Négociations commerciales
Banane : consommation et inflation, quelle équation ?
Avec la clôture des négociations commerciales pour 2023, l'AIB, l’interprofession de la banane, précise les dernières données de consommation, à mettre en relation avec le contexte inflationniste général. Et précise ses projets chauds pour 2023, en particulier la durabilité.
Avec la clôture des négociations commerciales pour 2023, l'AIB, l’interprofession de la banane, précise les dernières données de consommation, à mettre en relation avec le contexte inflationniste général. Et précise ses projets chauds pour 2023, en particulier la durabilité.
Dynamique depuis quelques années, la consommation française de banane avait dépassé légèrement les 700 000 t fin 2021, une belle progression face aux 550 000 t d’il y a six ans. Mais aujourd’hui, la consommation semble être sur une phase de plateau. Sur 12 mois glissants à fin octobre 2022, elle accuse un léger recul de -3,5 %.
La banane, le deuxième fruit des Français. Selon le Cirad , la consommation de banane se situe à 10,8 kg par habitant et par an. Les achats des ménages au stade détail mesurés par Kantar au 27/12/2022 montrent un recul des quantités achetées de -3,5 % par rapport à 2021, mais ce niveau reste très proche de celui de la moyenne 2019-2021 (-1%). 90% des ménages français achètent de la banane. C’est le deuxième fruit le plus consommé après la pomme et elle représente 17% des volumes de fruits vendus en 18 actes d’achat.
Certes, l’approvisionnement du marché européen dans sa totalité a été déficitaire, notamment au second semestre, en raison d’un repli de l’origine Equateur. Mais la France repose pour les deux tiers de son approvisionnement sur les Antilles et les origines africaines. Le recul de la consommation observé en France s’expliquerait plutôt par des raisons sociologiques : l’inflation touche le pouvoir d’achat des Français, et la consommation alimentaire a joué le rôle d’arbitre dans les dépenses des ménages. Ce phénomène s’est surtout matérialisé sur le dernier quadrimestre, depuis la rentrée de septembre. La consommation de fruits a d’ailleurs reculé de -5 %, là où la banane n’observe “que” -3,5 %.
Des prix au détail stables en 2022
« La banane a moins sous-performé que la catégorie Fruits, traduit Philipe Pons, président de l’AIB, lors d’une interview pour FLD fin janvier. En revanche, il convient de préciser que, jusqu’au 31 décembre 2022, la banane n’a pour sa part, pratiquement pas subi de hausse des prix au détail. Les négociations annuelles de fin d’année, qui ont été dures et longues -certaines ne se sont achevées que courant janvier- ont entériné des hausses qui devaient passer afin de prendre en compte la hausse des coûts de production et des coûts d’acheminement et de distribution qui touche durement les opérateurs depuis deux ans. »
Le prix au détail moyen (toutes origines, toutes segmentations) sur les 12 premiers mois de l’année était, selon les relevés Kantar, de 1,73 €/kg au stade de détail. « Eu égard aux hausses enregistrées à l’issue des négociations annuelles, le prix constaté au stade détail devrait augmenter de façon significative, mais il est vraisemblable que le seuil symbolique de 2 €/kg ne sera pas franchi. »
Peut-on encore parler de prix psychologique en banane ? Depuis deux ans, près de la moitié des volumes de bananes vendues en grande distribution n’affiche pas en première lecture le prix au kilo. En effet, si le vrac continue d’être vendu au kilo, les bananes 1er prix, une grande part de la banane Française et les trois quarts des bananes bio (ou bio Fairtrade) sont proposées en 4, 5 ou 6 doigts, avec un prix affiché fixé. On parle alors de « prix maîtrisé pour le consommateur », selon les termes d’un distributeur.
Des négociations 2023 pour couvrir la flambée des coûts
Si certains produits ont vu leur prix augmenter graduellement au cours de l’année 2022, pour la banane les prix affichés en rayon auront fait l’objet d’une hausse exprimée d’un coup, dès le début d’année 2023. Mais de quel niveau de hausse parle-t-on ? Et quelle sera la réaction des consommateurs ? « Nous, professionnels de la banane, restons optimistes. Malgré la hausse annoncée de son prix, la banane demeure un fruit accessible et un des moins chers du rayon, avec d’indéniables qualités gustatives, nutritionnelles et disponible toute l’année. Dès lors, elle devrait relativement peu subir de désaffection de la part des consommateurs. » Un premier bilan pourra être dressé à la fin du premier trimestre.
En parallèle, la plupart des grands distributeurs sont toujours motivés pour des plans de promotions dynamiques, la banane servant de produit d’appel. Mais les promotions ne pourront plus être tenues à des niveaux de 0,99 €/kg comme ce fut le cas encore en 2022.
Autre question : les hausses de prix négociées seront-elles suffisantes pour compenser la hausse des coûts ? « Dans les négociations applicables au 1er janvier 2023, les premiers metteurs en marché -importateurs mûrisseurs- ont intégré l’évolution des coûts de production et du transport depuis le second trimestre 2022. Naturellement, tout nouvel épisode géopolitique (tel que la guerre en Ukraine en 2022) serait de nature à bousculer un équilibre précaire entre les maillons de la filière, équilibre à peu près retrouvé à l’issue des négociations clôturés fin 2022. Une nuance cependant : le coût énergétique pour le maillon mûrisserie demeure une variable peu maîtrisée, dans la mesure ou les échéances des contrats d’approvisionnement électrique ont des termes différents selon les mûrisseurs concernés. »
La problématique Emballge en semi-pause, la durabilité au centre des débats
Les projets sur la table de l’interprofession sont, cette année encore, nombreux. Citons entre autres, pour la communication, le programme triennal européen Life is Better initié au deuxième semestre 2022. L’AIB annonce aussi qu’elle sera partie prenante à l’initiative “Banane Durable” portée par le Cirad, Banana Link et Fairtrade, dont le lancement officiel devrait avoir lieu lors du SIA (Salon International de l’Agriculture) prochain.
Philippe Pons s’exprime sur le dossier des emballages et de la loi Agec. « La récente décision du Conseil d’Etat a rendu temporairement inapplicable l’article 77 de la loi Agec. Cependant, quelle que soit l’évolution juridique du dossier, la banane fait partie des fruits mûrs à point, pour lesquels un délai était déjà en place.. Par ailleurs, les futures dispositions européennes en matière d’emballage devraient « rebattre les cartes » en clarifiant les usages et obligations pour l’ensemble de la filière Fruits et Légumes, avec un calendrier d’application que nous attendons clair et réaliste en matière de contraintes techniques. Dans le même temps, la filière banane poursuit ses recherches entamées il y a plus de trois ans pour des solutions fiables -en termes de résistance mécanique- capables de remplacer à terme le plastique des rubans actuels. Je souligne d’ailleurs que le passage du sachet flow pack au plastique a déjà permis de diviser par 5 voire par 6 les quantités de plastiques utilisées. »