Maine-et-Loire : ils produisent de l'asperge bio sur 80 hectares
Producteur d’asperges depuis 1998, Frédéric Poupard a fait le choix du bio en 2008, par conviction et pour le challenge technique que cela représente.
Producteur d’asperges depuis 1998, Frédéric Poupard a fait le choix du bio en 2008, par conviction et pour le challenge technique que cela représente.
Ingénieurs agricoles de formation, Frédéric et Laura Poupard se sont installés en 1998 à Longué-Jumelles (Maine-et-Loire) sur une exploitation de polyculture-élevage. « L’exploitation comptait déjà de l’asperge blanche, précise Frédéric. Peu à peu, nous nous sommes spécialisés sur cette production, parce qu’il y avait des débouchés et par intérêt pour l’asperge que mon père et mon grand-père cultivaient déjà. » En 2003, les producteurs introduisent l’asperge verte, qui représente aujourd’hui 40 % des volumes. Puis, en 2008, ils passent à l’agriculture biologique, « par sensibilité, parce que j’en avais marre de traiter et pour le challenge technique que cela représente », indique Frédéric. Aujourd’hui, l’Earl Langevine exploite 75-80 ha d’asperges blanches et vertes en bio, dont 15 ha sous tunnels, 40 ha de cultures de diversification (fraise, tomate, patate douce, endive…), 70 ha de céréales, qui améliorent la structure du sol, et 70-80 ha d’herbe exploités de façon extensive par des bovins pour le fumier qu’ils fournissent. En plus de Frédéric et Laura Poupard, quatre salariés permanents et une trentaine de saisonniers en équivalent temps plein y travaillent.
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L’exploitation étant proche de la Loire, les terres se partagent entre des sols sableux, réservés à l’asperge blanche, et des sols plus argileux où est cultivée l’asperge verte. Plusieurs variétés sont utilisées pour étaler la récolte du 1er mars au 25 juin. « Il n’y a pas de griffes bio, précise le producteur. Nous utilisons des griffes non traitées. » En asperge blanche, l’itinéraire technique est assez proche du conventionnel. La fertilisation est assurée par l’apport chaque hiver de 10 t/ha de matière organique (compost de fientes de volailles et déchets verts, fumier des bovins). Le buttage et la pose du plastique sont réalisés dès janvier-février pour limiter les pontes de mouches sur les buttes, avec des inter-rangs de 3 m pour faciliter l’aération de la culture et ainsi limiter les risques de maladie. L’été, l’entretien est assuré par désherbage mécanique, avec un rattrapage manuel et une irrigation au goutte-à-goutte pour limiter l’enherbement. Le broyage est fait en novembre. Au total, 5 à 6 passages mécaniques sont réalisés chaque année (vibroculteur, outil à disque, débutteuse inversée…). En asperge verte, des interventions supplémentaires sont également nécessaires pendant la récolte, avec en général trois passages entre rangs d’un désherbeur thermique. Et du paillage biodégradable de 12 µm est installé sur les planches en fin de récolte. « L’asperge perce le paillage mais pas la plupart des adventices. Le liseron, le chardon arrivent toutefois à le traverser, mais pas le chénopode, ni le datura… Et comme la terre est souvent brassée, il y a très peu de graminées. » Le paillage se dégrade en trois à quatre mois. Une à trois applications de Bacillus thuringiensis sont aussi réalisées pour lutter contre les larves de criocère, avec en général une bonne réussite. Le rendement atteint 5 à 7 t/ha en asperge blanche et 4 à 5 t/ha en asperge verte. « En asperge verte, il y a 1-1,5 t/ha de perte ou d’asperges impactées par la chaleur qui passent en catégorie 2 à cause du désherbage thermique, précise Frédéric Poupard. Il y a eu aussi beaucoup d’excès d’eau depuis 2 à 3 ans. Par ailleurs, les plantations sont conservées 13 à 17 ans, ce qui peut expliquer la baisse des rendements depuis quelques années. Bien qu’il y ait une tradition d’échange de terres liée à la culture du maïs semences, les terres sont assez difficiles à trouver dans le coin. Et malgré ce que me dit mon conseiller, je préfère garder les aspergeraies plus longtemps que de cultiver asperge sur asperge. »
Demande en hausse
Environ 400 tonnes d’asperges bio sont récoltées chaque année. L’essentiel est commercialisé en frais sous les marques Langevine, Domaine d’Avoir ou sous des marques de partenaires. 50 % sont vendues dans les réseaux bio spécialisés, 45 % auprès de grossistes et 5 % en vente directe, sur le MIN de Nantes, dans des magasins locaux et sur 5 à 6 marchés par semaine. Les asperges sont valorisées en moyenne à 5-6 €/kg en asperge blanche et 6-7 €/kg en asperge verte. « La consommation d’asperge est globalement en hausse, constate le producteur. En bio, la demande augmente surtout depuis 2 à 3 ans, notamment en asperge verte, mais le nombre d’opérateurs également. Il y a aussi la concurrence de l’Italie, très présente en asperge verte bio et qui bénéficie de coûts de main-d’œuvre inférieurs et d’un climat plus chaud, un point important en asperge verte. »
Conserverie et diversification des cultures
Depuis cinq ans, l’Earl Langevine a entrepris une diversification de ses activités. De nouvelles cultures ont été mises en place, qui occupent aujourd’hui 40 ha de plein champ et tunnels : de la fraise d’abord, puis de la tomate, de la patate douce, de l’endive, un peu d’ail, d’oignons, de salades. « L’objectif est d’abord de fidéliser les saisonniers que nous avons pas mal de difficultés à recruter, précise Frédéric Poupard. Il est aussi de répondre à la demande de nos clients et d’avoir une continuité commerciale. Cela nous permet ainsi de faire deux marchés par semaine toute l’année. » En 2013, l’Earl a également investi 150 000 € dans une conserverie. « L’idée est de valoriser les asperges de catégorie 2 ou trop fines, explique le producteur. Auparavant, nous faisions appel à un prestataire. Mais avec l’augmentation des volumes, cela devenait difficile pour lui. Nous avons donc décidé d’investir. Cela permet aussi d’occuper 3 à 4 personnes un jour par semaine. » 10 à 15 tonnes d’asperges sont ainsi transformées chaque année, principalement en asperge blanche, les asperges vertes fines étant plus facilement valorisées sur le marché du frais. Deux types de bocaux verre de 37 cl sont réalisés : un format haut pour les catégories 2 épluchées et un format bas plus large pour les asperges fines non épluchées. Les conserves sont commercialisées dans des magasins bio spécialisés principalement, l’objectif étant d’en vendre également dans d’autres magasins. « Le prix est une limite, admet Frédéric Poupard. En magasin, un bocal se retrouve à 5-5,50 €, alors que le même en provenance de Chine ou du Pérou est à 2-2,50 €. Le schéma commercial est également différent de celui du frais et plus long à mettre en place. » En 2019, la conserverie s’est aussi lancée dans la fabrication de soupe en bouteilles de 75 cl, pour faire tourner l’installation et valoriser les asperges cassées. Cela lui permet aussi de valoriser les sous-produits en tomate.
Parcours
1998 : installation avec sa femme Laura, spécialisation sur l’asperge
2003 : diversification en asperge verte
2008 : conversion à l’agriculture biologique
2013 : début de la diversification en fraise, tomate, patate douce, endive
2013 : création d’une conserverie