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Tomate, poivron et concombre
Entre origine France, fraîcheur et snacking, les veilings belges affutent leur stratégie

Origine France et local avant tout, mais aussi le goût et la qualité qui restent le premier critère. REO Veiling, Hoogstaten et BelOrta précisent à FLD leur vision du marché français et leurs stratégies. Le ZRP n'en fait pas partie.

Origine France et local avant tout, mais aussi le goût et la qualité qui restent le premier critère. REO Veiling, Hoogstaten et BelOrta précisent à FLD leur vision du marché français et leurs stratégies. Le ZRP n'en fait pas partie.

Alors qu’en 2007 l’Allemagne était le premier marché pour REO Veiling, aujourd’hui 23 % de son chiffre d’affaires se fait en France, presque le double qu’en Allemagne (et 53 % en Belgique). Dominiek Keersebilck (REO Veiling, directeur commercial) analyse : « Ces chiffres importants s’expliquent par la proximité géographique, le choix stratégique de développer ce marché, la hausse de la population française face à une baisse de la production agricole qui laisse la place à notre produit et notre installation en France face au constat il y a 7-8 ans d’une forte tendance montante pour le local. » 6 000 t des 55 000 t de tomates chez REO Veiling sont produites en France, à Arques dans les Hauts-de-France sur 10 ha par Kevin Vandevelde (projet Les Serres des Hauts de France).

REO Veiling joue sur l’origine France et le local

Pour la 4e année, Kevin Vandevelde va produire des tomates : des grappes, mais aussi des tomates cerise (initié l’année dernière) et nouveau, des tomates charnues sur 2 ha, en contractualisation. Toute sa production est vendue à deux clients grossistes qui livrent les enseignes, sur le Nord de la France (par exemple chez Auchan et Intermarché).

« On voit un intérêt chez nos producteurs -mais aussi chez les autres producteurs belges et hollandais- pour s’installer dans le Nord de la France, confirme Dominiek Keersebilck (REO Veiling). Le consommateur français est prêt à payer un peu plus cher pour un produit français. Et en France il y a des régions comme dans le Nord avec de la main d’œuvre disponible, des terres où construire des projets de serres, avec des usines autour pour la récupération de chaleur. »

REO Veiling regarde donc les possibilités dans les autres régions de France et a encore 25 ha disponibles sur 35 ha de terres, ce qui laisse la place pour, par exemple, deux blocs de 10 ha. Le veiling envisage ainsi de s’agrandir en termes de produits français, et peut-être de se diversifier, en poivron notamment. « Il y a un grand manque d’une offre française en poivron sur le marché français, analyse Dominiek Keersebilck (REO Veiling). REO Veiling produit déjà en Belgique des poivrons sur 2,65 ha et tout est expédié en France. » La diversification pourrait « être intéressante », en poivron mais aussi en concombre de printemps sous serre, en courgette, en fruits rouges.

Qualité et fraîcheur, une image que Hoogstraten veut pousser

Hoogstraten est surtout connu pour sa production de fraises mais produit de la tomate sur 250 ha, du concombre sur 10 ha et du poivron sur 110 ha. La coopérative est présente sur le marché français toute l’année en tomate en d’avril à fin octobre en poivron. Si 30 % de ses fraises sont expédiées en France, la part en tomate est moindre, 10 à 20 % maximum. La Belgique et l’Allemagne sont ses plus gros débouchés.

La concurrence en France provient surtout de l’offre français, face au patriotisme pour l’origine nationale (une tendance qui existe aussi en Belgique). « A nous de jouer sur la qualité pour marquer positivement l’esprit du consommateur français, revendique Bart Van Bael (Hoogstraten, responsable Grands Comptes producteurs et ventes légumes sous serre). Hoogstraten a fait le choix d’avoir le même positionnement qualitatif et de fidélité sur le marché français que sur le marché belge. Nous voulons casser l’image de “casseur de prix” avec de gros volumes que les Belges peuvent avoir sur les Min français. A l’inverse, le retail français nous voit comme fidèle et avec des produits de qualité et du goût. »

BelOrta en France : la couleur en plus du goût

La France reste très important pour BelOrta, 25 à 30 % de son marché à l’export, équivalent avec l’Allemagne en fonction des années. « La proximité de la France -on peut livrer plus facilement le Nord et le Centre de la France que des producteurs du Sud de la France-, notre offre qui est adaptée aux attentes : qualité, goût, couleur, segmentation “speciality”… Cela explique ces fortes parts de marché chez nous », analyse Maarten Verhaegen (BelOrta, responsable Légumes).

BelOrta développe fortement sa variété RubyRed, une prunella en grappe, allongée, très goûteuse. Pour la France, la criée mise aussi sur la couleur rouge intense de ses tomates charnues, alors que ses Cœur de bœuf vertes, « invendables en France », iront plutôt sur les marchés du Sud de l’Europe, demandeurs de ce type de couleur.

