La grippe aviaire met la Bretagne sous haute tension
Les services de l’État et les professionnels des filières avicoles se mobilisent pour réduire rapidement les foyers du cluster des Côtes d'Armor, afin d'éviter une envolée de l’épizootie en Bretagne et une sortie des virus hors zone.
Les services de l’État et les professionnels des filières avicoles se mobilisent pour réduire rapidement les foyers du cluster des Côtes d'Armor, afin d'éviter une envolée de l’épizootie en Bretagne et une sortie des virus hors zone.
L’inquiétude est nettement palpable parmi les éleveurs et les représentants bretons des filières avicoles, comme l’a montré la réunion du 14 février organisée à l’initiative de la chambre d’agriculture des Côtes d’Armor et de la FDSEA. En présence des services de l’État, il s’agissait d’informer sur la situation sanitaire et sur les mesures prises, dans un état d’esprit commun « de sortir ensemble de cette situation ».
Ce département a connu une forte accélération du nombre de foyers depuis fin janvier.
Jusqu’au 24 février, deux secteurs se côtoyaient, avec des évolutions épidémiologiques différentes. Celle située au nord-ouest de Guingamp était stabilisée après deux foyers. En l’absence de nouveau cas depuis début février, la zone de protection a été levée le 24 février.
Le second secteur au sud-est a formé un cluster, avec 18 foyers survenus depuis le 4 février et concentrés dans un cercle de moins de dix kilomètres de rayon (voir liste détaillée en bas de l'article).
« Ils sont presque tous situés dans un périmètre restreint, très dense en élevages de poules pondeuses, résume Virshna Heng, directeur de la DDPP des Côtes d’Armor. Il est assez atypique d’avoir autant de foyers de Gallus ponte. Peut-être que le virus a évolué ou bien c’est dû à la surdensité de poules ou encore à des vecteurs communs (collecte d’œufs, livraison d’aliments…). »
« La clé est de détecter et de dépeupler rapidement » rappelle sans cesse le directeur de la DDPP 22. Pour renforcer la force de frappe de GT logistic, il a été fait appel à une société néerlandaise (N.D.L.R.: Van Eyck) qui euthanasie au gaz dans les bâtiments ayant de grands effectifs (5 poulaillers au 2 mars). Un chantier par injection létale a été opéré par la DDPP 22 et des vétérinaires.
Dans ces conditions, le rythme d’un foyer à gérer par jour semble soutenable. « Face à cette situation inédite, la DDPP 22 a mobilisé presque tous ses 220 agents, en donnant la priorité à la gestion des conséquences des foyers », rappelle Virshna Heng.
De plus, les mesures ont été renforcées le 22 février par le dépeuplement préventif des élevages de palmipèdes (hors accouvage sélection) dans toute la zone réglementée et par la mise en place de plateformes d’entreposage temporaire des œufs de la ZR destinés à être expédiés hors ZR. Cela afin de réduire les risques de diffusion hors zone via les moyens de transport.
La DDPP 22 a aussi exhorté les professionnels à dédensifier par des réformes anticipées.
La filière ponte touchée en plein cœur
La zone réglementée sud-est est à la filière ponte ce que les Landes sont à la filière du foie gras. Elle concentre de nombreux élevages de reproducteurs, de poulettes, de poules pondeuses et comprend deux couvoirs (sélection chair et poussins export). Dans ce cœur historique de la production d’œufs de poules en cage, les élevages sont proches et de grande taille (plusieurs dizaines de milliers). D’où l’inquiétude immédiate et à moyen terme.
Dans l’instant, il faut trouver le compromis entre la poursuite des activités économiques et la maîtrise sanitaire. Chaque jour, la DDPP reçoit environ 150 demandes de laissez-passer à contrôler pour expédier des œufs en dehors des zones de surveillance. En revanche, les volailles ne bougent plus, hormis pour l’abattage final (pas de détassage).
Des lots de poulettes ont commencé à pondre dans les poussinières et d’autres ne sont pas mises en place dans la zone. Même intra zone, les mouvements de poulettes seraient problématiques. Une dérogation rectifiée est parue le 1er mars, permettant de transférer des poulettes futures pondeuses et des reproducteurs hors d'une zone réglementée.
Tout cela se traduira un manque d’œufs dans les semaines et mois à venir, mais il est encore difficile de chiffré sa durée et son ampleur.
Le 21 février, le directeur de la DDPP22 estimait que les deux semaines à venir seraient décisives. « Nous sommes à un tournant. Il faut absolument que les professionnels renforcent leurs mesures de biosécurité et qu’ils mutualisent pour limiter les mouvements autour et entre les élevages. Il faut jouer collectif. Sans quoi, un agrandissement de la zone réglementée pourrait conduire la DGAL à s’orienter vers un dépeuplement préventif, comme dans les Pays de Loire. » Ce qu'elle a malheureusement commencé à faire en éliminant tous les palmipèdes de rente.
Liste des foyers identifiés en Côtes d’Armor en 2023 au 2 mars
Secteur au nord-ouest de Guingamp : 2 foyers. La zone de protection a été levée le 24 février
Tonquédec (ref Omsa : IA20230064) : le 8 janvier (date notifiée à l’Omsa) - 200 canards de chair
Prat (IA20230333) : le 31 janvier -11 000 dindes de chair
Secteur au sud-est de Guingamp : 20 foyers sur 6 communes touchées au 2 mars
En janvier :
Saint Connan (IA20230276) : le 30 janvier -12 000 poules pondeuses (plein air)
En février :
Saint Fiacre (IA20230361): le 4 février - 6000 poules pondeuses
Saint Gilles Pligeaux (IA20230365) : le 6 - 53 340 poules pondeuses (en volière)
Saint Bihy (IA20230376) : le 6 - 6 000 dindes reproductrices
Saint Connan (IA20230381) : le 6 - 8 000 dindes et poulets de chair
Saint Connan (IA20230396) : le 7 - 14 100 poulettes ponte
Saint Connan (IA20230437) : le 8 - 90 000 poulettes ponte
Saint Connan (IA20230432) : le 9 -34 757 poules pondeuses
Saint Pever (IA20230482) : le 13 -8 630 canards futurs reproducteurs
Saint Connan (IA20230514) : le 14 - 17 900 poulettes ponte
Saint Connan (IA20230523) : le 16 – 194 946 poules en cages
Saint Pever (IA20230538) : le 17 – 116 000 pondeuses
Saint Gilles Pligeaux (IA20230563) : le 18 – 30 000 poulettes ponte
Seven Lehart (IA20230574) : le 20 - 134 000 poules en cages
Saint Connan (IA20230608) : le 21 – 184 700 pondeuses en cages
Saint Pever (IA20230600) : le 22 – 110 000 pondeuses
Saint Pever (IA20230605) : le 22 – 30 000 pintades
Senven-Lehart (IA20230607) : le 22 – poulettes ponte (nombre nonprécisé par Omsa)
Saint Gildas : le 24 – futurs reproducteurs poulet (source : Arrêté préfectoral)
En mars :
Saint Connan : le 2 mars - 16 000 poules pondeuses (en mode plein air) (source : ATM avicole) euthanasiées le 2mars après-midi
Les deux derniers foyers (icones violettes) ne sont pas géolocalisés sur la carte