Nutrition animale
Nutrition animale et environnement : des enjeux de l’amont à l’aval
L’industrie de la nutrition animale diminue son empreinte environnementale dans ses usines, dans ses formulations pour réduire les rejets des animaux, au niveau des transports et de la durabilité de ses approvisionnements.
L’industrie de la nutrition animale diminue son empreinte environnementale dans ses usines, dans ses formulations pour réduire les rejets des animaux, au niveau des transports et de la durabilité de ses approvisionnements.
Industrie lourde puisqu’elle produit 20 Mt d’aliments pour animaux par an et qu’elle utilise environ le même volume de matières premières, la nutrition animale française dispose de plusieurs leviers pour réduire son impact sur l’environnement. Par exemple, selon le BREF Food, Drink and Milk (document technique de la Commission européenne) dont une dernière version est attendue dans les semaines à venir, les émissions de poussières doivent être inférieures à 10 mg/Nm3 au niveau du broyeur. Pour le Syndicat national de l’industrie de la nutrition animale (Snia), cette valeur est bien obtenue grâce aux filtres à manche ou à cyclone installés dans les usines.
Du côté des gaz à effet de serre (GES), la contribution du process n’est que de 1,4 % contre les 7,4 % dus à l’approvisionnement, par fer ou par route et loin derrière les 91,2 % de la production des matières premières au champ.
L’optimisation est de mise dans les transports (lire p. 6). Pour ces derniers, les leviers de la mutualisation et du changement de carburant sont de plus en plus largement actionnés. Mais les syndicats continuent aussi à demander l’augmentation du poids autorisé par véhicule.
16,5 % de baisse des GES en quinze ans
Les impacts les plus massifs du secteur se trouvent hors des usines : au niveau des matières premières et dans les élevages. « En Bretagne, nous sommes à près de 16,5 % de baisse de GES par kilo d’aliments pour animaux en quinze ans », a chiffré Hervé Vasseur, président de Nutrinoë, l’association des Fab bretons, lors de son assemblée générale, le 3 juillet à Brest. Les industriels actionnent pour cela deux leviers en réduisant la production de GES par tonne jusqu’à son arrivée sur l’élevage et l’indice de consommation des animaux, soit la quantité d’aliments nécessaire pour produire 1 kg d’un produit animal (œuf, lait, viande). Au niveau de l’UE, les indices de consommation (IC) des poulets de chair ont quasiment été divisés par deux en un demi-siècle pour atteindre 1,7 kg/kg de production. En porc, l’IC est passé de 3 en 2000 à 2,9 en 2010.
Autre action : le choix des matières premières mises en formulation. Dès 2016, une expertise collective portée par l’Institut national de la recherche agronomique (Inra) sur l’élevage au sein de l’UE montrait qu’environ 42 % des GES relèvent de l’alimentation des animaux. Au niveau européen, la Fédération européenne des fabricants d’aliments composés (Fefac) propose depuis début 2018 une méthodologie harmonisée de l’évaluation de l’empreinte environnementale dans le cadre de l’expérimentation européenne du guide européen PEF (Product Environmental Footprint). L’association européenne soutient la création du Global Feed LCA Institute, institut indépendant chargé de proposer une base de données internationales gratuite. Publiée en décembre 2018, cette base sera bientôt accompagnée d’un outil en ligne pour évaluer les impacts environnementaux de la nutrition animale. Les syndicats français (Afca-Cial, Coop de France Nutrition animale et Snia) devraient aider leurs adhérents à se l’approprier en rédigeant un guide utilisateur.
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La difficile question de la dépendance au soja de l’Europe des Vingt-Sept
La nutrition des animaux de l’UE consomme 85 Mt de protéines brutes, dont 45 % apportés par les fourrages (cf. graphe). Au total, 80 % des besoins en protéines des élevages européens sont donc couverts par des productions des Vingt-Sept (sans le Royaume-Uni). Une sorte de découverte de 2019 car le bilan européen de la consommation de protéines en alimentation animale, publié le 20 mai, inclut pour la première fois les fourrages. La dépendance aux importations s’accroît avec la concentration en protéines : l’UE est autonome à 97 % pour les produits de moins de 15 % de protéines à 75 % pour les “Middle-Pro” (15 à 30 % de protéines), à 29 % pour les “High Pro” (30 à 50 % de protéines), mais les “Super Pro” (plus de 50 %) sont de nouveau principalement européens (92 % d’autonomie). Pour Alexander Doring, secrétaire général de la Fefac, la répartition entre les différentes catégories de produits selon leur contenu en protéine montre que la demande de la nutrition animale est liée aux besoins nutritionnels des différentes espèces et que les approvisionnements ne sont pas tous substituables sur le seul critère du prix. Même si l’autonomie européenne progresse, l’UE importe toujours 17 Mt de protéines brutes chaque année, dont 13 Mt de soja, ce qui représente 30 Mt de tourteau de soja représentant la production de 15 Mha. L’Académie d’agriculture a publié, mi-août, une note intitulée “L’élevage européen peut-il se passer du soja américain ?” qui montre l’impérieuse nécessité d’accompagner le leitmotiv d’une plus grande autonomie protéique, avec des mesures concrètes s dans le cadre de la Pac, dont la revalorisation et le couplage de la prime pour les protéagineux.