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La Belgique se lance dans la culture du quinoa

Une dizaine de producteurs belges se sont lancés dans la production de quinoa, tous sur quelques hectares. Wouter Saelens le cultive ainsi sur 1,5 hectare. Il le vend dans le distributeur automatique de sa ferme au côté de ses autres productions, viande bovine et pommes de terre notamment [rédaction Yanne Boloh].

quinoa Belgique
La production de quinoa démarre en Belgique, avec une dizaine de cultivateurs soutenus par le centre technique Praktijkpunt Landbouw Vlaams-Brabant.
© Y. Boloh

Si la France, plus précisément l’Anjou, s’est emparée du quinoa et y a construit une filière avec quelque 300 producteurs pour 2 000 tonnes, la Belgique démarre tout juste avec une dizaine de cultivateurs soutenus par le centre technique Praktijkpunt Landbouw Vlaams-Brabant. C’est le cas de Wouter Saelens. Installé depuis 2010 à Herent, dans les Flandres, avec ses parents Paul et Lydie, il s’est lancé dans cette culture en 2021.

 

 
La Belgique se lance dans la culture du quinoa
© Y. Boloh

« J’avais essayé auparavant du soja pour le producteur de lait de soja Alpro, mais j’ai arrêté au bout de quatre ans car ce n’était pas du tout rentable. J’espère d’ailleurs que les sélectionneurs vont trouver des variétés car mon objectif était de produire de l’huile de soja et des tourteaux pour mes bovins car je voudrais encore améliorer mon autonomie alimentaire », raconte le producteur, connu pour être un innovateur.

Enrichir l’offre de la vente à la ferme

Soja et quinoa ont l’avantage de ne nécessiter aucun matériel supplémentaire par rapport aux autres cultures de sa ferme. L’exploitation familiale, sur laquelle il représente la sixième génération, est avant tout une ferme de polyculture élevage avec 220 bovins allaitants de race blanc bleue belge et 40 hectares de prairies, 40 de pommes de terre (dont l’équivalent de 5 ha vendu dans l’automate de la ferme), 30 de blé, 20 de maïs, 1,5 d’épeautre et 1,5 de quinoa.

 

 

« Me lancer dans le quinoa m’intéressait pour avoir une culture de diversification qui venait enrichir l’offre de notre vente à la ferme à côté des pommes de terre, de la viande de nos bovins et des plats cuisinés que produit ma mère », détaille Wouter Saelens. Il explore aussi des solutions de désherbage mécanique sur cette nouvelle culture en anticipant la réduction des autorisations de produits de traitement sur toutes ses plantes. « J’ai testé différentes solutions avec le matériel de démonstration de la station de recherche qui est à 500 mètres de ma ferme, surtout pour me débarrasser des mauvaises herbes de la famille des chénopodes », explique-t-il.

Plus résistante aux aléas climatiques

Du point de vue technique, l’agriculteur a testé une parcelle en 2020 puis a cultivé 2,5 hectares en 2021. Il y consacre depuis entre 1 et 1,5 hectare chaque année. Le nettoyage, le séchage et la mise en sac sont réalisés aux Pays-Bas, sans surcoût logistique car il profite des voyages d’un de ses voisins. Mais avec les frais de traitement, le rendement doit dépasser les 500 kilos par hectare (kg/ha) de 2022 et 2023 pour que la récolte soit rentable. Pas question donc pour les Saelens d’augmenter leurs surfaces pour l’instant. « Nous poursuivons parce que nous vendons quand même notre récolte, résume Paul, le père de Wouter. Mais il y a encore beaucoup de choses à affiner dans la maîtrise de la culture. » Le premier point reste la préparation du sol. Cette année, il a tant plu que les semis qui ont normalement lieu début avril ont attendu le mois de mai.

La plante a besoin d’eau au moins jusqu’à ce qu’elle atteigne les 20 centimètres de haut, mais sans excès quand même. « Après, elle est plus résistante aux aléas climatiques », constatent les producteurs. Du côté de la récolte, l’année test a été très bonne avec près de 3 000 kg/ha. Puis, en 2021, un coup de vent en juillet suivi de fortes pluies ont tout rabattu, réduisant le rendement à quelques kilos par hectare. Malgré deux ans à suivre à 500 kg/ha, un rendement insuffisant, l’agriculteur veut encore donner une chance à cette culture. « J’ai adapté un skew, matériel dont on se servait pour la production d’endives, pour désherber plus en profondeur et mieux me débarrasser des adventices cette année », précise-t-il.

