Kiwi
Le kiwi français dynamique, à la fois par l'offre en rayon que par la demande des Français
Le kiwi jaune ne dément pas son succès. L'arrivée du rouge dynamise encore plus le rayon. Conséquences : les opérateurs investissent massivement dans les projets de plantation. Le marketing reste essentiel.
Le kiwi jaune ne dément pas son succès. L'arrivée du rouge dynamise encore plus le rayon. Conséquences : les opérateurs investissent massivement dans les projets de plantation. Le marketing reste essentiel.
Sixième espèce fruitière produite en France, le kiwi revient pourtant de loin. Alors que la production française de kiwis tournait autour des 80 000 t en 2000, uniquement avec du kiwi vert, elle est descendue à 55 000 t en 2020 alors que les variétés jaunes et rouges ont émergé. « C’est une baisse de 32 % en 20 ans ! Le verger, en perte de surfaces de “seulement” -8 % (de 4 125 ha à 3 800 ha) accuse surtout une baisse de productivité, avec des vergers vieillissants et des problématiques sanitaires », analyse Maxime Gil, directeur général de Cancel Fruits.
« Le PSA [bactérie Pseudomonas syringae du kiwi] a affecté le verger français, en particulier de 2011 à 2014. Ça a été quatre années compliquées avec un arrêt de croissance de la production et pas de renouvellement de vergers. Et la période 2018-2021 a accusé des accidents climatiques successifs qui expliquent le déclin de la production française », précise François Lafitte, président de la Scaap Kiwifruits de France et de Primland.
Une consommation santé pour le vert, plaisir pour le jaune, mais en forte croissance dans les deux cas
En parallèle, la consommation française tourne autour de 86 000 t. Sur ces 86 000 t, 40 000 t sont d’origine France (10 000 t environ sont exportées). « On importe plus que ce qu’on consomme », regrette Maxime Gil.
Cette consommation française, au contraire de la production, continue de progresser, sans doute tirée par la qualité du produit qui s’est développée, avec des fruits mieux affinés, ainsi qu’un plébiscite gustatif. « Le consommateur a mieux compris comment consommer ce fruit, se réjouit François Lafitte. De plus, ses atouts nutritionnels (vitamines, minéraux) jouent en sa faveur et la crise Covid qui a mis en avant la nutrition et la santé par l’alimentation a accéléré la tendance. » Le vert est consommé toute l’année, surtout en hiver (consommation santé), tandis que le jaune l’est surtout en été (origine Nouvelle-Zélande), pour une consommation plaisir. D'autant plus que le marché est vide entre février et juin, l'hémisphère Sud ne commençant qu'en juin et les variétés françaises et européennes n'allant pas jusqu'à la fin de l'hiver.
Une consommation qui reprend des couleurs : succès du jaune
L’innovation variétale par la couleur participe à dynamiser la consommation. Le kiwi jaune est apparu sur le marché il y a une dizaine d’années. La Nouvelle-Zélande a fait connaître la variété, les entreprises françaises sont venues en complément.
La consommation aujourd’hui reste majoritairement concernée par le vert (80 %) mais « la progression de consommation se fera désormais grâce au jaune, c’est là où il y a de nouveaux consommateurs à gagner je pense, des consommateurs attirés par un fruit moins acide et plus doux que le vert, analyse François Lafitte. En vert, la consommation progresse doucement mais sûrement, peut être de 5 % par an ? Mais en jaune, elle double chaque année. »
« Le rouge va rester une niche mais je pense que le jaune va à terme atteindre les niveaux de consommation du vert », estime Sylvain Colleville, directeur du développement du groupe Peruzzo.
Une segmentation en rayon guidée par la couleur, le mode de production et l’affinage
La segmentation de la gamme kiwi se fait désormais en premier lieu par la couleur et le goût. « La première identification par le consommateur se fait par la couleur, couleur qui ensuite aide à caractériser le goût : le vert est acide, le jaune doux et sucré, le rouge c’est encore autre chose », confirme Jean-Baptiste Pinel, directeur général de Primland.
Autre levier de segmentation : le mode de production, les labels et les certifications, les cahiers des charges des distributeurs. Label Rouge et IGP pour le kiwi de l’Adour, IGP Corse, ZRP, bio, HVE…
Enfin la filière peut jouer sur les emballages et l’affinage pour augmenter la durée de présence en rayon. Selon la segmentation, les emballages seront différents. Les références et les exigences des distributeurs se multiplient.Le vrac reste consacré au cœur de gamme.
La communication, le nerf de la guerre
La communication aide aussi à développer la consommation. Le BIK (Bureau interprofessionnel du kiwi) finance des actions de communication (radio surtout, un peu avec les salons etc.). Des actions collectives dans le cadre du programme européen pour les produits sous signe de qualité mettent en avant le kiwi de l'Adour. Et chaque entreprise communique sur ses produits. En particulier Primland qui bénéficie d’une marque BtoC avec une certaine notoriété : Oscar est en effet la 2e marque de kiwi la plus connue derrière Zespri (notoriété à 25 % contre 45 % pour Zespri en 2021-2022).
