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Pomme : quelle est l'importance des oiseaux et chauves-souris dans la régulation des ravageurs des vergers ?

Les oiseaux et chauves-souris contribuent à réguler les ravageurs du pommier. Le CTIFL a tenté d’évaluer leur impact sur les dégâts de tordeuses grâce à l’utilisation d’un filet d’exclusion.

Oiseaux et chauves-souris sont des prédateurs des ravageurs du verger de mieux en mieux connus, mais leur impact est encore mal quantifié. Leur contribution à la régulation naturelle des ravageurs, tels que le carpocapse et la tordeuse orientale, a été évaluée expérimentalement par le CTIFL dans un verger de pommiers (1). L’exclusion expérimentale des oiseaux et des chauves-souris constitue un outil puissant pour étudier l’impact de la faune sauvage sur les rendements et sur les communautés d’arthropodes. Il s’agit d’une sélection par la taille : les plantes étudiées sont enveloppées de filets dont les mailles empêchent l’accès des oiseaux et des chauves-souris en quête de nourriture mais permettent l’accès des arthropodes, simulant ainsi l’absence de vertébrés volants dans la culture étudiée.

Sous filet, des dégâts accrus de tordeuses

L’étude effectuée sur le centre CTIFL de Balandran s’est basée sur une exclusion permanente à l’aide d’un filet anti-oiseaux à maille carré de 19 mm, déployé au-dessus des pommiers sur trois ans entre 2019 et 2021. Le filet est maintenu à distance de la frondaison des arbres à l’aide d’arceaux métalliques et de câbles tendeurs. L’objectif est de quantifier l’impact de la prédation par les oiseaux et les chauves-souris sur les carpocapses et les tordeuses orientales en mesurant les dégâts occasionnés par les ravageurs sur les pommiers. Au niveau des arbres couverts par des filets, la prédation doit être rendue impossible ou fortement diminuée, comparativement à celle obtenue dans la zone témoin sans filet. La modalité Exclusion, c’est-à-dire en présence d’un filet, devrait ainsi engendrer plus de dégâts : fruits piqués et fruits avec larves.

Le comptage des dégâts sur fruits dans la frondaison est effectué une fois en juillet, en août et en septembre en 2019, en 2020 et en 2021. Les valeurs sont très élevées et montrent la très forte pression de ces ravageurs en l’absence totale de traitements phytosanitaires et de confusion sexuelle. La dernière date de septembre correspond à la récolte. À cette date, le pourcentage de fruits avec dégâts de tordeuses diminue comparativement à la date d’août car beaucoup de fruits dégradés chutent au sol au cours du temps. Les tests statistiques montrent une différence significative entre les modalités Exclusion et Témoin pour six des neuf dates de suivi, avec davantage de dégâts dans la modalité Exclusion qui interdit l’accès aux oiseaux et aux chauves-souris.

Une diminution du rendement brut de 9 %

Le comptage des dégâts sur la totalité des fruits produits, incluant les fruits au sol d’août et septembre et ceux de la récolte en septembre, montre des niveaux de dégâts très élevés dans les deux modalités, de l’ordre de 80 %. Bien que les différences soient faibles, il y a significativement plus de dégâts dans la modalité Exclusion que dans la modalité Témoin, aussi bien en 2020 qu’en 2021. L’exclusion induit une augmentation des dégâts et une diminution du rendement brut de 9 % environ.

Les résultats vont dans le sens attendu : les filets, qui empêchent l’accès à la frondaison des arbres pour les prédateurs volants, permettent d’obtenir une modalité dans laquelle les dégâts sont significativement plus importants que dans la modalité Témoin durant les trois années d’essais. L’absence ou la moindre activité des chauves-souris et des oiseaux au niveau de la frondaison des arbres et de leur périphérie immédiate entraîne en cascade une moindre prédation de larves et d’adultes de tordeuses.

Les mésanges, prédatrices majoritaires

Toutefois cette activité ne peut être évaluée que de façon globale pour les chauves-souris sans distinction des deux modalités, compte tenu du dispositif et de la méthodologie ; les modalités sont situées dans la même parcelle et le microphone enregistreur a une portée d’environ 30 m. De plus, la distance entre les filets et la frondaison des arbres reste réduite pour des raisons pratiques (0,5 à 2 m maximum) et cela est probablement insuffisant pour maximiser l’effet de l’exclusion puisque les chauves-souris peuvent circuler et chasser des ravageurs présents juste à l’extérieur du filet. Pour les oiseaux, leur présence est mesurée au sein même du feuillage par piégeage photographique.

Cependant l’activité de prédation de ces deux groupes de prédateurs n’a pu être directement mise en évidence ce qui limite l’interprétation des résultats. Dans ce dispositif, il est impossible d’isoler l’effet des chauves-souris de celui des oiseaux. Mais d’autres observations par caméra infrarouge ont montré qu’en début de nuit, les chauves-souris, et principalement les pipistrelles qui sont des espèces de lisières, volent très au-dessus des filets et, surtout, en bordure, le long des haies. Elles ne sont sûrement pas les prédatrices majeures des tordeuses dans cette parcelle. Le résultat observé est ainsi majoritairement à attribuer aux oiseaux et aux mésanges en particulier.

(1) Rôle des oiseaux et des chauves-souris dans la régulation naturelle des tordeuses, bilan de trois années d’expérimentation – Infos CTIFL n° 389 - avec la contribution de Michel Jay

Une activité suivie à la loupe

 
Des pièges photographiques ont permis d'évaluer l'activité des oiseaux. © CTIFL
Les enregistrements acoustiques du CTIFL ont permis d’enregistrer la présence de dix espèces de chauves-souris au moins. Trois espèces de pipistrelles sont particulièrement détectées : pipistrelle pygmée, pipistrelle commune et pipistrelle de Kuhl. Au cours des trois années, l’activité des chauves-souris peut être qualifiée de « moyenne », toutes espèces confondues. L’activité des chauves-souris sur la parcelle est élevée vers fin mai, tend à diminuer entre juin et mi-juillet puis s’intensifie en août et septembre. Elle est principalement concentrée en première partie de nuit et avant le lever du jour. Ces périodes correspondent plus ou moins aux périodes de vol du carpocapse mais il est impossible d’établir une corrélation directe car le piégeage de surveillance des vols montre des captures de papillons assez continues sur toute la période.

L’activité des oiseaux a été mesurée en 2020 et en 2021 à l’aide de deux pièges photographiques placés dans la frondaison des arbres de chacune des modalités. Les filets sont efficaces pour bloquer l’accès des oiseaux aux arbres. Dans de rares cas, quelques oiseaux ont été observés dans la modalité Exclusion à cause de problèmes d’étanchéité des fermetures, rapidement réparés. Les mésanges charbonnières ont été le plus fréquemment enregistrées dans la frondaison des pommiers Témoin.

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