Diester perd 600.000 t de débouché au profit des huiles usagées et animales
L’incorporation préférentielle d’huiles usagées ou animales affecte la demande d’ester végétal et la rentabilité de certains sites
« La station d’estérification du site Diester de Bordeaux ne fonctionnera qu’un mois sur deux » jusqu’aux prochaines négociations de tarif avec les clients pétroliers ou distributeurs, a annoncé le directeur de Diester Industrie, Bernard Nicol, lors d’une journée filière organisée à Angers par Proléa. Cette forte baisse d’activité s’expliquerait par une chute de près de 20 % des ventes d’ester d’huile végétale incorporée dans le diesel à la pompe, conséquente à la sortie d’un arrêté l’an dernier permettant d’incorporer des huiles animales ou usagées dans les biocarburants à des conditions particulièrement intéressantes pour les pétroliers… au détriment de la filière Diester.
La France adopte le double comptage
Selon l’arrêté du 26 avril 2010 portant sur les conditions dans lesquelles sont pris en compte les esters méthyliques d’huile animale ou usagée en minoration de la TGAP liée à la mise à la consommation de carburants : “le déclarant peut, pour l’année considérée, compter pour le double de leur valeur réelle les quantités d’esters méthyliques d’huile animale ou usagée incorporées, converties en équivalent pouvoir calorifique inférieur”. Autrement dit, il est possible pour un pétrolier d’incorporer 1 t d’huiles animales ou usagées dans le carburant comptant pour 2 t d’ester végétal. Le texte étant paru courant 2010, il n’a pas influencé l’activité sur la campagne précédente. Mais au vu des dernières négociations, certains clients de Diester ont su tirer profit de la législation cette année. « En octobre dernier, nos clients ont exigé qu’il y ait au moins 10 à 15 % d’ester comptant double dans les esters que nous vendons. Ainsi les pétroliers remplissent leur obligation avec un moindre tonnage et réalisent une économie importante. Les prix des huiles végétales étant sensiblement équivalents à ceux des huiles animales ou usagées, c’est au niveau de la prime par rapport au gasoil que l’économie est permise », explique Bernard Nicol. « Le plus difficile à comprendre, c’est la raison qui a poussé la France à être le seul pays à transcrire cette mesure issue de la directive ENR au niveau européen. » Et de conclure : « Le pays va devenir le réceptacle des huiles usagées du monde entier. »
Pour l’heure, seule l’usine de Bordeaux serait touchée par cette mesure législative. La perte s’élèverait à au moins 600.000 t (pour un volume total de 2,5 Mt d’ester végétal vendu par Diester Industrie pour la campagne 2009/2010). L’activité d’estérification du site bordelais s’en trouverait amputée de moitié selon Bernard Nicol. Aucune conséquence sur l’emploi n’est envisagée selon la direction.
Pas d’impact sur la contractualisation
Pour autant, ce phénomène ne saurait remettre en question les engagements de livraisons de graines à Diester Industrie. « Il ne s’agit pas d’un cas de force majeure. Il y a un marché de la graine de colza suffisamment demandeur. Si un lot ne trouve pas preneur sur un canal, il en trouvera un autre. Le double comptage ne constitue pas de problème pour la contractualisation », assure Bernard Nicol.