Quel modèle économique pour l'aquaponie ?
Système très vertueux, l’aquaponie suscite beaucoup d’intérêt auprès des porteurs de projet. Le modèle économique en France reste toutefois à trouver.
Système très vertueux, l’aquaponie suscite beaucoup d’intérêt auprès des porteurs de projet. Le modèle économique en France reste toutefois à trouver.
L’aquaponie consiste à associer la production de végétaux à l’élevage de poissons. Les végétaux, cultivés en hydroponie, sont alimentés en nutriments, via des bactéries nitrifiantes, grâce aux déjections des poissons. Et, en absorbant ces nutriments, les végétaux purifient l’eau qui peut retourner dans le compartiment des poissons. La production alimentaire est optimisée, avec peu d’intrants, d’eau et de déchets. Déjà pratiquée par les Aztèques, l’aquaponie a été développée sous sa forme commerciale aux États-Unis, dans les années 1980, en associant l’élevage de poissons et la production de laitue, plante facile à cultiver en hydroponie.
De nombreuses structures fonctionnent aujourd’hui sur ce modèle, notamment dans des zones (Colorado, Texas…) où la production de salades en sol est difficile, avec une forte productivité et une bonne valorisation des salades. En France, l’aquaponie a commencé à se développer il y a une dizaine d’années, notamment en Pays de la Loire. « Trente fermes sont aujourd’hui en activité en France, quinze vont sortir de terre d’ici deux ans et d’autres projets sont à l’étude », indique Guillaume Beucher, cofondateur d’Aquaponia (Mayenne), seule école en France à délivrer des diplômes de BTS et d’opérateur technique en aquaponie.
Avoir une double rentabilité
La plupart des fermes sont de petites structures élevant en majorité de la truite arc-en-ciel ou du sandre associé à la production de légumes (salades…), herbes aromatiques et fleurs comestibles, pour un marché local. Quelques structures plus importantes existent également (Nouvelles Fermes, Ferme Intégrale, Nutreets…), avec des ambitions de développement au niveau national. « La réussite passe par de la formation et par une bonne valorisation des produits, souligne Guillaume Beucher. L’aquaponie nécessite des compétences en aquaculture, production de végétaux, hydrologie, bactéries et comme chef d’entreprise. Et une bonne rentabilité à la fois sur les poissons et sur les végétaux est nécessaire. »
Le modèle économique reste toutefois à trouver. « Alors que les investissements sont très importants, les producteurs doivent souvent s’aligner sur les prix des légumes de plein champ, constate Guillaume Beucher. Et les seules aides pour l’instant sont celles de la filière aquacole. » Plusieurs projets se sont ainsi arrêtés. Et d’autres, qui s’étaient axés sur la production de légumes, se sont réorientés vers des secteurs à plus forte valeur ajoutée (herbes aromatiques, fleurs comestibles…). « L’aquaponie a de nombreux intérêts, mais il n’est pas si évident de maîtriser les deux productions, constate Sylvie Guillo, de la chambre d’agriculture des Pays de la Loire. Le système peut aussi être très chronophage. Et la rentabilité nécessite de vendre sur des secteurs à forte valeur ajoutée. » « Il faudrait que l’aquaponie soit aidée pour l’intérêt qu’elle présente par rapport au dérèglement climatique », estime Guillaume Beucher.
Les Nouvelles fermes, de l'aquaponie en milieu urbain
Lancée sur un espace expérimental à Lormont près de Bordeaux, la société Les Nouvelles fermes est installée à Mérignac sur 5 000 m2 dans un espace urbain afin de privilégier les circuits courts et de bénéficier de la vente directe de ses produits. Créés par cinq associés, Les Nouvelles fermes produisent des légumes, gamme de salades, plantes aromatiques, tomate et concombre en aquaponie associés à un élevage de truites. Les plantes sont cultivées en floating et alimentées en eau et éléments minéraux par un système en boucle à partir des différents bacs à poisson : des truites arc-en-ciel élevées jusqu’à 2,5 kg. Celles-ci sont vendues en filet ou transformées en assortiment avec des légumes de la ferme. Les Nouvelles fermes envisagent une troisième unité de production en région parisienne à partir d’une levée de fonds en cours.