En poivron, BelOrta mise sur la Corne de Taureau, un poivron « très beau, très sucré, de forme allongée, facile à garnir ». Ce produit est plutôt destiné à la Belgique ou la Hollande où il observe une très forte croissance. « Le consommateur français est plus conservateur et va rester sur l’offre classique : le trio de couleurs, observe Maarten Verhaegen (BelOrta). Mais il y a un potentiel en France, j’en suis sûr. On a une division Marketing chez BelOrta et nous sommes prêts à développer des actions de promotions et de communication vers les consommateurs et la GMS français dès qu’on sera sollicité par un client. »

En parallèle, les criées belges peuvent compter sur la communication générique du VLAM sur les marchés de gros français, qui promeut le poivron classique mais aussi ce poivron allongé.

Le snacking, une tendance à croquer

Les consommateurs, qu’ils soient belges, français, allemand… se dirigent de plus en plus vers du snacking, même si chez Hoogstraten, 30 à 40 % des volumes de tomate commercialisés sont encore des grappes. Les emballages sont plus petits et permettent de conserver plus longtemps la fraîcheur. C’est une vraie tendance en Belgique et elle commence à être très forte en France également. Hoogstraten propose donc aussi le poivron snacking et le mini-concombre (30-40 g), qui est parfaitement adapté pour les lunch-boxes des enfants [pas de cantines au Benelux contrairement à la France].

Zéro plastique, moins d’emballage

Sur la question des emballages, l’attente des consommateurs est peut-être moins forte qu’en Belgique -malgré un rebasculement du vrac à l’emballé pendant la période Covid pour des raisons sanitaires.

« Il y a une grande tendance pour du zéro plastique et pour aller vers des emballages en carton, d’autant plus en France avec la loi Agec », confirme Bart Van Bael (Hoogstraten). La commercialisation chez Hoogstraten se fait surtout en vrac, l’emballé en tomate ne représente que 10 à 15 % des volumes. Le concombre est 100 % en vrac. « Ce n’est pas durable d’emballer, même si en concombre cela fait gagner 3-4 jours de vie, mais l’image n’est pas cohérente. » En poivron, l’offre est à 90 % en vrac. Le reste de la gamme se compose du 400 g, du 500 g et du 1 kg pour les 3 (ou 4) couleurs, en carton pour remplacer le flowpack.

BelOrta propose la Cœur de pigeon en grand carton vrac en magasin. Maarten Verhaegen (BelOrta) confirme aussi : « En France, la loi Agec rend les choses difficiles. Le basculement du plastique au carton a augmenté le prix du kilo de tomate ronde et du kilo de tomate grappe de 0,50 €/kg. Il y a une centrale d’un hard discounter qui n’a pas voulu passer cette hausse et que donc on ne va plus livrer. »

REO Veiling fait remonter des difficultés de plus en plus vives, en termes de disponibilité et d’approvisionnement : « L’Asie tire le carton, le bois vient -venait ?- de Russie et d’Ukraine. Je pense qu’il va y avoir un changement en France vers la caisse réutilisable type Europool », analyse Dominiek Keersebilck (REO Veiling).

Le ZRP, une carte que les Belges ne veulent pas jouer

Autre tendance forte observée par REO Veiling en France : la durabilité écologique et économique. « On le voit encore plus et REO Veiling investit beaucoup dans les méthodes de production nouvelles, afin de réduire les émissions de carbone, de gaz à effet de serre, souligne Dominiek Keersebilck. A Arques, l’exploitation est HVE et la serre est chauffée par la chaleur perdue des usines environnantes. On regarde dans d’autres régions françaises pour dupliquer le modèle. »

En France, le bio est une attente très forte, et on voit monter en puissance les allégations du type zéro résidu ou sans pesticide. Mais les Belges ne se sont pas saisis de ce dossier très franco-français. « Empreinte carbone neutre, ça c’est “facile” à mettre en place, explique Bart Van Bael (Hoogstraten). Mais pour zéro résidu de pesticides, il faut alléguer toute la récolte, c’est compliqué, et nous pensons que dans l’esprit du consommateur cela ne correspond pas à la réalité, c’est plus du marketing. »

« Le zéro pesticide est une vague en France mais que l’on ne suit pas ici, confirme Maarten Verhaegen (BelOrta). Nous sommes en cultures intégrées, les produits Flandria sont produits avec le moins de phyto possible, c’est une tendance depuis 10 ans mais nous ne faisons pas de marketing dessus. Chez BelOrta nous avons aussi un département Bio qui fait du très bon travail. Le bio, 5 % de nos ventes, se développe moins vite que ce qu’on voudrait mais c’est une niche, qui se vend très bien et quasi que sur la Belgique face à la demande. »

Dominiek Keersebilck (REO Veiling) regrette la multiplicité des labels et des cahiers des charges exigés par les distributeurs, qui font peser des charges supplémentaires sur les producteurs. Sur la HVE, il estime que les consommateurs français savent de plus en plus ce dont il s’agit. Sur ZRP, « on n’a pas mis d’énergie sur ce dossier car c’est difficile à expliquer. Et je doute de la réalité du comportement d’achat en rayon. Selon moi, c’est la fraîcheur et le prix qui restent le plus important pour les consommateurs français. »

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