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Les plantes dites « à tanins » ne remplacent pas un traitement chimique pour contrer les parasites internes des ovins

Les résultats des essais sont unanimes : la chicorée, le plantain et le sainfoin assurent de bonnes performances mais ne constituent pas un moyen de lutte contre les strongles digestifs.

Afin de quantifier les éventuels effets antiparasitaires de ces plantes à tanins contre les strongles digestifs, huit essais et trois suivis en élevages ont été conduits entre 2019 et 2021. Ce sont des animaux particulièrement sensibles au parasitisme qui ont été choisis : des agnelles de renouvellement et des agneaux sevrés.

« Les résultats des huit essais sont sans appel »

Dans tous les cas, la chicorée, le sainfoin et le plantain avaient été semés en pure. Par ailleurs, deux modes de pâturage ont été testés pour chaque espèce fourragère : du pâturage en continu ou bien en cure d’une durée de 2 à 3 semaines, temps nécessaire pour obtenir un effet antiparasitaire selon les références bibliographiques.

Une meilleure croissance avec le sainfoin

Si le sainfoin pâturé en été améliore les croissances des agnelles par rapport à une prairie à base de graminées dans les deux essais réalisés dans le sud-est de la France, ses vertus antiparasitaires sont nettement moins tranchées (voir tableau 1). En effet, une utilisation sous forme de cure de trois semaines apparaît sans effet. En pâturage continu, le nombre d’œufs de strongles comptés dans les fèces des agnelles passe de 1 000 pour les jeunes femelles qui pâturent des graminées à 771 pour celles sur sainfoin. Le pâturage de cette légumineuse ne remplace donc pas un traitement antiparasitaire chimique. Le taux de tanins condensés mesurés était pourtant de 48 g par kg de matière sèche contre respectivement 2 et 3 g pour la chicorée et le plantain. Avec près de 5 % de tanins dans la ration des agnelles, un effet antiparasitaire était attendu selon la bibliographie.

L’amie chicorée n’a pas d’effets

De même, la chicorée n’a pas eu les effets escomptés. En effet, dans cinq essais sur six, aucune réduction de la charge parasitaire n’a été mesurée (voir tableau 2). Les taux d’excrétion, d’après les résultats des coproscopies, sont inchangés qu’ils soient à des taux faibles ou très élevés. Toutefois, la chicorée semble avoir un rôle réducteur dans un essai avec 550 œufs de strongles digestifs par gramme contre 876 pour les agneaux qui pâturaient les graminées. Cependant les taux mesurés sont supérieurs au seuil usuellement considéré comme nécessitant un traitement antiparasitaire chimique.

Par ailleurs, le plantain semé en pure n’a pas réduit non plus le nombre d’œufs de strongles digestifs présents dans leurs fèces (voir tableau 3). Le comptage des vers adultes dans leur tube digestif le confirme (voir graphique). Ils sont même supérieurs de 40 % à ceux des agneaux pâturant des graminées.

Les mêmes résultats en mélange

Après plusieurs années de tests, les éleveurs du groupement de valorisation agricole de Mézières sur Issoire (Haute-Vienne) ont mis au point un mélange à base de plantain, trèfles et luzerne adapté à leur contexte pédoclimatique. Deux d’entre eux ont pesé un lot d’agnelles et réalisé des analyses de crottes avec l’aide de leur technicienne en 2020. Si les croissances obtenues sont correctes pour de jeunes animaux alimentés exclusivement à l’herbe (207 et 113 g par jour pour les deux lots), leurs taux d’excrétion en strongles sont restés inchangés après 28 jours de pâturage.

Didier Dussouchaud, éleveur à Blond (Haute-Vienne)

Des agneaux finis à l’herbe sans concentré

 

 
Didier Dussouchaud, éleveur à Blond (Haute-Vienne)
Didier Dussouchaud, éleveur à Blond (Haute-Vienne) © CA 87
« Dans toutes mes prairies, j’introduis du plantain pour sa facilité d’exploitation que ce soit en enrubannage, foin ou pâture. Le plus souvent, je fais une première exploitation en fauche précoce, puis, en juin, je réserve la repousse pour les agneaux de printemps sevrés. Avec un chargement de 30 à 40 agneaux/ha et un redécoupage en huit parcs, je fais un pâturage tournant qui me donne totalement satisfaction ».

 

Danièle Barataud, chambre d’agriculture de la Haute-Vienne

Une meilleure production des prairies

 

 
Danièle Barataud, chambre d’agriculture de la Haute-Vienne
Danièle Barataud, chambre d’agriculture de la Haute-Vienne © CA 87
« Avec les éleveurs de Mézières sur Issoire et de Bellac (Haute-Vienne), nous avons notamment testé le plantain. Même si nous ne pouvons pas lui reconnaître une action vermifuge, nous constatons souvent que les animaux vivent mieux avec leurs parasites. Mais surtout, le plantain permet de faire pâturer des prairies très riches en légumineuses, en toute sécurité et d’obtenir ainsi des performances animales très satisfaisantes ».

 

Vincent Bellet, Institut de l’Élevage

Une économie de 3 500 euros

 

 
Vincent Bellet, Institut de l’Élevage
Vincent Bellet, Institut de l’Élevage © DR
« Dans le bassin allaitant du Centre Ouest, le mélange mis au point par les éleveurs du GVA de Mézières sur Issoire avec du plantain prolonge de 15 jours environ le pâturage des agneaux par rapport aux autres types de prairies temporaires. Même si le plantain ne réduit pas le parasitisme des agneaux, les prairies sont plus productives en été. Pour une exploitation de 80 ha et 500 brebis, les économies d’aliments permises par le semis de 10 hectares de ce type de prairies s’élèvent à 3 500 euros dans la conjoncture de fin 2022 (source Inosys Réseaux d’élevage) ».

 

Laurent Solas, chambre d’agriculture de la Saône-et-Loire

Garantir la lactation à l’herbe

 

 
Laurent Solas, chambre d’agriculture de la Saône et Loire
Laurent Solas, chambre d’agriculture de la Saône et Loire © DR
« En Bourgogne, sur une exploitation de 960 brebis qui mettent bas au printemps sur 140 ha, la mise en place de 50 ha de prairies temporaires avec le mélange GVA à base de plantain, trèfles et luzerne permet de finir davantage d’agneaux à l’herbe. En effet, les agneaux sont plus lourds au sevrage grâce à une meilleure lactation des brebis. L’économie de cinq tonnes de fourrage et de six tonnes d’aliment concentré induit une économie de l’ordre de 2 500 euros dans la conjoncture de fin 2022 (source Inosys Réseaux d’élevage) ».

 

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