TOMATE
Comment améliorer le rendement précoce
La précocité en culture de tomates est un critère commercial très important pour les maraîchers en circuits courts. Différentes techniques culturales, testées par la Serail, permettent de gagner deux à trois semaines et d’améliorer le rendement précoce .
La précocité en culture de tomates est un critère commercial très important pour les maraîchers en circuits courts. Différentes techniques culturales, testées par la Serail, permettent de gagner deux à trois semaines et d’améliorer le rendement précoce .
Différentes techniques culturales ont été testées à la Serail pour assurer des premières récoltes de tomate tôt en saison sous tunnel froid. Trois années d’essais ont permis d’évaluer ces techniques et de constater un gain de deux à trois semaines de précocité de récolte par rapport à une culture de tomate traditionnelle en utilisant de façon combinée des moyens relativement simples à mettre en oeuvre pour un maraîcher diversifié. Il s’agit de cumuler les avantages de plants "âgés", de la précocité de certaines variétés, de l’effet thermique de technique de forçage et d’une plantation précoce.
La date de plantation doit être avancée de deux semaines
« Le stade du plant à la plantation est le premier facteur de gain précocité. En 2016, seuls des plants de tomates dits "âgés", c’est-à-dire au stade début floraison 1er bouquet, ont été implantés et comparés, ayant démontré leur intérêt les années précédentes », explique Nadine Treuvey, de la Serail. Bien que son coût d’achat constitue un investissement plus important, la plantation d’un plant "âgé" est la première condition pour obtenir une récolte plus précoce. En 2016, les plants de tomates "âgés" en motte de 10 cm ont coûté 0,60 euro HT/pièce contre 0,30 euro HT/pièce pour un plant classique. « Les résultats montrent un gain de précocité d’environ deux semaines, même si la reprise de ces plants plus âgés reste plus délicate », précise la technicienne. Trois variétés non greffées ont été évaluées pour leur précocité. Harzglut (Atypic Semences) apporte une précocité supérieure, près de trois semaines avant les récoltes habituellement réalisées sur la région. Malgré des fruits relativement petits et peu fermes, elle est intéressante pour ses récoltes dès juin. Dès que l’on passe sur des récoltes de juillet, l’utilisation de la variété Cindel (Enza) en production précoce est préférable à Prévia (Voltz). « Enfin, la date de plantation doit être avancée de deux semaines par rapport à une culture de tomate classique sous abri froid, soit la dernière semaine de mars en conditions moyennes de la région Rhône-Alpes », explique Nadine Treuvey. En complément de ces paramètres, différentes techniques, plus ou moins faciles à mettre en oeuvre, peuvent être mises en place pour gagner quelques degrés de température durant le premier mois de culture (voir Réussir Fruits & Légumes 358). « L’utilisation d’un écran thermique, combiné avec des gaines noires remplies d’eau pour créer un effet bioclimatique, a confirmé son effet tampon sur les variations des températures nocturnes et diurnes. La restitution de chaleur permet de gagner 2 à 3°C par rapport aux autres protections. Ainsi, la première récolte a été possible deux semaines avant les récoltes classiques (soit début juin) et le rendement commercialisable au bout de deux mois de récolte a été de 14,3 kg/m2, soit le double du témoin sans protection mais avec plants "âgés". Néanmoins, l’écran thermique reste très opaque, nécessitant une manipulation en début et fin de journée, pour confiner la restitution de chaleur autour des plants durant la nuit », commente la technicienne.
Le film 500 trous démontre tout son intérêt en permettant d’augmenter la température de 2 à 3°C en moyenne, voire plus lorsque les journées sont ensoleillées. « On note que sur des journées très ensoleillées, voire ventées (fermeture des ouvrants des serres), les températures peuvent rapidement augmenter sous ce film 500 trous, voire créer des surchauffes (plus de 35°C) mais aucun dégât n’a été observé », remarque Nadine Treuvey. Le voile non tissé (type P17) a montré toutes ses propriétés isolantes, autant du froid que du chaud : limitation des surchauffes et restitution de la chaleur accumulée dans le sol, mais dans une moindre mesure que le dispositif bioclimatique.
