut s’allonger très rapidement, explique le vétérinaire. Le ténia peut mesurer deux centimètres à quatre semaines et faire plus de deux mètres trois semaines plus tard ! ». Dépourvu de tube digestif, le ténia s’alimente au contact des matières intestinales.

Pour se reproduire, le ténia se sert d’un hôte intermédiaire, l’oribate, un acarien microscopique vivant dans le sol et que l’on trouve en nombre, jusqu’à 10 000 par m². Si cet acarien est mobile et se déplace sur les végétaux, il ne l’est pas assez pour disséminer le parasite d’une pâture contaminée à une saine. L’oribate préfère les prairies acides, humides, riches en mousse et pâturées en permanence. Coprophage, l’oribate s’infeste en ingérant les œufs contenus dans les crottes des moutons parasités. Les embryons sont libérés dans le tube digestif de l’acarien, ils gagnent la cavité générale et se transforment en larve. Un seul oribate peut en loger 3 à 4 et nombreux sont ceux qui n’y survivent pas. Le développement des larves se fait en deux à trois mois à 25°C, plus lentement à température inférieure. Elles peuvent vivre aussi longtemps que leur hôte, soit 12 à 18 mois et comme eux seront détruites par la sécheresse ou résisteront à l’hiver.

L’agneau s’infeste par ingestion de l’oribate lors d’un repas d’herbe. La larve est libérée dans l’intestin grêle où elle se fixe sur la muqueuse. Un ténia capable de pondre sera formé en 4 à 6 semaines environ. Les œufs sont libérés dans le milieu extérieur avec les fèces. Ils résisteront un mois en milieu sec mais quatre mois en milieu humide. Ils sont sensibles au gel, aux UV et aux fortes chaleurs.

Les ténias sont pathogènes car ils perturbent le transit, en détournant une partie de l’apport alimentaire de l’animal, irritent l’intestin, sécrètent des substances toxiques et spolient de la vitamine B1 ou de la méthionine. Un ténia peut vivre cinq mois mais une immunité est acquise au bout d’une période de contact de deux à trois mois, par des réactions anaphylactiques dans l’intestin grêle, rendant difficile la survie des Moniezia. On constate cependant que des brebis restent porteuses de ténia, sans signe clinique.

Les agneaux sont plus sensibles que les adultes, notamment si l’état d’entretien est médiocre ou s’il y a surpâturage. Le téniasis est une maladie à caractère saisonnier, au printemps et à l’automne, qui touche surtout l’agneau d’herbe. Elle se manifeste par un état de subanémie, une laine sèche, cassante, « frisottée ». On peut également observer de la diarrhée, de la constipation ou des ballonnements. « La croissance est retardée, l’animal infesté s’amaigrit et on peut noter la présence d’anneaux dans les crottes et autour de l’anus », indique Boris Boubet. Des complications infectieuses d’entérotoxémie peuvent survenir rendant nécessaire une vaccination. Ces signes cliniques sont peu caractéristiques et le recours aux analyses coprologiques peut s’avérer nécessaire, d’autant que d’autres parasites internes sont fréquemment associés (coccidiose, strongyloïdose, nématodirose…).

L’infestation des pâtures se fait uniquement par les animaux contaminés à la faveur de déplacements de lots ou de troupeaux parasités. On observe deux pics d’excrétion, au printemps et à l’automne, liés à la mise à l’herbe d’animaux naïfs et aux facteurs météorologiques.

Pour lutter contre la maladie, on peut soit intervenir sur les ténias, soit sur les oribates. Contre les ténias, le recours aux ténicides est encore la règle mais il nécessite une bonne connaissance du cycle du ténia. Trop tôt, le traitement sera inutile car il n’y a pas de parasite adulte, cible des produits. Trop tard, de nombreux œufs auront été expulsés, contaminant les parcelles. Par ailleurs, les ténicides habituellement employés n’ont pas d’impact sur le développement ou la survie des œufs. Les agneaux traités doivent donc séjourner au moins 24 heures en bergerie avant d’être remis en pâture et le fumier devra être épandu sur des parcelles de cultures. Pour éviter l’apparition de résistance aux antiparasitaires, les éleveurs doivent s’en remettre aux bonnes pratiques classiques de gestion du parasitisme : analyses coprologiques, traitements ciblés, alternance des molécules, maintien en bergerie des agneaux post-traitement, mesures agronomiques…

Compte tenu de l’espérance de vie des oribates, une gestion du ténia basée sur la rotation des parcelles est vouée à l’échec. Cependant, des mesures peuvent limiter l’impact des ténias sur les agneaux : faire pâturer des prairies récentes, clôturer les bordures et détruire les oribates par hersage ou labour profond des prairies, permet la destruction des mousses et l’inhibition de la formation d’humus. Pour diminuer l’acidité du sol, des alcalinisants peuvent aussi être utilisés. Cette gestion des parcelles est probablement la piste la plus intéressante pour la maîtrise de ce parasite.

Remerciements aux Drs Pierre Autef et Bruno Salesse

Les définitions :

Téniasis : maladie provoquée par le ténia. Elle provoque notamment des diarrhées, des subanémies, provoque une laine cassante et frisottée.

Coprologie : étude microscopique des fécès. Cette pratique est préconisée pour surveiller l’état d’infestation parasitaire de ses animaux et permet de cibler au plus juste les animaux malades et les traitements à administrer.

Oribate : acarien vivant dans les prairies de pâturage et hôte intermédiaire du ténia.

Animal naïf : on parle de système immunitaire naïf lorsque celui-ci n’a pas encore été infecté par un pathogène donné.

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