ESSAI : Deutz-Fahr 6140.4 RVshift - « Un tracteur polyvalent valorisé par sa transmission »
Sébastien Tourret, éleveur à Montvicq dans l’Allier, fait le bilan d’une semaine au volant du tracteur Deutz-Fahr 6140.4 RVshift de 147 chevaux.
Sébastien Tourret, éleveur à Montvicq dans l’Allier, fait le bilan d’une semaine au volant du tracteur Deutz-Fahr 6140.4 RVshift de 147 chevaux.
Commercialisés l’an dernier, les tracteurs de la nouvelle série 6.4 de Deutz-Fahr, assemblés à Lauingen en Allemagne, s’intercalent entre la gamme 6C (120 à 136 ch) et les 6160.4 et 6170.4 (161 et 171 ch), ces derniers se différenciant par leur moteur Deutz et leur transmission ZF. Les trois modèles (6130.4 ; 6140.4 et 6150.4) reçoivent une motorisation et une transmission produites par le groupe SDF. Le 4 cylindres FARMotion de 3,8 l, développant une puissance maxi de 136 à 156 ch, est associé au choix à deux transmissions. Apparue sur les 6C, la full powershift RVshift à 20 rapports avant et 16 arrière du tracteur essayé partage la même architecture que la variation continue TTV. Avec les rampantes en option, elle se comporte d’ailleurs comme la TTV en dessous de 5 km/h.
Circuit hydraulique load sensing
Ces tracteurs adoptent un pont arrière spécifique fabriqué par SDF, comme le nouveau pont avant suspendu à réducteurs externes. Ils bénéficient d’un relevage arrière d’une capacité de 9 200 kg et leur circuit hydraulique load sensing délivre 120 l/min. Ils proposent trois régimes de prise de force (540, 540 ECO et 1000) et intègrent en option une prise de force proportionnelle à l’avancement.
La cabine à six montants, largement éprouvée, dispose d’un accoudoir multifonction et accède en option à la suspension pneumatique. Elle se décline en trois niveaux de finition : MaxiVision réservée à la transmission RVshift (4 distributeurs arrière mécaniques), MaxiVision + (deux distributeurs mécaniques et deux électrohydrauliques) – celle du tracteur essayé –, et enfin, MaxiVisionPro réservée aux modèles TTV (distributeurs électrohydrauliques et commandes toutes regroupées sur l’accoudoir avec terminal 12 pouces en option).
Les conditions du test
Perturbée par la fin d’automne pluvieuse, la semaine d’essai s’est limitée à du labour avec une lourde charrue 5 corps varilarge et à des travaux de manutention.
Les plus
Capacité de traction
Souplesse de la transmission
Moteur « pêchu »
Simplicité des commandes
Les moins
Gabarit dans les bâtiments
Rayon de braquage
Pas de prise de force 1000 Eco
Au travail « Sa transmission powershift est une réussite »
Au labour avec la lourde charrue, ce quatre cylindres fait forte impression. La masse de 1 300 kg sur le relevage avant suffit à bien équilibrer les masses. Le tracteur patine très peu et son moteur de cylindrée pourtant modeste, m’a étonné par sa vigueur. Il résiste vraiment bien à 1 500 tr/min. Il n’y a qu’à très bas régime qu’il peut paraître un peu creux, mais l’excellente transmission powershift permet un redémarrage à basse vitesse et elle égrène les rapports sans aucun à-coup. En bout de champ, le bon débit hydraulique et le relevage puissant facilitent les manœuvres. En revanche, le rayon de braquage de ce tracteur assez long n’est pas son point fort, même si le système réduisant le nombre de tours de volant permet de braquer plus vite les roues.
