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La prestation de services phytos passe par la case agrément

Faire de la prestation de services pour l’épandage de produits phytosanitaires ne s’improvise pas. L’agrément est la clé d’entrée, mais pour l’obtenir il faut s’armer de patience, se plonger dans la paperasse et prévoir un petit budget.

Pour arrondir leurs revenus, certains agriculteurs proposent leurs services pour l’application de produits phytosanitaires. Mais on ne s’improvise pas prestataire sur ce type d’activités du jour au lendemain. Depuis 2012, les prestataires doivent posséder un agrément spécifique. « Il faut compter au minimum six mois à un an pour l’obtenir », annonce Amélina Bidel, conseillère environnement et réglementation à la chambre d’agriculture de la Marne. Délivré par la Draaf (direction régionale de l’alimentation, de l’agriculture et de la forêt), cet agrément ne s’obtient qu’après la réalisation d’une batterie de travaux administratifs. Tout d’abord, le futur prestataire doit s’assurer que le statut de sa société lui permet d’avoir une activité commerciale. Or, c’est rarement le cas des sociétés agricoles telles que les Gaec, les EARL ou même les entreprises individuelles. « Dans ce type de situation, la personne devra créer une nouvelle société. Il est impératif que l’entreprise de prestation soit enregistrée à la chambre de commerce, poursuit la conseillère. C’est l’une des premières vérifications à effectuer. » Le futur prestataire doit également avoir en poche un Certiphyto spécifique pour les prestations de services, appelé Certificat décideur en entreprise soumise à agrément. « Les chefs d’exploitation ont bien souvent le Certiphyto Décideur en exploitation. Pour obtenir celui demandé pour la prestation de phytos, il leur suffit d’effectuer un test ou de suivre un jour de formation, explique Amélina Bidel. Le temps d’une journée, nous formons les futurs prestataires à leurs obligations, aux types d’informations qu’ils doivent fournir à leurs clients et nous effectuons des révisions quant à l’utilisation des produits phytosanitaires. » Toutefois, une dérogation existe pour les entreprises effectuant des traitements phytosanitaires sur des exploitations dont la surface est inférieure ou égale à un cinquième de la surface minimum d’installation. Cette surface varie selon le département, mais pour la plupart, il s’agit de quelques hectares. De même, si les produits appliqués entrent dans la catégorie biocontrôle, l’entreprise n’a pas besoin d’agrément. Néanmoins, dans ces deux cas, le prestataire doit être titulaire du Certiphyto Décideur en exploitation agricole.

Deux audits en dix-huit mois

Une fois le caractère commercial de la société validé et le Certiphyto ad hoc obtenu, le prestataire doit prendre contact avec un organisme certificateur afin qu’il réalise un audit pour obtenir l’agrément. « La liste des organismes certificateurs est nationale, explique la conseillère de la Marne. On y retrouve les auditeurs classiques comme Afnor, Veritas ou encore Certis par exemple. » La liste est disponible sur le site du ministère de l’Agriculture(1). Le coût d’un audit est de 400 euros en moyenne. C’est à l’entrepreneur de choisir l’organisme certificateur qui lui paraît le plus adéquat selon le devis. « Il faut savoir que le processus d’agrément comprend plusieurs audits, signale Amélina Bidel. Le premier sert à la délivrance de la certification. Il est suivi d’un deuxième, intermédiaire, dix-huit mois plus tard. Ensuite un audit a lieu tous les deux ans afin de renouveler l’agrément. » Il est important de bien préparer son audit puisque la non validation de certaines modalités peut entraîner un défaut de certification. L’audit est réalisé selon deux référentiels : l’un porte sur l’organisation générale de l’entreprise et l’autre sur l’application en prestation de services. Au total, on compte quarante-deux exigences requises.

