Chercheurs
Comme à chaque passage d’une année à l’autre, les chaînes de télé à l’unisson nous ont gavé à satiété des sempiternels bêtisiers. Ces derniers comportant invariablement les mêmes gags avec une nette prédilection pour les chutes en tous genres, les apparitions incongrues de postérieurs dénudés et les traditionnelles réceptions de tartes à la crème. Objectif déclaré : entre chapon, champagne, chocolats et crise de foie, titiller autant que faire se peut nos zygomatiques. De son côté, la presse écrite ressort ses traditionnels marronniers, histoire de nous faire passer avec des sujets légers la trêve des confiseurs, et de nous détourner, un temps, des rigueurs de l’actualité. La surprise est venue cette année d’outre-Manche. En effet, la très sérieuse et réputée revue British Medical Journal (BMJ), qui s’adresse aux scientifiques et chercheurs de haut niveau, s’est penchée avec toute sa rigueur coutumière sur des sujets plus farfelus les uns que les autres. Ainsi, comment expliquer que partout dans le monde, mais plus particulièrement au Royaume-Uni et dans les pays du Commonwealth, les cuillers à thé qu’elles soient en acier inoxydable ou d’un métal plus luxueux disparaissent-elles des espaces dits de détente ? Une équipe scientifique australienne du Macfarlane Burnet Institute de Melbourne s’est attelée à démêler ce grave problème dans un laboratoire de recherches des plus sophistiqués.
Le thé étant une institution au pays des kangourous et des slips du même nom, les chercheurs ont constaté que sur 70 specimens numérotés et disséminés au sein même de l’institut dans des locaux collectifs (buvettes, tea-rooms) 80 % des petites cuillers à thé, au bout d’une période d’observation de cinq mois, s’étaient purement volatilisées. Conclusion des doctes experts : à la vitesse où les petites cuillers disparaissent, il faudrait en acheter 250 par an pour maintenir simplement une «population» de 70 cuillers à thé dans l’ensemble de l’institut, pris comme un vaste labo-test. Mieux encore, en extrapolant à l’échelle de la ville de Melbourne, ce sont pas moins de 18 millions de petites cuillers à thé qui pourraient disparaître chaque année comme par enchantement ! La kleptomanie est un phénomène universel, d’ailleurs on sait que des restaurants de renom ont souvent une boutique, où les clients peuvent se procurer moyennant finance, la cuiller, la fourchette aux armes de la maison qu’ils ont lorgné tout au long du repas. Ce qui évite subreptice disparition des couverts et, de surcroît, est source supplémentaire de profit ! Autre sujet développé par le BJM : les résultats des travaux d’une équipe multidisciplinaire suisse qui s’est livrée à un essai thérapeutique portant sur un traitement efficace du ronflement. Durant quatre mois, 25 hommes âgés de plus de 18 ans souffrant tous de ronflements et d’apnée du sommeil ont été initié au didjeridoo. Il s’agit d’un encombrant instrument à vent en forme de tube des Aborigènes australiens, qui donnerait de l’espoir à tous ceux et celles (et leurs conjoints) qui sont affligés par cette respiration plus ou moins bruyante et gênante. Une autre étude scientifique rapportée par le BJM concerne les consèquences de la sortie de chaque nouveau tome de Harry Potter sur les urgences pédiatriques. Il y a deux ans, une autre revue médicale prestigieuse, The Lancet, avait déja décrit la migraine de Poudlard (du nom de l’école de Harry Potter), causée aux ados par la lecture intensive des gros pavés à succès de J. K. Rowling. Bref, les austères chercheurs démontrent qu’ils peuvent aussi, à l’occasion, se lâcher comme des petits fous. Une fois l’an au moins.