Prévenir la cétose pendant le tarissement
Des recherches américaines confirment l’importance de la période de tarissement dans la prévention des cétoses et proposent des stratégies de suivi et d’intervention.
Des recherches américaines confirment l’importance de la période de tarissement dans la prévention des cétoses et proposent des stratégies de suivi et d’intervention.
Lors d’un symposium organisé par la société Philéo (ex-Lesaffre), plusieurs chercheurs d’Amérique du nord ont fait état de leurs travaux sur un moment clé du cycle de production de la vache laitière : la transition tarissement-vêlage. Avec, en corollaire, la prévention des risques de cétose, maladie métabolique due à une mobilisation excessive des réserves corporelles de la vache. « En France, il y a peu de recherches sur ces sujets. Nous souhaitions faire partager ces approches novatrices. Les chercheurs d’Amérique du nord ont l’avantage de pouvoir travailler sur de grands nombres d’animaux », explique Jean-Philippe Marden, directeur de The Farm Philéo (ferme expérimentale).
L’équipe de Daryl Van Nydam de la Cornell university (États-Unis), a mené de nombreux travaux sur les marqueurs de la cétose et les stratégies pour la prévenir. Notamment pendant les dernières semaines (((de la période))) de tarissement. Il a ainsi montré qu’un régime pauvre en potassium et à Baca (Bilan alimentaire cation anion) négatif (- 100 à - 150 meq/kg de MS) pendant les 24 jours précédant le vêlage permettait de limiter les risques de cétose. Il montre aussi que le pH urinaire est un marqueur très sûr pour ajuster la ration de vaches en régime alimentaire anionique. Avec une ration à Baca négatif, le pH urinaire se situe entre 5,5 et 6,5 alors qu’il monte à 7-8 avec des rations à Baca zéro ou positif.
Ne pas suralimenter en énergie avant le vêlage
« Nos recherches ont montré que les vaches suralimentées en énergie pendant le tarissement ont des taux sanguins de BHB (β-hydroxybutyrate) et Agne (Acides gras non estérifiés) [deux marqueurs de l’acétonémie] très élevés dans les jours qui suivent le vêlage », poursuit le chercheur. Les vaches dont le niveau énergétique de la ration est de 50 % supérieur aux besoins ont trois fois plus de cétoses que les vaches alimentées au niveau requis (ration à 16 % d’amidon).
Sachant que « 85 à 95 % des vaches affectées ne montrent pas de signes cliniques caractéristiques » et qu’une cétose coûte de l’ordre de 250 euros, le chercheur américain recommande d’évaluer le taux de vaches en état d’acétonémie dans le troupeau à partir du BHB, marqueur de la cétose après le vêlage le plus facile à analyser. « La méthode d’évaluation la plus fiable est basée sur le taux de BHB dans le sang et peut être réalisée de différentes manières auprès de la vache. » Il déconseille en revanche les mesures de BHB dans l’urine et le lait, estimant qu’elles font apparaître trop de faux négatifs.
Une stratégie pour le propylène glycol
Ses recherches, qui reposent sur l’analyse de dix études représentant plus de 13 000 vaches sur le continent américain et en Europe, ont montré que, d’un point de vue économique, pour évaluer la prévalence des cétoses dans un troupeau, il suffisait de tester 20 à 24 vaches entre 3 et 14 jours de lait. Sur les bases de cette évaluation, son équipe a développé une stratégie économique d’utilisation du propylène glycol.
Si moins de 15 % des vaches testées sont atteintes de cétose (taux de BHB supérieur à 1,2 mmol/l), il suffit de continuer à mesurer la prévalence de la maladie dans le troupeau tous les mois ou lorsqu’il y a un changement de ration.
Si 15 à 45 % des vaches sont touchées, il faut tester toutes les vaches entre 3 et 9 jours de lait deux fois par semaine. Dans ces deux cas de figure, les vaches positives sont traitées avec 300 ml de propylène pendant 5 jours.
Au-delà d’une prévalence de 40 %, il recommande de ne plus tester mais d’administrer 300 ml de propylène, pendant 5 jours, à toutes les vaches en démarrant à 3 jours de lait et d’évaluer de nouveau la prévalence des cétoses au bout d’un mois. Et, bien sûr, de revoir le rationnement pour réduire ce taux de prévalence. « Daryl Van Nydam est un des premiers chercheurs à avoir établi un schéma clair et simplifié d’utilisation du propylène glycol, apprécie Jean-Philippe Marden. D’autres études sont en cours sur les quantités, la durée et la fréquence d’utilisation. »
Réduire provisoirement la production
Les problèmes métaboliques qui surviennent après le vêlage sont provoqués par un déséquilibre entre les besoins énergétiques de la vache pour produire le lait et la capacité de la ration ingérée de les satisfaire. Pour réduire ce déséquilibre, des chercheurs canadiens travaillent sur une voie innovante : diminuer les besoins en freinant la production pendant les premiers jours de lactation. Plusieurs expérimentations ont été menées dans ce sens par le centre de recherches de Sherbrooke (P. Lacasse et al) : une traite par jour pendant une semaine, allaitement et traite pendant 5 jours, traite incomplète (un tiers de la production attendue) pendant 5 jours. Les deux dernières solutions se sont avérées les plus intéressantes : elles réduisent fortement les marqueurs de la cétose et améliorent les fonctions immunitaires sans pour autant affecter la production future. La traite incomplète est en cours de test dans treize fermes commerciales ; les résultats expérimentaux semblent se confirmer.