Communication Oscar : des kiwis candidats à la présidentielle.
Primland vient de réaliser une « belle opération » de communication sur Oscar Gold pour le marché français (jeu sur stickers, stop rayon…). Une nouvelle opération est en préparation pour mars et avril, en écho du 1er et du 2ème tour de la présidentielle. Elle consistera « à faire parler chaque kiwi Oscar de la gamme, du bio au Label Rouge… Chacun revendiquera ses promesses et ses qualités, explique Olivier Pouilhes, responsable marketing et communication chez Primland. L’objectif est de développer la notoriété chez le consommateur à la fois de la marque mais aussi du produit, et de montrer aux distributeurs que nous sommes dynamiques chez Primland. » Les réseaux sociaux sont aussi un levier non négligeable. Oscar fédère une communauté « fidèle qui nous suit » et qui permet des renvois sur le site web Oscar (190 000 connexions). Ce site Oscar est d’ailleurs en cours de refonte et devrait sortir pour le printemps.
Production : une dynamique de plantation dans les toutes les entreprises
La consommation française est donc au mieux de sa forme. Mais le verger français est vieillissant avec peu de plantations depuis 10 ans et une production en baisse. Conclusion de l’équation : il faut planter, renouveler en vert, innover en nouveaux types de couleur et variétés. « D’autant plus que les prix payés producteurs sur le marché français sont très bons », précise Maxime Gil. Les nouveautés sont valorisées. « Le kiwi jaune, bien que plus cher à produire (plus complexe en production, plus de contrôles en station) reste bien valorisé avec des prix autour de « 3 €/kg contre 2,40 €/kg en vert, prix grossiste », illustre François Lafitte.
Pour le kiwi rouge, pour le moment bien valorisé, il faudra trouver un point de bascule offre-demande lorque les volumes disponibles seront plus conséquents. Le levier se situera au niveau du prix, selon Sylvain Colleville. « Le déclencheur se fera autour d’un prix de 1 € le kiwi, estime-t-il. Actuellement, le kiwi rouge français, 90 t cette année par un seul opérateur, s’est vendu, prix Centrale, à 12 €/kg soit 2 €/kiwi. A titre de comparaison, le kiwi jaune français se vend de 3 €/kg à 5-6 €/kg, prix de gros. »
A la Scaap Kiwifruits de France/Primland, on a ainsi aujourd’hui de jeunes vergers qui entrent en production. « On avait senti le vent tourner et engagé un schéma de plantation dynamique sur 2021-2022-2023, avec 200 ha prévus sur la Vallée de l’Adour et la Vallée des Gaves, dont la moitié du potentiel en kiwi vert sous Label Rouge kiwi de l’Adour, et l’autre moitié en kiwis jaunes », précise François Lafitte.
Importateur de kiwis verts et jaunes pour le marché français, le groupe Peruzzo va planter massivement, en propre et chez des producteurs partenaires. Fin 2022 une dizaine d'hectares de kiwis jaunes, dont 8 ha en propre, et une dizaine d'hectares de kiwis rouges, le seron, un rythme de 20 ha par an semble engagé. La licence pour la production et la mise en marché a été accordée par le groupe Growing, pour ses variétés rouge HFR18 (nom commercial Rossy) et jaune, HFY01. La création d'un Club international est en cours.
De même, Cancel Fruits est engagé dans une dynamique de plantation en propre : 8 ha dans un premier temps à Meauzac (Tarn-et-Garonne) puis 7 ha en 2023 (dont 5 ha en bio) à Labastide-du-Temple (Tarn-et-Garonne). D’autres projets, « ailleurs », sont dans les tuyaux. L’objectif est de 300 ha en plus d’ici 4-5 ans : 200 ha de vert (dont une partie en renouvellement) et 100 ha de jaune (variété Dori) et de rouge. Actuellement, Cancel Fruits totalise une dizaine d’hectares productifs en Dori et l’objectif est d’atteindre 50 ha, soit 1 000 à 1 500 t. L’ambition est la même ambition sur le kiwi rouge.
Forte dynamique d’investissement et d’innovation chez Cancel Fruits, désormais Vergers Cancel
En revanche, le développement du verger français sera limité et freiné par la disponibilité en “bonnes terres”, met en garde Maxime Gil. Le kiwi demande des terres en plaine, de bord de fleuve, alluvionnaires. La proximité d’un fleuve permet une disponibilité en eau dans laquelle pomper lors des épisodes de gelées, les vergers étant protégés par aspersion d’eau (formation d’un glaçon autour du bourgeon qui le protége le temps des températures négatives). Des terres bien drainantes sont aussi nécessaires pour écouler l’eau après ces épisodes.