La hauteur de levage du chargeur frontal est remarquable. C’est un atout pour empiler les balles et charger la mélangeuse. Le circuit hydraulique load sensing permet des mouvements rapides, sans trop de régime. Il ne manque qu’une troisième fonction indépendante pour des mouvements simultanés plus rapides. La souplesse de la transmission est un régal, aussi bien pour les passages de rapports que pour l’inverseur, dont la réactivité est très facilement réglable depuis une molette sur le levier. Si la cabine assez haute est un plus pour la visibilité et l’empattement long un avantage pour l’équilibre du tracteur, ils sont en revanche limitants pour intervenir dans les bâtiments.
La route est un autre terrain de prédilection de ce 4 cylindres à l’empattement assez long. Il est stable, y compris lorsque la charrue est attelée et il se montre très confortable, grâce à un pont et une cabine (pneumatique) suspendus très efficaces. En mode route, la transmission powershift montre tout son potentiel, avec des passages de vitesses progressifs et un bon étagement. Le moteur n’est jamais à la peine. On peut choisir entre la conduite au levier, qui offre la possibilité d’un passage séquentiel d’un seul ou deux ou trois rapports à la fois, et le mode automatique qui donne l’impression de conduire une variation continue. Au-dessus de 25 km/h en mode Eco, la transmission se mue carrément en variation continue, il n’y a plus de vitesses perceptibles. Cette gestion très poussée de la transmission favorise une conduite à bas régime peu gourmande en GNR. Et comme la cabine est très bien insonorisée, on n’entend pas le moteur. Pour économiser les freins, j’ai apprécié la petite pédale servant à actionner le frein moteur hydraulique, dont l’effet est vraiment perceptible au-delà de 20 km/h.
La capacité du relevage arrière de plus de 9 t impressionne. L’attelage est plutôt bien équipé avec quatre distributeurs, des prises power beyond et l’Isobus. Il ne manque que des leviers de décompression sur les distributeurs. À noter que Deutz-Fahr propose un système de freinage de remorque combinant double ligne hydraulique et double ligne pneumatique, un atout pour l’avenir. Concernant le relevage avant, je suis étonné que Deutz-Fahr l'équipe en catégorie 2 et qu’il ne soit pas mieux intégré : les prises hydrauliques dépassent trop quand ses bras sont rabattus et deux conduites d’alimentation hydraulique passent devant le bas du capot moteur, à la hauteur du pont avant.
En cabine « Des commandes simples et beaucoup de réglages »
La cabine à six montants des Deutz-Fahr s’est modernisée au fil du temps. Ce n’est pas la plus spacieuse, mais on ne s’y sent pas à l’étroit. Je trouve que la finition a progressé et les matériaux sont de bonne qualité. La cabine étant assez haute et le capot un peu plongeant, la visibilité sur l’avant s’avère satisfaisante au chargeur, d’autant plus avec le large toit vitré et le brancard large. Sur la droite, le tuyau d’échappement reliant le système de dépollution et le multicoupleur du chargeur gênent quand même un peu la vue sur la roue. Il manque un peu de hauteur dans l’habitacle pour moi qui suis de grande taille : je dois abaisser le siège au maximum pour ne pas avoir les yeux en face du bandeau séparant le pare-brise du toit vitré. La visibilité sur l’attelage arrière est un peu entravée par les connexions power beyond et les mains pneumatiques fixées sur deux plaques en hauteur. Rien à redire côté climatisation et qualité du système audio. Les rangements sont nombreux et la glacière électrique optionnelle est peut-être superflue. On s’étonne d’ailleurs que ce tracteur ciblant les fermes d’élevage ne dispose pas de porte à droite.
