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Restauration collective
Education alimentaire : comment Sodexo fait manger plus de légumes aux enfants

Alors que FLD s’est intéressé à l’éducation alimentaire des enfants à l’école et comment les professionnels de la filière se saisissent du sujet [à lire dans FLD Mag de mai 2023], Sodexo a rappelé son engagement de long terme. Par ses animations en cantine, le groupe de restauration permet de mettre en exergue et de faire découvrir aux enfants -et parfois à leurs parents et au personnel encadrant- des fruits et des légumes et des légumineuses. Carole Galissant, directrice Transition Alimentaire et Nutrition chez Sodexo, donne aussi, par des exemples concrets, les cinq leviers à activer pour faire manger des légumes aux enfants.

Pour qu’un plat ou un aliment soit accepté, il y a bien sûr le goût, critère numéro 1. Mais vient ensuite l’accompagnement et la camaraderie. La cantine, ce n’est pas que l’aliment, c’est aussi le personnel encadrant, les copains à côté qui mangent ou non leur assiette.
© Archives FLD - Julia Commandeur

« Chez Sodexo on est persuadé depuis longtemps que la cantine est un lieu d’éducation pour les enfants. » Tels ont été les premiers mots, sortis du cœur, de Carole Galissant, directrice Transition Alimentaire et Nutrition chez Sodexo, lors d’une interview pour FLD le 28 février.

Carole Galissant travaille depuis près de 30 ans pour une (bonne) éducation alimentaire à école, chez Sodexo. Elle a commencé sa carrière en Seine-Saint-Denis, puis a eu la responsabilité des menus et recettes pour l’éducation en tant que Directrice pôle nutrition Education Sodexo, avant de prendre son poste de directrice Transition Alimentaire et Nutrition. Elle est par ailleurs présidente de la commission Nutrition au SNRC (Syndicat national de la restauration collective) et à ce titre siège au Conseil national de l’Alimentation et au récent Conseil National de la Restauration collective.

« Education alimentaire et éducation nutritionnelle sont deux choses différentes. Il s’agit dans l’éducation alimentaire de remettre l’aliment au centre, de voir son histoire, comment il pousse, comment on le transforme », précise-t-elle. Sodexo est très impliqué dans les animations autour des fruits et des légumes et de manière générale autour de la végétalisation de l’assiette. Sodexo va ainsi faire rimer l’année scolaire avec des animations qui suivent les fêtes calendaires, les thématiques d’alimentation durable (Semaine du Goût, l’anti-gaspi…) et une nouvelle recette (autour d’un légume) une fois par mois. Les animations s’accompagnent de visuels, d’explications des personnels encadrants, et quand cela est possible, d’intervenants extérieurs (diététiciens, cuisiniers ou producteurs comme Christian Hubert, producteur de légumes secs en Île-de-France), même si « c’est techniquement difficile à mettre en place »).

 

Des animations très végétales pour découvrir les fruits et légumes

Sodexo ne propose pas d’animations autour des viandes, « même si elles ont de très belles histoires à raconter », la priorité est donnée au végétal : fruits et légumes, céréales complètes/semi-complètes, légumineuses, car « c’est là où le bât blesse ». Les dernières recettes élaborées suivent ainsi cette tendance. Sodexo propose chaque mois une nouvelle recette d’un produit simple. « Cette année par exemple, on va travailler sur l’épinard. On va le proposer en soupe-mascarpone, puis en gratin. »

Si carotte, concombre et haricot vert fonctionnent très bien à la cantine, chou-fleur et brocoli ont plus de mal, « ça dépend des villes et des recettes ». Sodexo essaye aussi de remettre au menu des légumes oubliés qu’on ne proposait plus en restauration collective : les courges qui fonctionnent très bien, les salsifis, en cours de déploiement, qui fonctionnent si et seulement si ils sont proposés avec pommes de terre et béchamel. Parfois malheureusement, le personnel encadrant découvre les fruits et légumes avec ces animations. Et « le plus beau des succès », c’est quand les enfants rapportent cette connaissance à la maison et même parfois demandent à leurs parents de remanger tel aliment ou de refaire tel recette découvert à la cantine.

La digitalisation, un outil au service de l’éducation alimentaire. Sodexo propose l’application So Happy, qui permet aux parents de connaître le menu de la semaine, avec les explications sur les allergènes, les animations prévues, et d’interagir avec les équipes en posant des questions. Ils peuvent aussi y demander les recettes de certains menus.

Pour Carole Galissant, c’est sûr, la cantine est le lieu idéal pour découvrir des fruits et des légumes et surtout prendre de bonnes habitudes alimentaires pour le reste de sa vie. « La cantine a son rôle car c’est la répétition de la présentation au quotidien de menus équilibrés qui donne des bases aux enfants. 10 jours, 10 légumes, 10 féculents, 10 protéines… Par mimétisme, l’enfant acquiert les bons réflexes. » De plus, Sodexo fait en sorte que le personnel encadrant puisse verbaliser correctement ce qu’il y a dans l’assiette. Ce n’est pas « un légume » mais « un brocoli ». « La verbalisation est le premier acte d’acceptation de l’assiette », souligne Carole Galissant.

