La pomme de terre serait-elle la solution aux défis que l’agriculture mondiale doit relever ?
Outre ses qualités agronomiques, la pomme de terre aurait une empreinte carbone faible, selon une étude chinoise récente que l’agronome André Devaux a présentée lors de l’assemblée générale du CNIPT.
Outre ses qualités agronomiques, la pomme de terre aurait une empreinte carbone faible, selon une étude chinoise récente que l’agronome André Devaux a présentée lors de l’assemblée générale du CNIPT.
« Je suis sûr qu’il existe un avenir radieux pour la pomme de terre fraîche, faisons en la solution. » Ces mots, Francisco Moya, président du CNIPT, les a prononcé lors de l’assemblée générale de l’interprofession le 10 janvier.
Ils font fortement écho à la déclaration d’amour de l’ONU lors de sa 78e session en fin d’année dernière pour ce tubercule, qui l’avait estimé « ressource alimentaire inestimable » et « source de revenus pour les familles et producteurs ruraux ». Mais qu’est-ce que cela signifie concrètement ?
Des défis alimentaires certains
Comme l’a rappelé André Devaux, la FAO estime que la consommation alimentaire mondiale va croître de 50 % d’ici à 2050. A ceci s’ajoutent les enjeux du changement climatique et géopolitiques (guerres en Ukraine et au Proche-Orient). « Il est donc nécessaire que les systèmes alimentaires s’améliorent, et la pomme de terre est une solution, tant en termes agronomiques que nutritionnels », a estimé l’agronome, également chercheur pour le Centre International de la Pomme de Terre (CIP) et membre du conseil d’administration du World Potato Congress (WPC).
Lors de la conférence de l’assemblée générale du Comité interprofessionnel de la pomme de terre (interprofession de la pomme de terre pour le marché du frais) le 10 janvier, il s’est attaché, avec Dr Jean-Michel Lecerf, nutritionniste et expert nutrition/santé à l’Institut Pasteur de Lille, a démontré, exemples concrets à l’appui, tous les atouts agronomiques, culturels et nutritionnels de ce tubercule.
Lire aussi : les atouts nutritionnels de la pomme de terre soulignés par Dr Jean-Michel Lecerf
Culture résistante et produit absent des bourses mondiales
Côté agronomique, la pomme de terre est une culture résistante avec une capacité de rendement élevé et une adaptabilité aux différents systèmes agroécologiques. « Aujourd’hui, ce sont 20 millions d’hectares qui sont cultivés dans le monde dans des conditions agrométéorologiques très différentes. Dans les Andes où les producteurs sont montés à 4 000 m d’altitude, on trouve des pommes de terre très résistantes aux gelées », témoigne André Devaux. En outre la pomme de terre présente un cycle relativement court par rapport aux autres cultures.
L’expert insiste aussi : « La pomme de terre assure un double rôle dans l’économie de l’agriculture familiale comme une culture de rente et/ou comme un aliment pour la consommation domestique. Comme elle est produite localement, elle atténue les effets des crises alimentaires, d’autant plus qu’elle est absente des bourses mondiales. »
La Chine a ainsi mis en place un programme de promotion de la pomme de terre depuis 10 ans.
Le Pérou, lui, teste des pommes de terre fortifiées en fer pour lutter contre l’anémie dont ses populations pauvres souffrent particulièrement.
Une empreinte carbone peu élevée
Elle aurait en outre une empreinte carbone peu élevée. Des chercheurs chinois ont examiné (étude de Beibei et al., 2021) les émissions de gaz à effet de serre (GES) des quatre cultures de base en Chine : le blé, le riz, le maïs, la pomme de terre.
Les résultats montent que les émissions de GES (mesurées par calorie produite) sont beaucoup plus faibles pour la pomme de terre que pour les autres cultures :
- 0,25 g CO2e/kcal pour la pomme de terre ;
- 0,47 g CO2e/kcal pour le riz ;
- 0,46 g CO2e/kcal pour le blé ;
- 0,33 g CO2e/kcal pour le maïs.
Sa consommation d’eau est aussi plus efficace, avec une consommation de 0,59 m3/Mcal [mégacalorie] contre 0,69 m3/Mcal pour le riz.
Enfin, les chercheurs ont montré que l’intégration de la pomme de terre comme aliment de base* pour répondre à l’augmentation de la demande alimentaire pourrait potentiellement réduire l’impact total carbone-terre-eau des cultures de base de 17 à 25 % d’ici 2030.
*c’est-à-dire donc la consommation dépasse les 30 kg par an et par personne.
Journée internationale de la pomme de terre le 30 mai
Le 30 mai sera la Journée internationale de la pomme de terre, ainsi que l’a décidé l’ONU en fin d’année dernière. Cette célébration est supervisée par la FAO, en collaboration avec de nombreux pays, avec le WCP (congrès mondial de la pomme de terre) et les acteurs du tubercule. Pourquoi le 30 mai ? Parce que c’est déjà depuis 20 ans la journée nationale de la pomme de terre au Pérou, qui a appuyé la demande d’une Journée internationale.
« C’est la première journée internationale qui est dédiée à une culture vivrière majeure. L’idée de cette journée est de rassembler les consommateurs du monde entier, et cela passera par des interactions sur les réseaux sociaux et des événements présentiels avec des messages clés sur la pomme de terre », prévient André Devaux. Le CNIPT a assuré qu’il sera très présent pour cet événement, « d’autant plus que le 30 mai c’est la transition entre la campagne de conservation et la nouvelle saison des primeurs », comme le souligne Francisco Moya, président du CNIPT.