Statuts et Certiphyto en ordre

Au-delà du fait d’avoir un statut d’exploitation compatible avec une activité commerciale ou de la détention du bon Certiphyto, le prestataire doit tenir un cahier répondant à de nombreuses exigences. Un descriptif de l’entreprise doit être rédigé. L’organisation de l’entreprise doit y être décrite à l’aide d’un organigramme, ainsi qu’une liste des infrastructures, des références pour la planification des chantiers, des formations réalisées etc. Concernant le référentiel Application en prestations de services, les exigences portent davantage sur les pratiques d’utilisation des produits phytos. Entre autres, les procédures de réalisation des chantiers doivent être rédigées et transmises aux clients. L’utilisation des équipements de protection individuelle et la manipulation des produits phytosanitaires doivent respecter la réglementation. Le matériel utilisé doit être aux normes et si le stockage des produits est prévu chez le prestataire, ils doivent être conservés dans un local phytosanitaire. « Ce sont pour la plupart des documents écrits à réaliser ou à compléter, ajoute Amélina Bidel. C’est un gros travail administratif à réaliser au préalable de l’audit. » Il faut ensuite compter une demi-journée pour être évalué. Puis une commission de certification est organisée dans le mois suivant la visite. Le prestataire se voit alors décerner un certificat de conformité. Il doit ensuite l’envoyer à la Draff, accompagné d’une attestation d’assurance de responsabilité civile professionnelle et d’un formulaire Cerfa de demande d’agrément. Lorsque le prestataire reçoit son numéro d’agrément, il peut alors commencer son activité de prestation de services pour l’application de produits phytosanitaires. L’entreprise de prestations s’engage à communiquer clairement le numéro d’agrément et à l’indiquer sur le matériel utilisé. Lors de la mise en œuvre des traitements, le prestataire a les mêmes obligations que celles qui s’appliquent chez un agriculteur travaillant sur sa ferme. Seule différence : fournir les informations concernant le traitement effectué au client. « Elles doivent être conservées pour les audits de renouvellement, précise la conseillère de la chambre. Elles doivent donc être écrites. »

Un coût d’environ 1 000 euros

L’obtention de l’agrément a un coût qui peut en freiner certains. Outre l’achat d’un pulvérisateur plus adéquat dans certains cas, les deux audits sont évalués à 800 euros environ et si une nouvelle structure doit être créée, il faut prévoir au minimum 60 euros supplémentaires. La formation Certiphyto est financée par Vivéa mais si l’entrepreneur effectue uniquement le test, il faut ajouter un surplus de 50 euros. Sans compter l’assurance responsabilité civile, l’investissement dans cette nouvelle activité s’élève grosso modo à 1 000 euros. Certaines chambres d’agriculture proposent un pré-audit pour aider à remplir tous les documents demandés lors de l’audit. C’est le cas dans la Marne. Dans ce département, on constate que de plus en plus d’exploitants cherchent à se faire agréer. Une façon de mettre un peu de beurre dans les épinards.

(1) agriculture.gouv.fr/oc-agrement-phyto

Un système d’agrément provisoire

Dans le but d’accélérer les démarches, la région Grand-Est a mis en place un système d’agrément provisoire pour six mois. Avant de réaliser l’audit complet, un audit documentaire portant sur dix exigences prédéterminées doit être réalisé. Un avis favorable de l’organisme certificateur est alors envoyé. Accompagné d’une attestation d’assurance responsabilité civile professionnelle et du formulaire de demande d’agrément, ce dernier est envoyé à la Draaf. Celle-ci délivre, ensuite, un numéro d’agrément valable six mois. Entre-temps, le prestataire doit effectuer l’audit complet afin d’obtenir la certification définitive.

Tolérances fiscales

Si le Code rural distingue bien les activités agricole et commerciale, ce n’est pas le cas sur le plan fiscal. Pour les exploitants déclarants au bénéfice réel, il est possible de rattacher les revenus de l’activité de prestation aux activités agricoles. Toutefois, le bénéfice réel moyen annuel des recettes des trois années civiles précédentes la date d’ouverture de l’exercice doit être inférieur ou égal à 50 000 euros ou ne pas dépasser 30 % des revenus issus de l’activité agricole. Les deux domaines restent indépendants mais cette disposition est tolérée par l’administration fiscale.

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