Banane : pouvoir d’achat vs souveraineté alimentaire, où en est la consommation ?
Fruit essentiel dans la consommation des ménages, de par son accessibilité prix et sa disponibilité toute l’année, riche nutritionnellement, la banane qui vient de loin bénéficie-t-elle ou pâtit-elle du contexte actuel ? Le point sur la consommation de ce fruit, le deuxième préféré des Français.
Fruit essentiel dans la consommation des ménages, de par son accessibilité prix et sa disponibilité toute l’année, riche nutritionnellement, la banane qui vient de loin bénéficie-t-elle ou pâtit-elle du contexte actuel ? Le point sur la consommation de ce fruit, le deuxième préféré des Français.
A l’occasion d’une visite chez les mûrisseurs de Rungis, l’Association interprofessionnelle de la banane a rappelé les enjeux de la consommation de bananes. 80 Mt de bananes Cavendish sont produites dans le monde dont 20 Mt sont exportées. L’UE est la première destination avec 6 Mt, suivies par les Etats-Unis et l’Extrême-Orient.
Un marché français dynamique mais encore sous-consommateur
La France consomme 700 000 t de bananes. C’est une progression de 8,5 % entre 2016 et 2021 ! « Pour la première fois en 2021, le marché français a franchi la barre des 700 000 t, souligne Philippe Pons, président de l’AIB. C’est un marché dynamique, même si on reste sous-consommateurs de bananes comparés à nos voisins européens comme l’Allemagne ou le Benelux ou le Royaume-Uni. On consomme 1,5 à 2 kg de moins que le reste de l’Europe. »
En France, la consommation de banane a progressé en cinq ans, à la fois en volume et en fréquentation. De 7 à 8 kg par personne et par habitant en 2016, la consommation de la banane a atteint 10,8 kg/personne/an en 2021 [12,9 kg/personne/an pour la moyenne européenne].
Toujours selon Kantar, 90 % des ménages français achètent de la banane. C’est le deuxième fruit le plus consommé après la pomme et elle représente 17 % des volumes de fruits vendus. C’est aussi 17 actes d’achat par an en moyenne par foyer.
La banane s’en sort mieux que les autres fruits et légumes
Depuis le début de l’année 2022, la filière banane note un tassement dans la dynamique de consommation. C’est tout de même mieux que les autres fruits et légumes qui accusent eux une vraie baisse. Ainsi, la consommation de la banane a baissé de -2,4 % entre 2021 et 2022 (volumes achetés, panel Kantar, donc hors RHD) et est restée stable par rapport à la moyenne 2019-2021. Alors que la consommation du Total fruits et légumes a baissé de -6 % sur un an et de -4,6 % par rapport à la moyenne triennale.
Un fait qui peut être expliqué par l’accessibilité prix de la banane. Le prix moyen de la banane en rayon est resté stable en 2022 par rapport à 2021 : 1,71 €/kg (1,68 €/kg en 2019, 1,74 €/kg en 2020), selon les données Kantar. « Ce niveau stable et accessible explique la stabilité de consommation de la banane, analyse Alain Alarcon, président de Banagrumes, et représentant UNCGFL à l’AIB. Pour nous grossistes, la banane est un fruit de base, un fruit fidélisant. Et de même pour nos clients distributeurs. »
Le fruit des plus modestes
« La banane est un fruit dont l’accessibilité, à la fois en prix et en disponibilité (12 mois sur 12), n’a jamais été démentie », confirme Philippe Pons.
Les études des profils des consommateurs appuient cette observation : la banane est particulièrement achetée par les foyers modestes et les classes moyennes inférieures, qui représentent 53 % de parts de marché alors qu’ils ne représentent que 50 % de PDM dans la catégorie fruits et légumes.
La banane, c’est aussi le fruit des familles : 33 % (contre 26 % pour le total fruits et légumes !). Les jeunes sont légèrement plus consommateurs de bananes (7 % de PDM contre 6 % pour le total fruits et légumes).
Le bio victime du pouvoir d’achat
Mais question de pouvoir d’achat, la banane est aussi impactée, comme les autres fruits et légumes. Ainsi, un tassement des volumes en bio a été observé. La banane reste néanmoins le fruit bio avec la part de marché la plus importante, en valeur : 21 % en 2021 (22 % sur la moyenne 2019-2021) comme en volume : 15,5 % en 2021 (16,6 % en moyenne triennale). « La part de marché de la banane bio représente environ 20 % en grande distribution. Si on comptabilise aussi la RHF et les détaillants, cette part tombe à 15 % », précise Philippe Pons. Le prix moyen de la banane bio n’a fait que progresser alors que celui de la conventionnelle a baissé après une montée jusqu’en 2020.
La Banane Française, commercialisée par l’UGPBAN Fruidor, a gardé ses parts de marché sur le premier semestre 2022 mais la situation est plus compliquée depuis la rentrée, selon le directeur général Pierre Monteux que FLD avait rencontré quelques jours avant à Fruit Attraction.
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Vers un manque de disponibilité de fruits, surtout en 1er prix
Le 1er prix lui, devrait surfer sur la vague des inquiétudes du pouvoir d’achat. Sauf que l’offre vient à manquer. « On observe effectivement une forte demande des clients sur les 1er prix mais les volumes ne sont pas suffisants pour y répondre », précise Eric Fontaine, responsable de la mûrisserie Fruidor Rungis.
Eric Hellot, président Del Monte France et représentant CSIF analyse : « L’offre 1er prix va certainement se contracter par manque de disponibilité de volumes, surtout en petits fruits qui constituent l’essentiel de l’offre 1er prix. »
L’approvisionnement mondial était en forte progression jusqu’en 2018 (sous l’effet de marchés de consommation dynamique) et a vu un regain en 2020. Mais les aléas climatiques en 2021 et en 2022 ont impacté négativement la production mondiale. A ceci il faut ajouter la hausse des coûts des intrants et logistiques qui ont impacté 2022 et continueront au moins en 2023, notamment pour l’origine Amérique du Sud. 80 % du prix d’un engrais azoté est lié au prix du gaz… Et entre 2021 et 2022, le coût du fret a pris au moins +25 % (taxe BAF, ajustement des tarifs des entreprises maritimes), sans parler de la disponibilité des conteneurs.
« Outre la météo qui cause des dégâts en production, le contexte international n’est pas favorable : fuel, fertilisants, cartons de conditionnement… , ajoute Eric Hellot. Des producteurs prennent la décision de ne pas planter de bananes et se tournent vers d’autres cultures comme l’igname. Nous allons vers un marché qui manquera sûrement de volumes. »