Les commandes sont réparties entre l’accoudoir multifonction, la console et le montant. Elles sont parfaitement identifiées par un code couleur dont Deutz-Fahr a le secret : la prise en main est rapide. Le petit levier de transmission se pilote de manière intuitive : on pousse pour monter les rapports et on tire pour les descendre, avec la possibilité de passer plusieurs rapports à la fois en appuyant simultanément sur un bouton à l’avant du joystick. Un basculement sur la gauche permet d’enclencher le régulateur. Ce levier dispose aussi de trois boutons et d’une molette auxquels on peut attribuer de nombreuses fonctions depuis l’ordinateur de bord ou le terminal. Sur la droite, un peu trop en retrait à mon goût, ce qui oblige à avoir le bras reculé, le joystick hydraulique est très précis pour piloter le chargeur. Comme il dispose également de boutons programmables, on peut lui affecter le passage des vitesses et l’inverseur. Sur la console, les deux leviers de distributeurs sont bien placés, mais j’aurais aimé pouvoir accéder à des commandes électriques en option, un privilège réservé au modèle TTV. La rangée d’interrupteurs placés en retrait à l’arrière du siège n’est pas idéalement située, sauf pour la commande pas à pas du relevage, bien pratique pour atteler un outil. En haut du montant, la commande centralisée des phares est un modèle de praticité. Tout le contraire de la clef de contact qui se situe sur le bas de la console, derrière l’accoudoir.
Le terminal iMonitor dans sa version de 8 pouces ne prend pas trop de place et son implantation le long du montant sur un système à rotule permet de le positionner à sa guise. Cet écran offre une navigation intuitive, mais la commande tactile est moins évidente que sur le modèle de 12 pouces. On peut régler de nombreux paramètres, notamment au niveau de la transmission. Cela donne la possibilité d’optimiser la conduite, mais c’est même presque superflu sur certains aspects.
L’écran central du tableau de bord donne aussi accès à tous les réglages du tracteur, en plus d’afficher les données de base. On s’y perd un peu au début, mais une fois l’habitude prise, je me suis rendu compte qu’un utilisateur qui n’a pas besoin d’Isobus et de GPS, pourra se contenter de ce seul écran et se passer du terminal.
Entretien « Quelques points à améliorer »
Après avoir ouvert le capot moteur, on accède directement au filtre à air implanté à l’avant des radiateurs. Pour nettoyer ces derniers, il n’y a que le condenseur de climatisation qui coulisse. Dommage que les autres soient fixes. Pour atteindre les filtres à huile et gazole, tous regroupés du côté droit du moteur, il faut retirer le panneau latéral, mais cela se fait sans difficulté. On remarque la découpe dans le bâti du chargeur pour atteindre le filtre à huile. Du même côté, la batterie est implantée derrière l’échelle d’accès à la cabine. Il y a quelques vis à retirer pour l’atteindre. Au même niveau, la boîte à outils subit les projections de la roue avant. Les filtres de la cabine intégrés dans les montants latéraux sont toujours aussi compliqués à démonter.
Fiche Technique
Deutz-Fahr 6140.4 RVshift
Moteur
Puissance au régime nominal (ECE R120) : 139 ch à 2 200 tr/min
Puissance maxi (ECE R120) : 147 ch à 2 000 tr/min
Couple maxi : 622 Nm à 1 400 tr/min
Cylindrée : 3 849 cm3
Norme et système de dépollution : Stage V avec EGR + DOC + FAP + SCR
Capacité d’huile du moteur : 9,5 l
Espace entre chaque vidange : 600 h
Transmission
Type : full powershift
Nb de rapports (av./ar.) : 20/16
Nb de rapports entre 4 et 15 km/h : 9
Régime moteur à 40/50 km/h : 1 415/1 765 tr/min
Régimes de prise de force et régime moteur correspondant :
540/540E/1000 à 1 958/1 592/1 960 tr/min
Circuit hydraulique
Type : load sensing
Débit : 120 l/min
Nb de distributeurs arrière de série : 4
Relevage
Capacité maxi aux rotules (ar./av.) : 9 200/3 000 kg
Dimensions
Capacité du réservoir (GNR/AdBlue) : 260/25 l
Hauteur hors tout : 2,97 m
Empattement : 2,56 m
Rayon de braquage mini : 4,80 m
Poids à vide : 6 500 kg
PTAC : 10 500 kg
Monte pneumatique : 480/65R28 et 580/70R38
Budget
Prix catalogue du modèle essayé au 01/04/2024 : 163 010 euros HT