[édito] La transition agro-écologique en chantier : sortir des injonctions
Nouvelle passe d’armes sur le front des pesticides. La Fondation Nicolas Hulot a dégainé en février un rapport dénonçant la très faible part des financements alloués à l’agriculture qui contribuerait réellement à faire baisser l’usage des phytos. D’où des résultats « catastrophiques » des politiques menées depuis dix ans, selon l’ONG. Une partie du monde agricole a répliqué en contestant les chiffres du rapport, et en soulignant les gros efforts déjà effectués.
Pourra-t-on sortir de ce débat stérile en continuant de brandir la « transition agroécologique » comme un totem ? La transition, c’est le chemin que l’on découvre avoir parcouru lorsque l’on se retourne, une fois arrivé à destination. Encore faut-il avoir défini le point d’arrivée. Le monde agricole n’a pas besoin d’injonctions à la transition, mais d’un vrai chantier.
Un chantier nécessite des plans, sur lesquels les différentes parties prenantes sont tombées d’accord. Il doit rassembler les différents corps de métier nécessaires à son exécution, chacun connaissant sa tâche et sa place dans une action coordonnée. Les moyens à mettre en œuvre sont également connus et maîtrisés, les points d’étapes clairement définis.
On en est loin. Bien sûr, des travaux sont lancés. Les organismes de recherche cherchent. Les fermes du réseau Dephy tentent de le relever, le défi. Certains brandissent des solutions parfois antagonistes. Mais on ne voit toujours pas émerger le pont qui permettra de passer sur l’autre rive. Pour l’heure, chaque agriculteur est sommé, individuellement, de trouver une embarcation pour faire le trajet à ses risques et périls.
Bâtir un pont, c’est compliqué. D’autant plus que le chantier devra être ouvert au public pour asseoir sa légitimité. Les débats entamés autour de la nouvelle PAC seront l’occasion d’en dresser les plans. Encore faudrait-il une volonté partagée de trouver un terrain d’entente. Port du casque obligatoire.