Le Gaec Holstein Alliance utilise les nouvelles normes d'alimentation de l'Inra
L’application des nouvelles normes Inra aux 150 vaches du Gaec Alliance Holstein a permis de booster les taux en travaillant plus finement sur la ration, et en particulier les acides aminés.
L’application des nouvelles normes Inra aux 150 vaches du Gaec Alliance Holstein a permis de booster les taux en travaillant plus finement sur la ration, et en particulier les acides aminés.
Les nouvelles normes de l’Inra bouleversent le calcul des rations. Le système Systali est une vraie révolution. C’est une révision complète des aliments, des besoins des animaux. « Les besoins d’entretien sont beaucoup plus élevés, jusqu’à 25-30 % d’UF en plus », souligne Philippe Arzul, vétérinaire nutritionniste, chef produits ruminants chez Vitalac. Systali prend aussi en compte toutes les interactions digestives. « Si un maïs entre dans la panse avec une valeur de 0,95 UFL, en sortie les 0,95 UFL ne sont plus là : la valeur énergétique du maïs peut baisser à 0,88 UFL, explique-t-il. Le niveau de cette baisse dépend de trois facteurs : du niveau d’ingestion, de la quantité de concentré dans la ration – plus il y a de concentré plus la valeur baisse –, et de l’équilibre azoté de la ration. » Autrement dit, la valeur d’un aliment change en fonction de l’animal et de la ration. Pour autant, ces travaux ne remettent pas en cause toutes les pratiques. Mais le système est beaucoup plus précis, en particulier pour les vaches hautes productrices ou les rations extrêmes.
Beaucoup plus précis sur les prévisions d’ingestion
Le calcul de ration devient impossible manuellement. Philippe Arzul a mis au point sur Excel un logiciel (Rumivita Systali) intégrant la soixantaine d’équations de l’Inra. Il a fallu à cet expert de la nutrition pas moins d’une année de travail pour réussir à s’approprier les subtilités du nouveau système de l’Inra, et les rendre opérationnelles. Il n’a pas retenu le système d’unités d’encombrement de l’Inra, jugé trop compliqué : « je préfère travailler avec l’ingestion en kilos de matière sèche, plus proche du réel ». En revanche, il a ajouté une prédiction des besoins en eau (tenant compte de la température extérieure et de la quantité d’eau des fourrages). Et deux critères made in USA (la protéine dégradable dans le rumen RDP et l’énergie fermentescible sur la protéine dégradable).
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Il utilise ce logiciel en élevage depuis fin 2018. Premier bilan par rapport à l’ancien logiciel, basé sur les normes Inra 2007 : « il est beaucoup plus précis sur la prévision d’ingestion et sur les besoins des animaux. Il est plus abouti pour les vaches taries et les génisses, et il permet une analyse plus fine du risque acidose. Et surtout, il est extrêmement pertinent pour optimiser l’apport d’acides aminés" , affirme-t-il, en ajoutant : " je suis persuadé que l’avenir, pour la vache laitière haute productrice, c’est de raisonner comme on le fait en porcs, en apport de lysine, méthionine, histidine ».
Un objectif moyen à 38 litres par vache par jour
Le Gaec Alliance Holstein, basé à Plouasne dans les Côtes-d’Armor, est un bon exemple de ce que peut apporter cette précision dans le calcul des rations. Il produit deux millions de litres de lait (livrés à Sodiaal) sur 290 hectares de SAU, avec 150 vaches à la traite avec un niveau d’étable à 12 000 kilos. Il n’y a pas de pâturage sur cet élevage très intensif : « cela permet d’optimiser l’efficacité du système et de la main-d’œuvre », argumente Lorry Beaucé, responsable de l’atelier laitier. Il assure seul avec un salarié la totalité du travail sur les vaches, veaux et génisses.
Les rations sont calculées avec le logiciel Rumivita Systali depuis décembre 2018. « L’optimisation des apports s’est traduit depuis février 2919 par un gain de deux points de TB et d’un point de TP pour une quantité de lait stable. Soit un prix du lait majoré de 12 euros pour 1 000 litres pour un coût de ration légèrement inférieur (3,86 €/VL/j au lieu de 4 €). Et au final une marge brute par vache majorée de 0,47 euro par vache par jour, affirme Philippe Arzul. Sur l’année, avec 150 vaches traites, cela fait 27 000 euros. »
Ces résultats répondent aux objectifs recherchés par Lorry : « avoir 50-55 vaches par robot, 38 à 40 litres de lait par vache et par jour, et le maximum de taux pour booster le prix du lait ». Et " en maintenant le coût alimentaire inférieur à 100 euros pour 1 000 litres (fourrages au coût réel) ", ajoute Philippe Arzul.
