« Une loi sur les bioplastiques qui tombe à pic » observe Christophe Doukhi-de-Boissoudy
La France va t-elle s'engager à interdire les sacs plastiques à usage unique à partir de 2016 ? Le point avec Christophe Doukhi-de-Boissoudy, président du club Bioplastiques et directeur général de Novamont France
L’Assemblée nationale a voté l’interdiction des sacs plastiques à usage unique à partir de 2016. Est-ce une bonne nouvelle ?
C’est une excellente nouvelle. Le premier texte législatif en France sur le sujet date de 2006, pour une application en 2010 dans le cadre de la Loi d’orientation agricole. Mais ce texte n’a pas pu entrer en vigueur car il était contraire à la directive européenne Packaging. La France a de nouveau légiféré en passant par la voie fiscale, mais aucun décret d’application n’a jamais été publié ! L’Italie, elle, a voté une taxation des sacs plastiques et l’a mise en application dès 2010 sans le notifier à Bruxelles.
Quelle est la position de la Commission européenne ?
La prise de conscience est très récente. En novembre 2013, la Commission a donné la possibilité aux États membres de légiférer sur le sujet grâce à une dérogation de la directive Packaging.
Il existe une opposition très forte de la grande distribution. Pourquoi la France prend-elle position aujourd’hui ?
Ségolène Royal a intégré ce texte dans le projet de loi sur la transition énergétique pour la croissance verte. Elle veut mettre en avant cet engagement de la France lors la 21e conférence des Nations Unies sur les changements climatiques, qui se tiendra début décembre 2015 à Paris.
Êtes-vous bien sûr que, cette fois-ci, des décrets d’application seront publiés ?
La France est leader mondial dans la fabrication de résine de bioplastique avec des sociétés comme Roquette, Sphère, Biolice de Limagrain, Novamont, Vegeplast ou encore BASF. Nous avons une recherche dynamique avec de nombreux brevets déposés. Cette loi va permettre un retour sur investissement. Mais nous avons prévenu la ministre : si rien ne bouge dans les six mois, nous allons nous installer ailleurs dans le monde.
Quel est le potentiel de marché ?
L’article de loi actuel interdit totalement les sacs de caisse non réutilisables, mais c’est trop radical. Il faudrait laisser une souplesse en autorisant les sacs biodégradables pour les magasins de taille inférieure à 2500 m2. Dans ces conditions, le potentiel de marché serait de 60 000 à 70 000 tonnes de résine de bioplastique, ce qui mobiliserait 6000 hectares de terre agricole, soit 0,02 % de la SAU française. Actuellement, le marché en France est dominé par les sacs oxofragmentables qui trompent le consommateur en lui faisant croire qu’il s’agit de sachets biodégradables. Ces sacs sont pires que le plastique classique puisqu’ils engendrent une dispersion de plastique dans la nature et sont impropres au recyclage.