Protection des grains
“Le stockage de fortune accroît le risque d’insectes”

La Dépêche-Le Petit Meunier : Quelle est votre stratégie pour la prochaine campagne céréalière ?
Alain Rousseaux : En ce qui concerne les insecticides dits de contact pour traiter les grains stockés après récolte, seules les céréales sont concernées. Les traitements des oléagineux par ce type de produits ne sont pas autorisés par la réglementation et les protéagineux sont très peu traités. En France, l’essentiel du marché concerne les traitements des céréales à pailles par les organismes stockeurs et les silos portuaires et plus accessoirement par leurs industries de transformation (meunerie, malterie et semoulerie). Le traitement des autres céréales (maïs, riz…) est plus régional (Sud-Ouest et Alsace pour le maïs, Sud-Est pour le riz) et moins systématique.
Le début de la prochaine campagne céréalière sera caractérisé par un stock de report en céréales très important auquel s’ajoutera un stockage d’intervention conséquent en orge de mouture et peut-être en blé tendre. Si la moisson de céréales à paille est comparable ou supérieure à celle de 2009, les problèmes de stockage vont se poser d’une manière encore plus aiguë que l’an dernier. Les stockages de fortune vont comme l’an dernier, et probablement de manière accrue, favoriser le développement des insectes. Compte tenu du retrait, il y a deux ans, des autorisations de vente des insecticides contenant du dichlorvos, qui permettaient des traitements curatifs à l’expédition, nous préconisons un traitement préventif à l’entrée des silos avec un insecticide à longue durée d’action pour les céréales destinées à un stockage de plusieurs mois, en particulier pour les stockages d’intervention. La CGI a mis sur le marché en 2009 un nouvel insecticide, le Pirigrain Talisma UL en association de marque avec la société Agriphar, qui compte tenu de ses propriétés qui associent un effet rapide à une longue persistance d’action, a rencontré un accueil que je qualifierai de très prometteur auprès des stockeurs. Nous allons poursuivre le développement de ce produit au cours de la prochaine campagne.
Nous continuerons bien sûr aussi à développer les ventes de nos spécialités Pirigrain à base de pyrimiphos méthyle en particulier dans les silos portuaires, mais aussi chez les OS. Enfin, notre service après-vente devrait comme cette année être très sollicité par les silos pour remplacer ou entretenir les matériels de traitements et effectuer les contrôles de débits réglementaires.
LD-LPM : La tendance au recul des prix de céréales observée cette année a-t-elle un impact sur votre activité ?
AR : Le prix de céréales n’a pas un impact déterminant sur notre activité. La présence d’insectes vivants dans les lots de céréales est proscrite dans la quasi-totalité des contrats de vente que ce soit en France ou à l’exportation et donne lieu dans le meilleur des cas à des réfactions sur les marchandises. Notre activité dépend essentiellement de deux critères : le volume de céréales et la pression insectes dans les stocks de grains. Ces deux paramètres sont réunis cette année et le recul des prix des céréales observé a donc eu un impact très marginal sur nos ventes.
LD-LPM : Ressentez-vous les effets de la progression du stockage à la ferme ?
AR : Le stockage à la ferme dans le cadre de notre marché du traitement insecticide représente 10 à 15 % en valeur. Le volume de céréales stockées à la ferme augmente effectivement ces dernières années. Certaines grandes exploitations sont équipées en matériels de nébulisation similaires à ceux des silos des OS et traitent avec les mêmes produits, mais la grande majorité ne sont pas équipées et traitent essentiellement les locaux vides en pulvérisation. Concernant ce marché du traitement à la ferme, nous travaillons en étroite collaboration avec les coopératives et les négociants. Les agriculteurs sont très souvent en contrat avec leur OS et ont une politique concertée de traitement avec lui. En particulier ils s’accordent pour décider qui traitera la céréale ou en cas de nécessité absolue de traitement quel type d’insecticide sera utilisé afin d’éviter les cumuls de résidus. Pour nous, industriels ou distributeurs, il est donc important d’avoir plusieurs molécules à proposer. C’est une des raisons pour lesquelles après la disparition de plusieurs matières actives au plan européen, nous avons été amenés à mettre sur le marché la cyperméthrine en nébulisation et que nous préparons pour 2011 la mise sur le marché d’un concentré pour pulvérisation qui sera particulièrement bien adapté au traitement à la ferme.