Que vont devenir les bourses aux grains ?
La fréquentation aux bourses aux grains s’effrite d’année en année. Et la crise sanitaire ne fait qu’accentuer les difficultés des structures organisatrices. Un rapprochement entre ces entités serait-elle une solution au problème ? Oui, mais...
La fréquentation aux bourses aux grains s’effrite d’année en année. Et la crise sanitaire ne fait qu’accentuer les difficultés des structures organisatrices. Un rapprochement entre ces entités serait-elle une solution au problème ? Oui, mais...
Annulation, reprogrammation… Depuis 2020, nombre de bourses aux grains n’ont pas pu se dérouler ou ont dû s’adapter aux exigences sanitaires en vigueur, limitant le nombre de participants. Avec à la clé, des répercussions économiques qui fragilisent les structures organisatrices. A l’exemple de la Bourse aux grains de Sète. Son édition 2022, qui doit se dérouler les 19 et 20 mai, va ainsi être décisive pour l’avenir de cette manifestation.
Une participation qui s’effrite …
Le constat est unanime : la fréquentation des bourses aux grains diminue d’édition en édition. Et ce, pour de multiples raisons : la réduction du nombre d’opérateurs dans nos filières agri-agro, la concurrence d’autres évènements aux mêmes dates, les grèves des transports en commun ou encore les contraintes sanitaires liées à la pandémie de Covid-19.
« La fréquentation moyenne des cinq dernières éditions du Congrès des grains de Lyon est de 220 personnes. Mais la tendance est à la baisse. L’érosion est de l’ordre de 10 % d’une bourse à l’autre », affirme Xavier Bernard, président du Comig, le comité d’organisation.
Cette baisse régulière de participation touche d’autres types de rencontres professionnelles comme le Carrefour international des matières premières qui a lieu pendant le Space à Rennes. « Si nous observons une baisse tendancielle depuis ces vingt dernières années, le taux de fidélisation est important, ce qui est un signe de satisfaction des participants. La demande est forte pour que ce genre d’évènement soit pérenne », tempère Hervé Vasseur, président de Nutrinoë, le syndicat organisateur (cf. encadré).
Des financements de plus en plus difficiles à réunir…
Si certaines structures organisatrices ne souffrent pas de difficultés économiques, d’autres éprouvent les plus grandes difficultés à organiser leur évènement.
Cobesud travaille à l’organisation de l’édition 2022 de la Bourse aux grains de Sète, fixée aux 19 et 20 mai. « Financièrement parlant, la situation est compliquée », reconnaît Mélanie Mezza. Et d’expliquer : « Les prestataires, avec lesquels nous avions négocié la conservation des acomptes déposés dans le cadre de l’édition de 2020 qui a été annulée, ne sont pas tous en ordre de marche. Par ailleurs, nous avons des difficultés à retrouver des sponsors, certains ayant fusionné ou ayant purement et simplement disparu dans la tourmente. Et sans sponsor, pas de prix raisonnables ! A ce jour, rien n’est garanti ».
Même son de cloche du côté d’Agro Paris Bourse. « Heureusement qu’il y a de grands groupes… Sans eux, nous serions morts ! Alors je ne désespère pas de trouver les financements nécessaires à l’organisation de l’édition 2024, qui se déroulera à Paris », indique Baudouin Delforge.
… qui vont obliger les bourses aux grains à se réinventer
Certains présidents d’associations organisatrices de bourses aux grains reconnaissent que ces rencontres professionnelles risquent de péricliter à terme si elles n’évoluent pas. C’est le cas de Mélanie Mezza, qui supervise l’organisation de la Bourse aux grains de Sète : « Je pense que les bourses aux grains devraient changer de modèle pour perdurer ».
D’autres présidents font déjà évoluer leurs pratiques, comme Baudouin Delforge. En janvier, la Bourse du Nouvel An et de l’Exécution aurait pu se tenir avec une centaine de participants, en raison de la crise du Covid-19. Mais le président d’Agro Paris Bourse a préféré la programmer le même jour et au même endroit que la Journée Export, organisée par Intercéréales. « Nous allons dans le bon sens. En 2023, nous ferons en sorte que la Bourse du Nouvel An et la Journée Export se déroulent en même temps, afin d’en faire le point d’orgue du début d’année », s’enthousiasme-t-il.
Dans le même état d’esprit, Baudouin Delforge milite pour un rapprochement entre les structures organisatrices de bourses aux grains pour assurer leur avenir. « Dans un premier temps, nous devrions faire quelque chose avec la Bourse de Rouen, mais je n'ai pas de réponse jusqu'ici », regrette-t-il. « Si, à terme, nous ne pourrons pas y échapper car nous avons de moins en moins d’adhérents, à Rouen, nous avons la volonté de nous différencier », souligne Stéphane Ménard, président de la Bourse de commerce de Rouen. Et d’expliquer : « La Bourse européenne des céréales à Rouen de novembre 2018 était davantage une bourse de l’exécution qu’une bourse de commerce, à l’image de la 53e Bourse de commerce européenne organisée par Agro Paris Bourse en octobre 2013 à Paris ».
Pour Jean-Laurent Herrmann, président de la Bourse de commerce de Strasbourg, « les bourses régionales doivent continuer à exister car il est contraignant pour les professionnels de se déplacer sur de trop longues distances. De plus, l’intérêt des rendez-vous nationaux pour leur activité est limité car cette dernière se déploie souvent localement ». Cependant, le président n’est pas contre « le regroupement des bourses de commerce pour pérenniser une bourse européenne sur le territoire français. A l’exemple, de ces quatre bourses régionales allemandes, qui se sont réunies pour organiser une bourse européenne, qui n’a malheureusement pas eu lieu, en raison de la Covid-19 ».