Finistère : Thierry et Jean-Marc Roué récupèrent l’eau de pluie pour irriguer leurs cultures sous serre
Producteurs de tomate dans le Finistère, Thierry et Jean-Marc Roué ont créé une réserve de 9 000 m3 pour récupérer l’eau de pluie et ainsi limiter leurs prélèvements dans le milieu.
Producteurs de tomate dans le Finistère, Thierry et Jean-Marc Roué ont créé une réserve de 9 000 m3 pour récupérer l’eau de pluie et ainsi limiter leurs prélèvements dans le milieu.
Mi 2020, Thierry et Jean-Marc Roué, qui exploitent 4,5 ha de serres verre de tomate à Cléder, au nord du Finistère, ont mis en place une réserve d’eau de 9 000 m³ pour récupérer l’eau de pluie tombant sur leurs serres. « Jusqu’à présent, nos cultures de tomate grappe, tomate cocktail et variétés anciennes étaient irriguées à partir de l’eau de deux forages mélangée au drainage des solutions nutritives, expliquent-ils. Même si cette eau ne présente pas trop de salinité, ce qui est parfois le cas dans la région, nous avons souhaité créer une réserve pour récupérer l’eau de pluie, qui auparavant était dirigée vers un bassin de rétention avant de rejoindre la rivière, et ainsi limiter nos prélèvements dans le milieu naturel. L’eau de pluie présente aussi l’intérêt d’être plus neutre que l’eau de forage, ce qui facilite son utilisation en fertirrigation. »
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La réserve de 1 500 m2 sur 6 m de profondeur, soit 9 000 m3, a été créée près des serres, sur l’emplacement de l’ancien bassin de rétention dont la profondeur était de 2,50 m. Les travaux ont duré un mois. La bâche anti-UV garantie 20 ans a été soudée sur place. Comme le prévoit la réglementation, la réserve a fait l’objet d’une déclaration et est entourée d’un grillage. Des échelles à rongeurs y ont également été installées.
Utiliser 75 % d’eau de pluie
« Au total sur l’année, nous avons besoin de 30 000 m3 d’eau, indiquent les producteurs. Comme nous étions limités en surface et aussi en profondeur, nous n’avons pu créer qu’une réserve de 9 000 m3. La pluviométrie est en moyenne de 900 mm par an, avec en général des pluies assez régulières. Cet hiver, la réserve s’est remplie en un mois grâce aux précipitations importantes du mois de novembre. En moyenne, nous espérons pouvoir utiliser 75 % d’eau de pluie mélangée à de l’eau de forage et au drainage des solutions nutritives à hauteur de 30 % et ainsi réduire nos prélèvements d’eau de forage de 20 000 m3 par an. » L’eau de pluie est d’abord filtrée dans un filtre à maërl (sable calcaire) pour tamponner l’eau en bicarbonate et assurer la stabilité du pH.
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L’eau de pluie et l’eau de forage passent ensuite séparément dans des filtres à charbon pour éliminer d’éventuelles molécules chimiques liées notamment aux herbicides. Le drainage des solutions nutritives est quant à lui désinfecté par un traitement UV Hortimax, qui fonctionne 8 heures par jour et qui détruit virus, bactéries et champignons. « Jusqu’à il y a deux ans, le drainage était désinfecté au peroxyde d’hydrogène. La désinfection UV est plus efficace. » L’eau de pluie, le drainage et éventuellement de l’eau de forage sont ensuite mélangés avec les engrais pour assurer la fertirrigation. « La principale difficulté est d’assurer la stabilité du pH », notent Thierry et Jean-Marc Roué. Au total, 100 000 € ont été investis dans la réserve, un système de pompage, un filtre à maërl et un filtre à charbon.
De l’eau vierge de minéraux
En Bretagne, de plus en plus de serristes investissent dans une réserve permettant de récupérer l’eau de pluie. « Environ 30 % des exploitations de la Sica pour plus de 50 % des surfaces disposent aujourd’hui d’une réserve, évalue Baptiste Deconinck, technicien à la Sica Saint-Pol de Léon. Outre le souhait d’être autonome en eau et de limiter les prélèvements dans le milieu, beaucoup s’équipent d’une réserve par rapport à la qualité de l’eau. Dans la région, notamment en bord de mer, l’eau est fréquemment chargée en chlorure de sodium, parfois en fer ou en zinc. Lors du recyclage des solutions nutritives, ces éléments, qui ne sont pas absorbés par les plantes, s’accumulent, perturbent l’équilibre de la solution nutritive et gênent l’absorption d’autres éléments. L’eau de pluie, vierge de ces minéraux, facilite donc le recyclage. »
La taille de la réserve, en général liée au foncier disponible, permet en moyenne d’utiliser 75 % d’eau de pluie sur l’année, le complément étant apporté par de l’eau de forage. « L’objectif étant d’avoir une composition de l’eau la plus stable possible, les producteurs doivent anticiper un manque d’eau de pluie en été, précise le technicien. Pour cela, ils rajoutent à l’avance un certain pourcentage d’eau de forage dans leur eau d’apport pour préserver un niveau suffisant d’eau dans la réserve d’eau de pluie durant toute la saison. » Un filtre à maërl ou l’ajout de carbonate de calcium sont également conseillés pour tamponner l’eau et limiter les variations de pH.
Des aides du département pour favoriser le recyclage
Dans le cadre d’un programme visant à favoriser la mise en place du recyclage des solutions nutritives des serres, le Conseil départemental du Finistère apporte une aide pour la récupération des eaux de pluie si celle-ci est nécessaire à la mise en place du recyclage des solutions nutritives. Les investissements éligibles portent sur le terrassement, la construction du bassin de récupération et les pompes. La dépense subventionnable maximale est de 50 000 € HT. Le taux de subvention est de 20 % (25 % pour les JA), avec une subvention maximale de 10 000 €. Le Gaec Roué ayant commencé ses travaux avant l’annonce du programme n’a toutefois pas pu en bénéficier.