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« Nous épandons jusqu’à 1 500 mètres cubes de digestat par jour avec notre système sans tonne »

L’unité de méthanisation Bassée Biogaz a investi dans un système sans tonne pour épandre ses 22 000 mètres cubes de digestat. Pour alimenter la rampe à pendillards, elle dispose de deux kilomètres de tuyau et utilise son réseau d’irrigation.

Opérationnelle depuis 2017, l’unité de méthanisation Bassée biogaz de Noyen-sur-Seine, en Seine-et-Marne, dispose de son propre système sans tonne et valorise une partie de son réseau d’irrigation pour épandre chaque année 22 000 tonnes de digestat (ou 22 000 m3 en considérant une densité de 1). Cette installation a été créée par Nicolas Brunet, céréalier, en association avec Carine Mallier et Lionel Boursaud, du cabinet Artaim conseil, qui accompagne les agriculteurs dans leur projet de méthanisation. Elle produit 240 mètres cubes de biométhane par heure, soit l’équivalent de 22 gigawattheures par an, qu’elle injecte dans le réseau de transport de gaz d’Île-de-France. Les digesteurs consomment annuellement 22 000 tonnes de matières méthanogènes. La ration se compose de 13 000 tonnes d’ensilage de cultures intermédiaires à vocation énergétique (environ 400 ha), de 4 000 tonnes de pulpes de betteraves, de 4 000 tonnes de soupe hygiénisée de biodéchets (restes de repas et de cuisines collectives) et de 1 000 tonnes d’issues de silo.

88 000 unités d’azote disponibles

La valorisation des unités d’azote organique issues de l’unité de méthanisation permet de limiter les apports d’engrais minéraux. « Avec une teneur moyenne de quatre unités d’azote par mètre cube de digestat brut, nous disposons ainsi de 88 000 unités valorisées au deuxième apport sur blé, à la place de la solution azotée liquide ou de l’ammonitrate. En appliquant en moyenne 200 unités par hectare, nous fertilisons ainsi 440 hectares », précise Lionel Boursaud. Pour ne pas être contrainte d’épandre le digestat dans l’urgence, l’unité de méthanisation dispose d’un an de capacité de stockage grâce à trois fosses géomembranes. La première lagune se trouve à proximité des digesteurs, la seconde à 5 km et la troisième à 10 km. Toutes fournissent un îlot de terres. Pour le moment, les deux réserves éloignées sont approvisionnées avec la tonne à lisier de Bassée Biogaz, mais les associés méthaniseurs prévoient de poser une canalisation spécifique en PVC pour transférer le digestat dans celle située à 5 km.

Jusqu’à 200 m3/h en instantané

La tonne à lisier de 20 mètres cubes s’équipe ponctuellement d’une rampe à pendillards pour épandre une petite partie des 22 000 mètres cubes dans certaines parcelles éloignées. Son rendement s’avère limité à 200 mètres cubes par jour. « Avec l’important volume à traiter, la solution la plus efficace reste l’épandage sans tonne. Cette technique permet d’atteindre de bons débits de chantier (jusqu’à 200 m3/h en instantané) et d’intervenir rapidement pour profiter des meilleures conditions, tant en termes de date par rapport au stade de la culture que de conditions météo. Vu le prix de l’azote, nous nous interdisons d’épandre quand les risques de pertes par volatilisation sont importants », souligne Lionel Boursaud. L’exploitation de Nicolas Brunet dispose d’un parcellaire favorable à l’épandage sans tonne et, une fois l’équipement en place, le volume épandu dans la journée atteint 1 500 mètres cubes en prenant une pause déjeuner. Pour s’équiper, Bassée Biogaz s’est rapprochée de la société française Listech, à qui elle a acheté une rampe à pendillards de 18 mètres de large, deux motopompes, un enrouleur semi-porté, une poulie de guidage du tuyau accrochée sur le relevage trois points, un compresseur de chantier et 2 000 mètres de tuyau, dont 400 mètres conçus spécifiquement pour l’épandage. L’ensemble représente aujourd’hui un investissement d’environ 250 000 euros hors taxes.

Deux motopompes et deux opérateurs mobilisés

Pour les parcelles situées à proximité de l’unité de méthanisation, Bassée Biogaz utilise le réseau d’irrigation de 200 mm de diamètre. Le chantier type comprend une première motopompe qui aspire dans la lagune et refoule dans la canalisation d’irrigation. La seconde motopompe, identique et placée à 2 km, relance le flux de digestat, afin d’assurer une alimentation au bon débit de la rampe à pendillards. Deux salariés sont obligatoirement mobilisés. L’un assure l’épandage, tandis que l’autre contrôle les motopompes. Le second opérateur gère aussi l’agitateur animé par un tracteur de 150 chevaux, qui homogénéise le digestat et liquéfie la croûte formée en surface durant le stockage. Le tracteur doté de la rampe développe aussi 150 chevaux et dispose de roues arrière jumelées, un équipement indispensable pour respecter la culture en place, mais aussi tirer sans patiner le tuyau souple rempli de digestat. Mesurant 114 mm de diamètre, le tuyau de 400 mètres de long contient, par exemple, quatre mètres cubes, soit quatre tonnes de digestat.

Le réseau d’irrigation sectorisé

En fin d’épandage, pour nettoyer le circuit, une balle en mousse est placée à la sortie de la motopompe. Elle est poussée jusqu’à la rampe d’épandage par le puissant compresseur de chantier. Un rinçage à l’eau clair est ensuite réalisé. « Nous avons dû sectoriser le réseau d’irrigation avec des vannes, afin de faire circuler le digestat uniquement dans la canalisation desservant le chantier. Nous avons aussi changé les raccords pour éviter de freiner le passage du digestat et ajouté des sécurités pour protéger le forage et éviter tout risque de pollution », indique Lionel Boursaud.

Bassée Biogaz en chiffres

3 associés : Carine Mallier, Nicolas Brunet et Lionel Boursaud

22 gigawattheures par an de production de biométhane

22 000 mètres cubes de digestat

88 000 unités d’azote issues de la méthanisation

250 000 euros HT d’investissement dans le système d’épandage sans tonne

Un bilan humique positif avec le digestat

« Comme nous sommes dans une région céréalière où les apports de fumier sont rares, l’épandage de digestat se révèle favorable au bilan humique, constate Lionel Boursaud. Il reste en effet une fraction ligneuse correspondant à 6 à 8 % du volume, qui n’est pas dégradée par le digesteur. En appliquant le digestat brut, cette part de matière organique se retrouve dans le sol. Elle est dégradée par la flore du sol et contribue ainsi à la formation d’humus. » Les pulpes de betteraves et les issues de silos, qui étaient auparavant exportées, reviennent maintenant dans le sol via le processus de méthanisation. À cela, s’ajoute la part de biodéchets valorisés dans les digesteurs, qui constituent une source supplémentaire de matière organique. De surcroît, toutes ces matières représentant 9 000 tonnes de digestat apportent 36 000 unités d’azote.

 

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