Moins de soja et de la lysine+méthionine au robot
Quels ajustements ont-ils été faits dans la ration suite à l’utilisation des nouvelles normes Inra ? La quantité de soja distribué à l’auge a été réduite de 0,5 kg, pour rester à moins de 16 % MAT. Au robot, le concentré de production (2,5 litres) a été plafonné à 4 kg (au lieu de 5 kg), et le tourteau de soja à 1 kg. Et la distribution à l’auge de méthionine protégée a été remplacée par un apport individualisé au robot de méthionine+lysine protégées.
« Sur cet élevage, on peut être très précis. Avec les robots, on dispose de données quotidiennes sur les vaches. Tout est pesé avec la mélangeuse et les vaches reçoivent la même ration toute l’année », souligne Philippe Arzul. Tous les fourrages sont analysés régulièrement (tous les mois après récolte, puis tous les deux mois), et ne sont jamais distribués avec moins de deux mois de fermentation. Les analyses, très complètes, sont prises en charge par Vitalac et réalisées aux USA avec un retour sous 8-10 jours, selon les nouvelles normes Inra. « Attention à ne pas mélanger les anciennes valeurs Inra 2007 avec le nouveau calcul Systali, et inversement. » Tous les laboratoires d’analyses de fourrages devraient se mettre progressivement à produire des « valeurs Systali ».
« On pourrait monter à 41-42 litres en donnant plus d’aliment, estime Lorry, mais cela se ferait au détriment des taux et de la rentabilité puisqu’on est limité en volume A. »
Trois lots de vaches mais une seule ration
Sur cet élevage, les vaches sont conduites en trois lots indépendants, un par robot, avec une ration mélangée identique : un premier lot avec les vaches en 2e et 3e lactation, au milieu un lot de primipares, et un dernier lot avec les vaches en 4e lactation et plus qui ont droit à des logettes creuses rechargées avec de la dolomie. « Côté confort et propreté, il n’y a pas mieux », commente Lorry. La ration est hâchée finement pour éviter le tri et améliorer l’ingestion. « Elle est distribuée matin et soir avec une mélangeuse à double vis verticale de 14 m3 prévue pour 70 vaches et repoussée par un robot. "
« Il faut toujours avancer, être plus précis », commente Lorry. L’arrivée il y a trois ans de Philippe Arzul comme nutritionniste de l’exploitation a permis de progresser beaucoup sur la santé des vaches, tout en continuant à avoir un niveau de production très élevé. « L’élevage avait de la cétose subclinique. Avec les taries, on n’allait pas assez au bout des choses. Aujourd’hui, on rentre dans le détail de la ration. » Les corps cétoniques et le glucose sont contrôlés systématiquement après vêlage. Ainsi que le pH urinaire sur les vaches et génisses en préparation au vêlage pour vérifier le Baca. Les mammites cliniques ont été divisées par deux, à moins de cinq par mois. Le nombre de kystes était aussi anormalement élevé ; iI a été résolu avec des capteurs de mycotoxines dans les minéraux.
Un troupeau en superforme
Les derniers résultats de repro sur 365 jours en disent long sur l’état sanitaire actuel du troupeau : 369 jours d’IVV, 1re IA en moyenne à 69 jours, 65 % de taux de réussite en 1re IA, intervalle vêlage IAF 90 jours. Avec un âge moyen au premier vêlage de 22 mois, et une moyenne cellulaire sur l'année à 111 000.
Depuis l’installation de Lorry en 2011, beaucoup de chemin a été parcouru : suppression du pâturage, passage de 450 000 litres à 2 millions de litres, construction de la stabulation et robotisation, intensification de la production… L’objectif actuel de ce jeune éleveur très rigoureux ? Poursuivre la mise en place de protocoles de travail, déjà bien engagée (avec par exemple un protocole quotidien de maintenance du robot, un jour pour de la semaine pour l'écornage-vaccination des veaux, un autre pour la recharge des logettes creuses...), pour instaurer toujours plus de routine. « Il ne faut pas devoir réfléchir. C’est le meilleur moyen d’éviter les surprises, d’être en avance sur les problèmes. L’important, c’est l’anticipation. "
Les nouveaux critères d'analyses des fourrages
De nouveaux paramètres de contrôle
Le logiciel Rumivita Systali de Vitalac propose trois tableaux de contrôles de la ration reposant sur les nouvelles normes Inra.