Avec le pâturage hivernal, les croissances des génisses sont au rendez-vous
Testé l’hiver dernier sur les génisses de la ferme expérimentale de Trévarez, le pâturage hivernal donne des résultats encourageants : la croissance des génisses est conforme aux objectifs et l’économie en fourrages est non négligeable.
Testé l’hiver dernier sur les génisses de la ferme expérimentale de Trévarez, le pâturage hivernal donne des résultats encourageants : la croissance des génisses est conforme aux objectifs et l’économie en fourrages est non négligeable.
Le contexte climatique évolue, induisant une nouvelle répartition de la pousse de l’herbe au cours de l’année. Avec des hivers plus doux, le démarrage de la pousse apparaît de plus en plus précoce et la croissance de l’herbe en hiver ralentit moins fortement. Le pâturage hivernal pourrait alors devenir une pratique plus courante à l’avenir si les freins liés à l’excès d’eau et à la portance des sols s’avèrent moins limitants.
La ferme expérimentale de Trévarez, dans le Finistère, a évalué concrètement cette conduite sur des génisses laitières l’hiver dernier. Les résultats se montrent plutôt prometteurs. Les croissances sont conformes aux objectifs et équivalentes à celles des génisses élevées en bâtiment et nourries avec de l’enrubannage(1). « Il convient toutefois de rester prudent au terme de cette première année d’essai, où les conditions se sont montrées particulièrement favorables avec 30 % de précipitations en moins sur l’hiver que la moyenne sur trente ans », relativise Guylaine Trou, de la chambre d’agriculture de Bretagne.
Douze génisses gestantes prim’Holstein du troupeau conventionnel ont ainsi pâturé trois mois (du 4 novembre au 9 février) des prairies de RGA-TB de plus de 2 ans. Cinq génisses croisées bio ont pâturé deux mois (du 2 décembre au 31 janvier) sur un autre site. Aucun apport de fourrage ni de concentré n’a été réalisé. Les animaux sont restés dehors jour et nuit sur toute la période. « Pour faciliter la gestion quotidienne, nous avons privilégié un chargement peu élevé (2,85 UGB/ha de chargement instantané), plutôt que de limiter le temps de séjour », dépeint Tom Duperret, de la chambre d’agriculture de Bretagne.
Réparties en deux lots, les génisses conventionnelles ont tourné sur des paddocks d’un hectare habituellement pâturés par les vaches laitières. Elles ont dû changer de parc tous les dix jours à cause d’un sol humide et lourd. Sur le site bio, les génisses ont pu rester plus longtemps sur les paddocks (quinze jours) en raison de sols plus filtrants et de leur plus petit gabarit.
Le pâturage a été conduit dans l’objectif d’une sortie à 4 cm, « tout en veillant à changer plus tôt de paddock si le piétinement devenait problématique », précise le conseiller. « Le circuit de pâturage a été défini en commençant par les prairies les plus humides et en finissant par les plus saines en fin d’hiver. » Les génisses ne sont pas revenues sur les parcelles. Un temps de repos végétatif de deux mois a été respecté avant le retour des vaches sur les paddocks au printemps.
Une pousse moyenne de 10 kgMS/ha/j
« Nous avons été surpris par la pousse journalière de 10 kgMS/ha en moyenne (5 kg au plus bas, 20 kg au plus haut). » À noter que la densité est plus élevée quand l’herbe est courte (250 kgMS/cm/ha). Avec une pousse incessante, les valeurs alimentaires observées l’hiver dernier se rapprochent de celles d’une herbe d’automne, avec une MAT supérieure à 20 %.
Autre point important : la repousse printanière n’a pas été pénalisée. Aucune incidence négative non plus sur la qualité des repousses. Au contraire, le pâturage hivernal améliore la valeur nutritive en favorisant une prairie plus feuillue avec un meilleur tallage et un accès à la lumière pour les légumineuses. Enfin, la composition botanique des prairies n’a pas été modifiée. Qu’elles aient été pâturées ou non en hiver, les parcelles présentaient la même part de graminées et de légumineuses au printemps.
Mais qu’en a-t-il été du piétinement ? « Si les parcelles ont été un peu marquées, les trous se sont estompés au fil de l’hiver pour disparaître complètement au printemps, précise Tom Duperret. La proportion de sol nu a augmenté de 10 % après le passage des génisses sur les parcelles mais, au printemps, celle-ci est revenue à son niveau initial. »
Le saviez-vous ?
Avec un pâturage hivernal, les vaches ne mangent que des feuilles car les gaines sont très basses. Les vaches ne peuvent les atteindre, les feuilles s’insèrant au niveau du plateau de tallage.
Côté éco
Pour le lot conventionnel, 12 tMS d’enrubannage ont été économisées (1 tMS/génisse sur trois mois) auxquelles s’ajoutent les économies de paille. La production d’herbe valorisée a approché 0,5 tMS/ha. Le lot conventionnel a valorisé 10,5 tMS, soit 9,1 kgMS/animal/j ; et 2,1 tMS pour le lot bio, soit 7,2 kgMS/animal/j. Côté travail, environ 20 minutes par semaine ont été gagnées pour l’alimentation.
Peu d’effet sur la repousse au printemps
Un essai sur vaches laitières de l’Inrae de Saint-Gilles, en Ille-et-Vilaine, avait montré que le pâturage en hiver crée un décalage de la reprise de végétation au printemps. Ce décalage a été chiffré à une journée par semaine de pâturage après le 1er novembre. Par exemple, une prairie pâturée dix semaines du 1er novembre au 15 janvier démarre sa pousse du printemps dix jours plus tard que la parcelle voisine qui n’a pas été pâturée en hiver. Cet essai avait également conclu que le pâturage en hiver n’impacte pas le rendement annuel de la parcelle sur l’année – dans la limite où elle n’a pas été fortement piétinée.