Produits d'exception
Truffe : L’Inrae et les Pépinières Robin lancent le diamant blanc Made in France
Le pépiniériste et l’Institut de recherche ont annoncé le 16 février maîtriser le savoir-faire pour une production contrôlée de la truffe blanche. Des premiers vergers truffiers sont entrés en production en Nouvelle-Aquitaine. Les enjeux sont multiples.
Le pépiniériste et l’Institut de recherche ont annoncé le 16 février maîtriser le savoir-faire pour une production contrôlée de la truffe blanche. Des premiers vergers truffiers sont entrés en production en Nouvelle-Aquitaine. Les enjeux sont multiples.
Après 20 ans de recherche en partenariat, l’Inrae et les Pépinières Robin ont annoncé en visio-conférence de presse le 16 février une première mondiale : il est possible de produire en France la célèbre, rare et très chère truffe blanche d’Italie. « C'est la première fois que des Tuber magnatum sont récoltées dans une plantation en dehors de l'ère de répartition géographique de cette truffe », ont souligné Bruno Robin, président des Pépinières Robin et Claude Murat, ingénieur de recherche à Inrae, spécialiste des truffes.
La trufficulture repose sur la technique de la mycorhization contrôlée : une association symbiotique entre un jeune arbre et un champignon truffier. Jusqu’ici, on ne savait pas le faire sur truffe blanche. Une étude publiée le même jour dans la revue scientifique Mycorrhiza précise les résultats de ces travaux.
En France, des truffes noires du Périgord et de Bourgogne, mais pas de truffe blanche
« En France, on produit une trentaine de tonnes de truffe par an : de la truffe de Bourgogne, dont le prix se situe entre 400 et 600 €/kg et la fameuse truffe noire du Périgord, qui vaut entre 500 et 1 000 €/kg. Mais pas la truffe blanche d’Italie, dont le prix est parfois plus du double, entre 1 500 et 5 000 €/kg, la plus prisée au monde », précise Michel Tournayre, président de la Fédération Française des Trufficulteurs.
La zone de production naturelle de la truffe blanche se situe en Italie et en Croatie, et jusque dans les Balkans et la Grèce. Sa récolte se fait de début octobre à fin janvier, avec un cœur de campagne d’octobre à décembre, soit un peu plus tôt que la truffe noire.
Objectif : 2 500 plants commercialisés
Les Pépinières Robin ont débuté la production des premiers plants de chêne pubescent mycorhizés par la truffe blanche dès 2008. « Commercialisés déjà depuis 6 ou 7 ans », chez « deux-trois trufficulteurs en Nouvelle-Aquitaine qui ont le courage de se lancer et dont les conditions pédoclimatiques des vergers avaient été confirmés », les vergers truffiers viennent de commencer à produire. « Nous avons déjà commercialisé 2 000 plants, une centaine cet automne et nous prévoyons un total de 2 500 cette année. Et nous avons la capacité de doubler chaque année », précise Bruno Robin.
Des contrôles ADN avant la commercialisation des plants
Vendus 80-90 € le plant, ces prix élevés (contre une dizaine d’euros pour le plant de truffe noire) se justifie amplement par la vingtaine d’années d’investissements de recherche et par le coût du contrôle : avant d’être commercialisé, chaque plant est individuellement et doublement contrôlé, d’une part dans le laboratoire des Pépinières Robin qui vérifie la bonne inoculation du mycorhize, puis par l’Inrae qui vérifie les données biochimiques et ADN. Ce savoir-faire de production de plants inoculés à la truffe blanche est un secret jalousement gardé, sous contrat licence exclusive et financement partagé Pépinières Robin/Inrae.
Sauver la filière française de la concurrence internationale et attirer l’intérêt des restaurateurs
Ces travaux ouvrent des perspectives tant scientifiques (meilleure connaissance de la truffe, meilleure connaissance des symbioses…), biologiques (sauvegarder la truffe menacée par le changement climatique) que socio-économiques. « La truffe est une culture agroécologique par son absence de recours aux phytos, par son irrigation maîtriser, par le maintien des paysages, mais elle représente aussi en France 15 000 trufficulteurs et un potentiel de 50 000 emplois, sans compter toutes les retombées économiques », souligne Philippe Mauguin, président-directeur général d’Inrae.
« La concurrence internationale sur la truffe est de plus en plus importante, notamment de l’Espagne. Il est donc vital de professionnaliser et de structurer la filière française, et de développer d’autres variétés en France comme la truffe blanche, ce qui sera possible avec cette innovation. Le marché de la gastronomie et des particuliers, on l’a bien vu cette année avec la crise, montre un intérêt très fort aux terroirs, à la proximité. Si on parvient à produire cette truffe blanche en Nouvelle-Aquitaine, voire en France, je pense que beaucoup de restaurateurs qui ne la travaillaient pas vont se lancer », conclut Michel Tournayre.
Et comme le rappelle Joël Giraud, secrétaire d’Etat à la Ruralité : « Une innovation du plaisir, c’est important dans ce contexte morose ».