Contre la mouche de l'olive, comment appliquer une barrière minérale
L’application d'une barrière minérale sur les oliviers au cours de la saison reste une nécessité même si la pression de la mouche de l’olive est généralement gérable. Piqûre de rappel par le groupement des oléiculteurs. [texte : Manon Lallemand]
L’application d'une barrière minérale sur les oliviers au cours de la saison reste une nécessité même si la pression de la mouche de l’olive est généralement gérable. Piqûre de rappel par le groupement des oléiculteurs. [texte : Manon Lallemand]
Principal fléau de l’olivier, Bactrocera oleae, la mouche de l’olive continue de se déployer dans les oliveraies provençales. Pourtant, nombre d’oléiculteurs, principalement amateurs, peinent à faire la différence avec d’autres drosophiles ou la mouche domestique. Spécifique aux oliviers, cette mouche de quatre à cinq millimètres de long une fois adulte est reconnaissable grâce à ses deux points noirs sur les ailes, ainsi que ses stries sur l’abdomen. La femelle peut quant à elle être distinguée par la présence d’un dard destiné à la ponte.
Généralement un œuf par olive
En fin de récolte, entre novembre et décembre, les derniers individus à émerger voleront un peu, mais la majorité de ceux en mesure de passer l’hiver se trouvent au sol, au stade de pupes, attendant patiemment le printemps pour pointer le bout de leurs ailes. « À ce stade, les pupes sont quasiment indestructibles, à moins d’avoir des poules qui passent par là. Les lâchers massifs fonctionnent relativement bien, mais cela implique de savoir gérer un poulailler », a rappelé Edgar Raguenet, technicien-animateur du Groupement des oléiculteurs de Vaucluse, lors d’une formation en juillet, à Gordes (Vaucluse).
Ainsi, le technicien incite à protéger les vergers. Car dès le printemps arrivera l’émergence, puis l’accouplement, les premiers vols et enfin la ponte, dès l’été, quand la taille de l’olive dépasse les huit à dix millimètres. « Généralement, la mouche ne pond qu’un œuf par olive. Mais on estime qu’une femelle peut pondre plus d’une centaine de fois en milieu naturel. Toutefois la viabilité des œufs est compromise si la température extérieure est assez élevée [au-dessus de 35°C] dans les trois jours qui suivent. Sinon, une petite chenille commencera son développement », retrace Edgar Raguenet. La larve se développe alors pendant 10-15 jours, puis la pupe une dizaine de jours avant l’éclosion. Même une piqûre avec des œufs non viables engendre une blessure qui peut provoquer le développement de la dalmaticose, maladie causée par le champignon Botryosphaeria dothidea.
Pas synonyme d’absence de risque
En Vaucluse, les oléiculteurs bénéficient d’un mistral salvateur, comme en 2023, qui permet bien souvent d’atténuer la pression sur les vergers avec deux à trois générations. Mais dans les zones les plus touchés, trois à cinq générations peuvent se côtoyer sur la campagne. En 2024, France Olive met en garde : « Dans la grande majorité des secteurs, les olives sont attractives à la ponte. Les mouches sont très actives, les populations sont importantes et ont fortement augmenté en quelques jours ». Il est primordial de mettre en place correctement son itinéraire technique, et notamment le piégeage, de manière à surveiller l’évolution de la population dans les oliveraies. « La première étape de la lutte contre la mouche est déjà de surveiller les vols grâce au piégeage par phéromones ou alimentaire », explique Edgar Raguenet. Pour le premier, il s’agit d’un piège chromatique, une bande collante jaune, sur laquelle l’oléiculteur vient fixer une capsule de phéromones.
« Ce sont principalement les mâles qui vont venir se coller dessus, ce qui va nous permettre de mesurer le taux de vol. En ce moment [début juillet], dans notre département, nous sommes à environ deux mouches par semaine. Quand on commence à dépasser les trente à quarante, là, en revanche, cela devient inquiétant », poursuit-il. Le piège, un par hectare suffit, devra ensuite être renouvelé toutes les trois à quatre semaines. Les pièges alimentaires, moins sélectifs, sont quant à eux remplis d’une solution de phosphate diammonique (environ 40 grammes par litre d’eau) et placés à d’autres extrémités du verger. Il faudra ensuite comparer les résultats des deux types de pièges, afin d’échelonner l’application de barrières minérales. Le suivi des pièges peut ensuite être saisi dans l’outil d’aide à la décision de France Olive, qui permet aux oléiculteurs de consulter les résultats de chacun et d’évaluer sa situation.
Compter au minimum 100 grammes par arbre de kaolin
Dans les vergers, les premiers traitements interviennent autour du 14 juillet. Pour l’animateur du groupement vauclusien, sauter un traitement n’est jamais une bonne idée. « Appliquer une barrière minérale ne coûte pas très cher, à peine un euro par arbre et par an. Le cycle de développement de la mouche de l’olive est très rapide, et l’on voit souvent des oléiculteurs qui se retrouvent coincés parce que cela se passe quand ils ont décidé de prendre quelques jours de vacances. Donc, on ne se fait pas avoir : on applique les recommandations ». Une deuxième application doit être faite fin août et une troisième en septembre. « Il y a trois choses que l’argile n’aime pas : la pluie, le vent et les augmentations de calibre. D’où la nécessité de répéter l’application à plusieurs reprises », précise Edgar Raguenet.
De manière générale, il faut compter au minimum 100 grammes par arbre de kaolin. Si l’utilisation d’un pulvérisateur à dos à pompe pneumatique est possible, le groupement préconise une application par atomiseur, dont la pompe centrifuge permet la fragmentation du liquide, et consomme ainsi deux fois moins d’eau (la dilution du kaolin est ainsi de 10 % au lieu de 5 %). Il est aussi plus aisé à utiliser dès lors que le nombre d’arbres dépasse la cinquantaine. Différents produits sont disponibles avec ou sans homologation, leur utilisation étant détaillée sur le site de France Olive. À noter que l’application d’une barrière minérale n’est pas négligeable, même si des piégeages massifs ont été réalisés en début d’année.
Que faire si j’ai raté un traitement ?
« Si vous avez loupé un de vos traitements, vous pouvez observer les piqûres sur 10 à 12 olives. Vous les coupez au couteau pour vérifier leur état, et voir si elles datent d’avant ou après le dernier traitement », explique Edgar Raguenet. Si le taux de piqûres augmente significativement en fin de saison, « cet exercice vous permet de voir combien de temps il vous reste avant le pic de dégâts, et éventuellement de vous permettre d’avancer la récolte », développe l’animateur. La récolte précoce permet de limiter les pertes mais induit des rendements moindres en huile, ainsi qu’une impossibilité d’obtenir des fruits mûrs ou des olives de table noires.