[Gaz à effet de serre] Les émissions de méthane par les vaches sous la loupe des chercheurs
Un consortium de chercheurs travaille depuis 2014 pour comprendre, mesurer et prédire les émissions de méthane. Leurs travaux laissent entrevoir des outils opérationnels de réduction.
Un consortium de chercheurs travaille depuis 2014 pour comprendre, mesurer et prédire les émissions de méthane. Leurs travaux laissent entrevoir des outils opérationnels de réduction.
Les filières d’élevage de ruminants s'emparent de la problématique des émissions de méthane entérique, gaz à fort potentiel de réchauffement climatique. Un consortium de recherche autour des émissions de méthane chez le ruminant s’est créé en 2014 afin de proposer des solutions opérationnelles de réduction des émissions de méthane issues de l’élevage. Il regroupe douze partenaires du public (Inrae, Idele) et du privé (industriels et firmes service de l’alimentation animale, coopératives, génétique…). Les projets de recherche se sont articulés autour de trois axes : élaborer de nouvelles techniques de mesure des émissions à grande échelle, comprendre les mécanismes ruminaux à l’origine de la production de méthane entérique, trouver des indicateurs indirects pour prédire les émissions.
Des outils de terrain pour quantifier les émissions
Les chercheurs savent depuis longtemps mesurer les émissions de méthane des bovins avec des dispositifs expérimentaux mais inutilisables à grande échelle et en ferme. Deux nouveaux outils adaptés aux conditions de terrain ont été évalués par le consortium : le GreenFeed et le Laser Methane Detector (LMD). Le premier est couplé à un nourrisseur et mesure le flux d’air et de méthane sur des animaux libres, en stabulation ou au pâturage. Le LMD est un appareil portable qui détecte la concentration en méthane à distance en pointant un laser sur la gueule de l’animal. Des essais ont permis de comparer la fiabilité de ces méthodes par rapport aux dispositifs expérimentaux de référence et d’en préciser les conditions d’utilisation sur le terrain. Si ces méthodes sont encore perfectibles, elles s’avèrent d’ores et déjà utilisables en conditions réelles d’élevage pour effectuer des recherches sur les émissions de méthane.
Comprendre les mécanismes microbiens de la méthanogenèse
Qu’est-ce qui influence la production de méthane entérique ? Les fermentations du rumen produisent de l’hydrogène dont une grande partie est transformée en méthane. C’est donc en agissant sur la production et sur la consommation d’hydrogène qu’on peut doublement influencer les émissions de méthane. Les chercheurs ont montré que la supplémentation d’une ration de taurillons avec du lin et du nitrate de calcium agit sur les fermentations ruminales liées à l’hydrogène. Les lipides du lin ont un effet toxique à la fois sur certains microorganismes produisant de l’hydrogène et sur d’autres qui le transforment en méthane, et ils stimulent des bactéries qui utilisent de l’hydrogène à d’autres fins.
Une autre expérimentation avait pour but de trouver une méthode alternative aux mesures directes des émissions de méthane en recherchant des marqueurs liés au métabolisme de l’animal. Les chercheurs ont comparé les profils métaboliques (sang, lait et liquide ruminal) de deux lots de vaches conduits avec le même régime alimentaire mais se distinguant par l’ajout d’un additif anti-méthane dans l’un des deux groupes. Des métabolites discriminants appartenant à plusieurs familles chimiques (acides aminés, etc) ont été mis en évidence. D’autres études seront nécessaires avant de pouvoir utiliser à grande échelle ces marqueurs.
Des travaux de recherche sont menés pour prédire les quantités émises de méthane à partir du lait. Les fermentations ruminales impactent en effet à la fois les émissions de méthane et la composition du lait.
Le chiffre
47 %
Les émissions de méthane entérique représentent près de la moitié (47 %) des émissions de gaz à effet de serre du secteur agricole.
Prédire les émissions à partir du lait
Deux voies, qui ont montré leur intérêt au stade expérimental, sont étudiées par le consortium : le spectre moyen infrarouge (MIR) et les acides gras du lait. L’enjeu est d’établir des équations fiables qui fonctionnent à grande échelle, à partir d’indicateurs standardisés et collectés en routine, donc peu coûteux. Les premiers résultats sont prometteurs mais, il reste à consolider et étoffer les bases de données de référence sur lesquelles sont construites les équations. Elles doivent intégrer la grande variabilité des animaux, des conduites alimentaires… À terme, on peut espérer prédire le méthane produit par chaque animal et conduire des études à grande échelle (races, filières…).