Normandie : La carotte fait de la résistance
Les producteurs de carotte de la Créances communiquent, sans baisser les bras, pour maintenir leur production dans le bassin légumier.
Les producteurs de carotte de la Créances communiquent, sans baisser les bras, pour maintenir leur production dans le bassin légumier.
Avec la fin de la dérogation de l’utilisation du dichloropropène en cas d’urgence phytosanitaire pour lutter contre le nématode de la carotte, les chiffres parlent et sont cruels. « 50 % de surfaces de carotte en moins dans notre bassin de production », ont martelé de concert Philippe Jean, GPLM (Groupement des producteurs de légumes de la Manche), et Jean-Luc Leblond, président de la section légumes de la FDSEA 50, en août dernier, lors de la fête du terroir à Créances. La légitimité de leur combat, c’est tout d’abord une distorsion européenne de concurrence incompréhensible. Alors que Stéphane Travert était encore ministre de l’Agriculture, la France a interdit l’utilisation dérogatoire du fumigant mais pas l’Espagne, ni l’Italie, ni le Portugal, ni Chypre.
Faire baisser le niveau de nématodes
Le risque ? « Que la carotte de Créances ne devienne plus qu’un marché de niche pour bobos parisiens faute de volume », s’inquiète Philippe Jean. Et à ceux qui prétendent que rien n’a été fait pour sortir du « chimique », le par ailleurs vice-président de la station d’expérimentation du Sileban met en avant « 20 ans de recherche financée par les producteurs ». Dans l’immédiat, l’heure est aux analyses de sol pour mesurer le niveau d’infestation en nématodes. 1 600 sont programmées ou ont déjà été réalisées pour un montant de 430 000 euros. C’est sur cette base que la décision d’emblaver ou pas est actée. « On se donne cinq ans pour faire baisser le niveau de nématodes », pronostiquent les responsables professionnels. La méthode alternative privilégiée : une rotation poireau, navet puis deux années de cultures avant de ressemer en carotte. En attendant, l’Etat avait promis des aides pour passer ce cap d’assainissement. « On n’a toujours pas vu les aides du gouvernement et aucun écrit du ministère de l’Agriculture sur les aides promises », s’inquiètent Jean-Luc Leblond et Philippe Jean. Les consommateurs et consom’acteurs étaient présents, offrant une oreille attentive aux difficultés actuelles. Certains sont même repartis frustrés. Ils voulaient acheter des carottes de Créances mais il n’y avait rien à vendre sur le stand des « Jardins de Normandie ». Après tout, il faut peut-être commencer à apprendre à s’en passer. C’est le message qu’ont voulu faire passer les producteurs.
Thierry Guillemot