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Pomme de terre : faire obstacle au mildiou sur tubercule

La lutte contre le mildiou du tubercule passe par une protection du feuillage jusqu’à la fin du cycle végétatif et par des précautions pour éviter la propagation des spores dans le sol.

Pourriture sèche, le mildiou est aussi une porte d'entrée pour de la pourriture humide, de type "Erwinia".
Pourriture sèche, le mildiou est aussi une porte d'entrée pour de la pourriture humide, de type "Erwinia".
© Arvalis

Les feuilles, les tiges, les tubercules : le mildiou de la pomme de terre (Phytophthora infestans) s’attaque à tous les organes. « La contamination du tubercule par le mildiou commence toujours par celle du feuillage, explique Cyril Hannon, ingénieur d’Arvalis. Les spores produites au niveau des lésions sur la face inférieure des feuilles tombent sur le sol et peuvent à leur tour contaminer les tubercules. Pour cela, il faut que les spores soient entraînées dans la terre lors de pluies. Il ne peut pas y avoir de transmission du mildiou des feuilles ou des tiges directement vers le tubercule. Elle s’effectue uniquement par contact des spores sur le tubercule. »

Une étude du CNRS a montré que les spores du mildiou sont capables de « nager » grâce à leurs deux flagelles opposés. Et avec une grande efficacité en cas de pluie pour atteindre les tubercules. En cas de contamination, l’épiderme des tubercules se couvre de taches brunes tandis que la chair est infiltrée de zones marbrées de couleur rouille donnant un aspect de pourriture.

Avoir des belles buttes bien refermées sans crevasses

Les deux experts préconisent d’avoir des buttes de terre bien fermées pour éviter la propagation du mildiou du tubercule par les spores. Sans crevasses dans la terre et sans eau, les spores auront peu de chance d’arriver jusqu’au tubercule. « L’alliance buttes crevassées et eau libre, que cette dernière soit pluviale ou d’irrigation, nécessite d’être vigilant. De même, des pommes de terre affleurant le sol seront plus vite contaminées », alerte Christine Haccart, conseillère pommes de terre à la chambre d’agriculture du Nord-Pas-de-Calais.

« Si les buttes ont tendance à s’ouvrir et se crevasser quand il fait sec, il faut veiller à les refermer. L’emploi de pneus tasseurs lors du broyage des fanes est une solution efficace », conseille Cyril Hannon. D’autant plus que le broyage augmente le risque avec la dispersion de millions de spores sur le sol.

Privilégier les fongicides de contact haut de gamme en fin de cycle

Éviter le mildiou du feuillage constitue le levier le plus important pour empêcher la contamination du tubercule. Si le feuillage est sain, il n’y aura pas de spores, donc pas de contamination du tubercule. « En fin de cycle, il faut privilégier les fongicides de contact haut de gamme protégeant le tubercule. A fortiori, si le temps est humide et en cas de forte contamination. Ces fongicides altèrent la mobilité des spores. Ils sont efficaces à la fois sur le mildiou du feuillage et sur celui du tubercule, explique la conseillère. Nous préconisons de les utiliser à leur dose maximale homologuée. Soit 0,5 l/ha pour Ranman Top, le plus utilisé des fongicides et reconnu par son efficacité, ou le produit Leimay. »

Intéressants pour protéger les tubercules, les fongicides à base de fluazinam peuvent de nouveau être utilisés. Cette matière active devenait moins employée à cause des résistances de certaines souches de mildiou. Mais celles-ci sont en forte diminution. Le fluazinam reste néanmoins déconseillé dans les cas de fortes pressions mildiou et lorsque la parcelle est ou a été contaminée durant la campagne. « Nous conseillons des produits où le fluazinam est associé à une autre matière active », précise Christine Haccart. De plus, il faut alterner les substances actives dans le programme fongicide. Autant de bonnes pratiques indispensables pour limiter l’apparition de résistances.

La vigilance reste de mise jusqu’à la fin de la végétation. Tant qu’il reste des parties du végétal vertes, il faut poursuivre la protection contre le mildiou du feuillage. Même après le broyage, il peut rester des tiges contaminées. « Si le mildiou est en général bien maîtrisé, les contaminations observées proviennent souvent d’une protection fongicide arrêtée trop tôt. Paradoxalement, cela arrive plus en cas de faible pression mildiou, qui entraîne une moindre vigilance », constate Cyril Hannon.

Une porte d’entrée pour de la pourriture humide

Par temps sec, le risque de la maladie sur les tubercules est faible. Mais en cas d’orages ou de fortes pluies, il s’aggrave. Le suivi par l’OAD Mileos permet de déclencher ou non les traitements. De même, les prélèvements de pommes de terre en fin de cycle pour examiner la qualité du tubercule (calibre, rendement, matière sèche) sont l’occasion de vérifier si le tubercule n’est pas touché par le mildiou. Couper en deux la pomme de terre permet d’observer la présence de taches de couleur rouille.

« Maladie de fin de cycle, le mildiou du tubercule touche surtout les variétés semi-tardives ou tardives à partir du mois d’août, quand le tubercule est bien formé », indique Christine Haccart. Son incidence peut être très élevée. Si le mildiou est une pourriture sèche, il est aussi une porte d’entrée pour de la pourriture humide (de type Erwinia). Et il n’existe aucun produit utilisable lors du stockage. Il faut refroidir, ventiler, sécher et déstocker rapidement en cas de risque.

Broyage  des fanes de pomme de terre. Défanage mécanique des pommes de terre. Culture à maturié.
Pour éviter que le mildiou du tubercule se développe, il faut veiller à garder des buttes bien fermées et non crevassées en fin d'été. © V. Marmuse

Le levier variétal intéressant mais difficile à actionner

L’utilisation de variétés résistantes au mildiou du tubercule est un autre levier possible. Les notations variétales disposent de notes spécifiques pour le mildiou du feuillage et pour celui du tubercule. Il n’y a pas de corrélation entre les deux critères. Certaines disposent d’une résistance plus importante pour l’un ou l’autre. Les agriculteurs privilégient la résistance au mildiou du feuillage, puis celle au mildiou du tubercule. Mais les variétés résistantes au mildiou du tubercule ne correspondent pas toujours aux critères des acheteurs et des producteurs, constate Christine Haccart. Ainsi la variété Frangine qui obtient une note maximale (9) en mildiou feuillage et du tubercule est moins bien notée en matière de rendement. El mundo, avec les mêmes notes de résistance, est plutôt réservée à l’export. Jelly, avec respectivement une note de 7 et 7 obtient un bon profil général. Satis détient le même score en résistance mildiou. La variété idéale n’existe pas encore. Le phénomène de pénuries de plants accentue la pression sur le choix variétal.

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