Avec un petit goût de noisette

En termes de commercialisation, Wouter et ses parents croient au quinoa, même s’ils se heurtent à plusieurs difficultés. « La majorité des consommateurs de quinoa en Belgique privilégient les réseaux spécialisés bio. C’est un produit sans gluten et très riche en protéines. Or, même si je n’utilise pas de produits sur la culture, je ne suis pas en bio. Je pense que nous sommes arrivés un peu tôt sur le marché. Celui-ci devrait se développer un peu comme on l’a connu historiquement pour le riz ou les spaghettis, qui sont passés de produits un peu exotiques à des produits du quotidien », sourit-il.

Le frein de la préparation du quinoa à la maison reste réel pour que le marché prenne autant d’ampleur qu’en France. « Nous proposons des conseils de cuisson et une recette au dos de nos paquets et même des plats nouveaux comme un burger de quinoa, mais nous ne pouvons pas à nous seuls faire la promotion du produit. Les consommateurs belges l’apprécient au restaurant quand ils le découvrent avec son petit goût de noisette, mais ils ne l’ont pas encore adopté dans leur cuisine », conclut Wouter Saelens.

Les Andes fournissent le monde

 

 

La production mondiale de quinoa atteint 230 000 t, le Pérou et la Bolivie assurant 90 % des volumes. Dans l’Union européenne, la France est leader avec le quinoa d’Anjou, lancé en 2009 sur 100 hectares pour atteindre aujourd’hui 3 000 ha, avec plusieurs références comme le quinoa blond, rouge et la farine. Cette filière s’est développée sous l’impulsion de l’ingénieur américain Jason Abbott, installé en Anjou, et est alimentée par 300 producteurs de la CAPL (Coopérative agricole des Pays de la Loire). Depuis une dizaine d’années, le développement de variétés adaptées est assuré grâce à la sélection réalisée près d’Angers par Abbottagra, soutenu par l’Université de Wageningen aux Pays-Bas (croisements et conservation de la diversité variétale). Cette progression génétique et la maîtrise de la culture permettent au Maine-et-Loire de produire environ 2 000 t, soit un tiers de la consommation française. Ces petites graines sans gluten et très riches en protéines proposent une alternative aux cultures classiques et viennent en complément des rotations habituelles.

Cultivé en Anjou sans herbicides

Semée en février, cette pseudo-céréale aussi appelée « riz des Incas » est récoltée à l’été, avec les précautions de nettoyage des matériels et des stockages pour garantir un produit final sans gluten, sorti de son unité de Brissac (Maine-et-Loire). La CAPL s’est orientée vers des cultures rares et innovantes en filières contractualisées : blé de qualité meunière certifiée, orge de brasserie, millet, épeautre, sarrasin, lentilles… Le quinoa, Chenopodium quinoa, est cultivé en Anjou sans herbicides ce qui impose une bonne préparation avec des faux semis, dans des sols plutôt profonds et dotés d’une réserve naturelle en eau, surtout dans la première phase de la culture. Elle supporte toutefois mal les excès d’eau et de chaleur. La fenêtre de tir pour la récolte est également très étroite.

Naturellement sans gluten

Base de l’alimentation précolombienne des Andes où ses premières traces sur le bord du lac Titicaca, remontent à plus de 5 000 ans, le quinoa s’est peu à peu imposé dans les assiettes des Français depuis les années 1980. Il s’utilise comme du riz ou d’autres céréales tout en ayant l’avantage d’être naturellement sans gluten. Après une première période d’utilisation dans les familles d’intolérants au gluten ou par les vegan, en raison de sa richesse en protéines, le quinoa a conquis une plus large population dans l’Hexagone, comme accompagnement ou comme base de la confection de desserts. La part du bio est conséquente (20 %).

Rédaction Réussir

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