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Marché/Étude
Comment la filière alimentaire se financiarise selon l'ouvrage Déméter 2022 ?

Le Déméter 2022, intitulé "Alimentation : les nouvelles frontières" et publié le 10 février, fait le point sur le rôle de la finance dans l'agriculture et l'agroalimentaire.

Le Déméter 2022 Alimentation : les nouvelles frontières, sous la direction de Sébastien Abis et Matthieu Brun, est disponible.
© Déméter

Le Déméter 2022, intitulé "Alimentation : les nouvelles frontières" et publié le 10 février, dédie un chapitre au rôle des fonds et du monde de la finance dans le secteur agricole et agroalimentaire. L’un des auteurs, Roberto Vitón, fondateur et dirigeant du cabinet Valoral Advisors, spécialisé dans le conseil d’opérateurs financiers, explique que "730 fonds d’investissement se sont spécialisés dans ces activités en 2021, contre moins de 50 en 2005", pour un montant se chiffrant à plus de 120 milliards de dollars (Md$).

Roberto Vitón indique que le monde de la finance a compris le fort potentiel de la filière alimentaire. "Selon la Banque mondiale, l’industrie a une taille d’environ 8 milliards de dollars et représente 10 % des dépenses de consommation mondiales, 40 % de l’emploi et 30 % des gaz à effet de serre", incluant diverses chaînes de valeur, allant de terres agricoles, puis d’usines de transformation, et jusqu’à la chaîne de distribution des aliments, rappelle-t-il.

Mais l’intérêt croissant du monde financier pour l'alimentaire a des raisons plus précises, que Roberto Vitón décrit chronologiquement. La première est l’émergence de la Chine et la flambée de ses importations alimentaires. Vient ensuite la crise financière 2008-2009, période durant laquelle les fonds ont vu les actifs agricoles comme des investissements sûrs. Le début des années 2010 est de son côté marqué par le haut niveau des prix des commodités agricoles, incitant les fonds à investir dans les terres, stimulant leur production, grâce notamment à l’émergence de nouvelles technologies.

La baisse des cours des commodités agricoles à la fin des années 2010 a conduit les financiers à réorienter leurs activités vers une intensification de leur stratégie de prise de parts dans les capitaux de sociétés du secteur alimentaire, attirés par la FoodTech et l’AgTech. "Dans un environnement macroéconomique et géopolitique plus prudent, les flux d’investissement se sont davantage déplacés vers les marchés développés, notamment l’Amérique du Nord. Europe et Océanie – que vers les pays émergents", complète l’expert.

Rachats de terres agricoles et prises de parts dans les sociétés agroalimentaires

Les stratégies d’investissements de ces fonds sont diverses, mais se concentrent sur l’acquisition de terres agricoles et la prise de parts dans le capital d’entreprises, dans respectivement 33 % et 37 % des cas, détaille Roberto Vitón. Les prises de position sur les marchés à terme adossés aux commodités agricoles (blé, maïs, soja entre autres) ne représenteraient que 2 % de leurs activités, précise-t-il.

La politique européenne “Farm to Fork” (F2F) est également évoquée. "La stratégie européenne est considérée comme un vent favorable majeur pour investir dans la réalisation de systèmes de productions alimentaires plus durables et plus efficaces. Cependant, les associations locales de l’industrie agricole sont également préoccupées – entre autres le COCERAL- par les objectifs actuels incluent dans le F2F, qui peuvent entraîner des réductions de la production agricole régionale et accroître la dépendance à l’égard des importations de produits alimentaires".

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