 

 

Faire manger des fruits et légumes aux enfants à la cantine en 5 points clés

Pour Carole Galissant, faire accepter aux enfants de manger des fruits et des légumes repose en quelques leviers plus ou moins simples à mettre en place. « Tout repose sur l’assiette : de bons produits bien identifiés, et l’encadrement qui va avec. »

1/ Importance de voir l’aliment : le lien au produit

Il est important pour les enfants de voir l’aliment brut afin qu’ils établissent le lien avec le produit transformé. Sodexo avait essayé il y a quelques années de présenter le légume brut avant la dégustation mais cela avait entraîné trop de gaspillage. Désormais, les légumes bruts sont présentés via des visuels. « Et ça marche ! Les enfants se rendent compte qu’une patate douce qui va être en vrai un peu tordue, d’une forme bizarre, va être très bonne dans l’assiette. »

De même, la recette doit être lisible. Carole Galissant évoque les “OCNI” (objet comestible non identifié). « Par exemple je ne propose pas les fameux gâteaux chocolat-courgette, même s’ils sont tendance et intéressants en goût, car la courgette est trop planquée. »

En revanche, il s’agit de ne pas effrayer les enfants en en disant trop, trop vite. « Il y a quelques années, j’avais proposé pour les écoles maternelles en dessert un cake à la betterave, intitulé tel quel. Un flop monumental !, se souvient Carole Galissant. C’était l’époque de Dora l’Exploratrice, donc j’ai proposé de nouveau ce cake mais sous l’appellation “Cake de Dora” et attendu la fin de la dégustation pour expliquer qu’il y avait de la betterave. Un vrai succès ! »

 

2/ Importance de la répétition et gradation dans la complexité

L’aliment va être répété plusieurs fois mais sous des recettes différentes. « On sait que la répétabilité devrait être toujours sous la même forme mais en restauration collective nous avons des exigences de la part des clients et parents qui veulent de la diversité. Et nous pratiquons une gradation de la complexité du légume dans sa présentation. Par exemple, pour les brocolis on va commencer une soupe de brocoli, puis des penne aux brocoli -l’association avec les céréales aide à l’acceptabilité des légumes-, puis des brocolis aux amandes. » La gradation de la complexité du légume dans sa présentation aide et rassure l’enfant dans sa découverte et son acceptabilité du légume.

 

3/ Partir d’une recette connue

Partir d’une recette connue et appréciée est aussi un levier à ne pas négliger. Par exemple, décliner le parmentier avec une purée de céleri, puis de brocoli, puis de haricots verts. « Cette année on teste le parmentier aux deux pommes, de terre et fruit, mis en vedette par nos mascottes “qui voient double, la pomme de terre et la pomme de l’air” », précise Carole Galissant.

Sodexo décline aussi sa recette de bolognaise, en faisant évoluer la part de légumineuses à la place de la viande de bœuf pour arriver à la fin à des bolognaises 100 % lentilles. « On y va crescendo pour rassurer et amener les enfants à une consommation différente. » Cette déclinaison peut aussi servir à la connaissance de la saisonnalité : Sodexo propose son très apprécié fondant de patate douce au fromage de chèvre en version brocoli, carotte… selon les saisons.

 

4/ Importance du social : convaincre les “leaders d’opinion en couche-culottes”, raconter l’histoire de celui qui a fait pour remettre du lien

Pour qu’un plat ou un aliment soit accepté, il y a bien sûr le goût, critère numéro 1. Mais vient ensuite l’accompagnement et la camaraderie. La cantine, ce n’est pas que l’aliment, c’est aussi le personnel encadrant, les copains à côté qui mangent ou non leur assiette. « On se rend compte de l’importance du mimétisme : c’est la tablée entière qui mange son assiette ou qui au contraire la refuse. D’où l’importance pour les personnels de repérer les “leaders d’opinion”. Par exemple on va faire passer au self en premier les enfants dont on sait qu’ils aiment les légumes. Les autres enfants, les voyant remplir leur assiette de légumes, pourront être tentés d’agir de même. »

Autre levier social : les animations qui font intervenir les cuisiniers et les producteurs. A l’instar des adultes invités chez des amis à dîner, par respect pour ceux qui ont fait, les enfants vont au moins goûter. Les affiches avec les portraits des producteurs locaux fonctionnent aussi très bien. Et cela permet de remettre un lien à la terre aux enfants qui en sont, aujourd’hui, souvent dépourvus.

Les recettes régionales et du monde, en lien avec une histoire ou une animation, fonctionnent aussi très bien. Le chou rouge aux pommes en plat chaud, recette du Nord, proposée l’année dernière, a eu du succès.

 

5/ Importance de la praticité des fruits et des légumes

Carole Galissant avertit : à la cantine, pour qu’un fruit soit consommé, il faut qu’il soit pré-transformé. Sodexo propose ainsi des assiettes de fruits prédécoupés, des bâtonnets de pommes-coulis de fruits rouges…  « Le problème c’est que les tout-petits non pas encore de dents, les moyens les perdent.. Il faut donc penser la facilité de consommation. »

Le découpage est aussi un frein, mais qui peut être levé avec les bons outils. Carole Galissant donne l’exemple du découpe-pommes. Les établissements qui ont mis cet outil sur les tables, avec un personnel pour accompagner les enfants, ont vu une hausse de la consommation des pommes brutes. D’autres clients demandent à Sodexo de mettre en place cette solution.

 

La durabilité jusque dans les approvisionnements

Réfléchir à une alimentation saine et durable c’est aussi la penser en amont, rappelle Carole Galissant. « Est-ce qu’on est capable de prendre toute la production d’un agriculteur, ses jolies pommes comme les plus moches ? Avec la généralisation des compotes et des purées maison, cela nous permet de valoriser tous les volumes d’un producteur. » Sodexo est engagé en production avec des filières d’approvisionnement durables et locales.

Et Carole Galissant de conclure : « La restauration collective porte vraiment le sujet des fruits et des légumes car tous segments confondus, on y consomme énormément de fruits et de légumes. »

 

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