Le surcoût représente entre 1€/m2 et d’1,30€/m2
Pour les conduites avec mise en place d’un film (voile non tissé P17 ou film 500 trous), le gain de précocité a été équivalent à la modalité bioclimatique, soit deux semaines avant les récoltes classiques de tomate. « Le film a permis d’obtenir un rendement moyen de 10 à 11 kg/m2, inférieur à la modalité bioclimatique mais de 60 % supérieur au rendement du témoin sans protection climatique », précise-t-elle. Economiquement, le surcoût qu’engendre la plantation de plants "âgés" et la pose d’un voile P17 ou film 500 trous représente moins de 1 euro/m2 contre plus d’1,30 euro pour le principe bioclimatique par rapport à une culture de tomates classique. La qualité et la quantité d’ensoleillement restent prépondérantes dans l’efficacité de la technique. Les deux techniques de pose de film (voile P17 ou film 500 trous) associées à une plantation de plants "âgés" avancée de deux semaines, sont relativement faciles à mettre en oeuvre, peu coûteuses (moins de 1 euro HT/m2 de surcoût), assez rustiques et moins contraignantes. Toutefois, cette année, les résultats agronomiques de la technique « principe serre bioclimatique » restent supérieurs à ceux obtenus avec les deux autres dispositifs (film 500 trous ou voile P17). « Notons qu’en cas de fort ensoleillement, les risques d’échauffement sous le film 500 trous sont existants mais moindres qu’avec un film de solarisation. Aucun souci de pollinisation n’a été relevé », conclut Nadine Treuvey.
Gagner en précocité
1 Utiliser un plant "âgé" au stade début floraison 1er bouquet.
2 Choisir une variété précoce.
3 Mettre en place un écran thermique ou un film de forçage.
4 Planter plus tôt.
Solutionner la question d’un premier tuteurage
« En positionnant le dispositif de protection directement au-dessus des fils de culture, il est possible de résoudre la question d’un premier tuteurage en fixant directement les plants aux fils de culture. En effet, pour l’ensemble des modalités avec mise en place d’un film de protection, les plants doivent être tuteurés (tuteur bambou dans l’essai) de la plantation jusqu’à la période où la protection par le film n’est plus nécessaire ».
Avancer le pic de récolte
Les quatre associés du Gaec du Val noir situé dans la ceinture périurbaine de Lyon ont mis en place en 2016 une protection temporaire avec un film non-tissé (type P17) sur une partie des cultures de tomates sous abri planté en plants francs début avril. « L’objectif était d’avancer le pic de récolte de tomate qui, dans nos conditions, arrive en août à une période creuse pour la vente directe dans la région lyonnaise », explique Sébastien Pilaud, l’un des producteurs. Les associés ont ainsi pu constater une meilleure reprise des plants, un gain de précocité d’une semaine (malgré le printemps froid), et une meilleure accroche des fruits sur les premiers bouquets. En 2017, pour bénéficier de plus de précocité et aussi comparer les techniques, ils prévoient de planter une partie de l’abri en plants âgés au 1er bouquet, et l’autre en plant classique et d’avancer la plantation au 20 mars.
Faire des euros par mètre carré
Producteur de légumes en vente directe à Saint-Etienne-de-Saint-Geoirs (Isère) à 400 m d’altitude, Luc Veyron cultive une partie de ses tomates sous abri selon la méthode expérimentée à la Serail. « L’objectif est de grouper la récolte sur les cinq premiers bouquets en étêtant le plant afin d’arriver bien avant la production des jardins familiaux pour bénéficier de prix attractifs. Il ne s’agit pas de faire des kg/m2 mais des euros/m2 » explique-t-il. La production de cette culture qui s’arrête mi-août est relayée par des cultures de tomate en plant greffé débutant plus tardivement mais prolongeant leur production jusqu’à fin octobre. On assure ainsi un fruit de qualité jusque tard en saison. « Cette technique est facile à mettre en oeuvre. Les travaux de la Serail ont levé des verrous techniques et "psychologiques" ; la station a eu un rôle de révélateur dans la stratégie à mener », mentionne le producteur.