Les Fermes Dephy font évoluer les pratiques
En Provence, de nouvelles pratiques culturales sont menées dans le cadre des Fermes Dephy pour favoriser une production plus durable.
En Provence, de nouvelles pratiques culturales sont menées dans le cadre des Fermes Dephy pour favoriser une production plus durable.
Attention, les rendements sont donnés à titre indicatif. Ils sont facteurs de très nombreux paramètres (climat, irrigation, fertilisation, variétés, densité, etc.). Pour 2016, les nouaisons du mois de mai ont été mauvaises, ce qui fait baisser le rendement indépendamment de l’aspect phytosanitaire.
Depuis six ans, dix exploitations de Provence, engagées dans un groupe Ferme Dephy, mettent en place des techniques pour rendre leur système de culture sous abri froid plus durable et réduire l’utilisation des produits phytosanitaires. Deux cultivent du melon comme culture principale d’été. Un producteur, en conventionnel, cultive Arapaho, variété très productive et adaptée au marché mais très sensible au puceron, sur 1,5 ha d’abris plastiques. Il doit donc se prémunir des pucerons, mais aussi des acariens et de l’oïdium. Ses pratiques ont progressivement été modifiées depuis 2012 et son entrée dans le réseau Dephy. Contre les pucerons, il choisit désormais des spécialités compatibles avec les auxiliaires (syrphes, coccinelles) qui entrent dans les tunnels en mai et l’aident à lutter contre les pucerons. Les anti-oïdium de synthèse ont été progressivement supprimés au profit du soufre mouillable à faible dose (3 kg/ha) répété durant la campagne. Et parce qu’il a constaté un effet secondaire du soufre sur les acariens, il ne traite plus contre ce ravageur. Pour « faire travailler » le sol et apporter de la matière organique, du compost du commerce est apporté et du sorgho est semé après le melon. « Avec ces pratiques, ce producteur a réduit son IFT de synthèse de 57 % entre 2010 à 2016, avec un rendement plutôt en augmentation, indique Laurent Camoin, de la chambre d’agriculture des Bouches-du-Rhône, qui accompagne le groupe depuis 2011. En 2015, son IFT global a été de 7,5 avec un IFT de synthèse de 4 et un IFT biocontrôle de 3,5. Cette année, son IFT global a encore diminué à 5,4, avec un IFT de synthèse de 3 et un IFT biocontrôle de 2,4 grâce à la suppression d’un traitement antipuceron, d’un passage de soufre et des doses plus faibles en soufre » (voir schéma).
Des auxiliaires contre les ravageurs
L’autre producteur, en bio, exploite 1,2 ha d’abris froids. Après avoir cultivé Arapaho, il teste depuis deux-trois ans des variétés Vat comme Godiva, Pendragon ou Artemis. « Le but est de cultiver des variétés performantes, résistantes notamment aux pucerons qui causent beaucoup de dégâts en bio et assez résistantes à l’oïdium », souligne le conseiller. Le maraîcher teste aussi l’apport de différents auxiliaires (voir encadré). En agriculture biologique, la lutte contre les ravageurs passe par des lâchers d’auxiliaires. Le parasitoïde Aphidius colemani est utilisé à raison de 1/m2 en préventif et de façon répétée. « Il y a des réussites et parfois des échecs, notamment sur certaines formes d’Aphis gossypii et quand la température dans l’abri dépasse 35°C, ce qui tue les parasitoïdes », mentionne Laurent Camoin. Le producteur lâche aussi secondairement des larves de coccinelles, prédateur du puceron, à raison de 1/ m2. Et il bénéficie de l’effet secondaire sur les pucerons et acariens de produit à base de terpènes d’orange utilisés contre l’oïdium. Contre les acariens, Amblyseius californicus, acarien prédateur des acariens tétranyques, est également utilisé avec parfois un apport complémentaire en curatif de Phytoseiulus persimilis, aussi prédateur des araignées rouges. « Ces lâchers d’auxiliaires sont relativement efficaces contre les pucerons et acariens, constate Laurent Camoin. Leur coût en 2014 s’est élevé à 0,37 euro/m2, ce qui peut être acceptable en bio. Les variétés résistantes aux pucerons permettent toutefois de baisser fortement ce coût. En 2016, les auxiliaires n’ont ainsi coûté que 0,094 euro/m2. Leur qualité est en revanche déterminante et doit être vérifiée à l’arrivée ». Le producteur inocule aussi ses sols avec du Prestop, préparation à base d’un champignon qui se développe dans le sol et limite ainsi les pathogènes responsables des maladies de sol. L’apport de 30 t/ha de compost de fumier fertilise le sol et favorise la vie microbienne. En 2017, il sera remplacé par 15 t/ha de fumier composté et 15 t/ha de compost de déchets verts, ceux-ci ayant un effet sur la structure du sol et l’apport en phosphore, potassium et magnésium et pouvant stimuler d’autres micro-organismes que le fumier. « Avec ces pratiques, ce producteur obtient un rendement de 2,5 à 3 kg/m2, ce qui est très correct en bio », précise .
« En changeant de pratiques, un producteur a réduit son IFT de 57 % en cinq ans »
LAURENT CAMOIN, Chambre d’agriculture 13
CATHY ECKERT, ingénieur Ctifl-CAN DEPHY
L’importance du levier variétal
« Par rapport à d’autres productions, le melon a en général un IFT peu élevé, le levier variétal est beaucoup plus utilisé que dans d’autres espèces car les semenciers se sont mobilisés très tôt, d’abord pour la vitrescence puis pour les maladies et ravageurs. La prise en compte de la faune auxiliaire pour la protection contre les ravageurs est également assez ancienne. Enfin, le melon est généralement paillé, ce qui limite l’enherbement et donc l’usage d’herbicides, et le biocontrôle, la solarisation, le cuivre... sont déjà bien utilisés ».