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Arboriculture : les atouts de l’enherbement

L’enherbement sur le rang a de nombreux atouts dans une zone où le campagnol est maîtrisé. Plusieurs expérimentations en cours donnent des références aux arboriculteurs pour choisir des enherbements adaptés.

« Si on s’affranchit du problème du campagnol, il est tout à fait envisageable d’enherber le rang de ses vergers », annonce Xavier Creté de Sud Expé Marsillargues (ex CEHM, Hérault). Le tout est de déterminer l’objectif de l’enherbement, avec quelles espèces, et quelle sera sa gestion. « Les effets attendus de l’enherbement du rang en verger sont multiples, témoigne Claude-Eric Parveaud du Grab. Il a un effet sur les adventices que l’on cherche à maîtriser, bien entendu, mais aussi sur la structure du sol, la disponibilité en eau, la santé des cultures, la fertilité chimique du sol, etc… ». Selon les variétés herbacées implantées, l’espèce fruitière produite, le sol, la date de semis de l’enherbement, l’âge du verger, la pression des adventices, l’intensité de ces effets est très variable. « De nombreux essais ont été menés sur ce sujet mais l’extrapolation des résultats est délicate car de nombreux facteurs entrent en jeu », continue l’expérimentateur.

Un enherbement en trèfle sans perte de calibre

Lorsque l’enherbement comprend une légumineuse, il contribue à fournir de l’azote à la culture. « Un essai Grab-Inra de Gotheron conduit sur pêche de 2004 à 2010 a montré qu’un enherbement avec du trèfle blanc nain permet de diviser par deux les apports azotés sans diminuer l’azote disponible pour les arbres, précise l’ingénieur. Le résultat le plus marquant est que cette diminution d’intrants n’a fait chuter ni les rendements, ni le calibre des pêches par rapport à des rangs désherbés mécaniquement et fertilisés à pleine dose durant les six années d’observation ». Deuxième constatation : un sol enherbé est plus poreux. « Dans notre essai sur pêcher, ce sont les vers épigés et les vers endogés qui ont été retrouvés en plus grand nombre sur la modalité enherbée comparée à la modalité travail du sol. Or, ce sont les vers anéciques qui créent la porosité entre les strates du sol. Dans notre cas, la plus grande porosité observée sous le rang enherbé est expliquée par le tapis racinaire créé par le trèfle blanc ».

Disponibilité en eau et gestion des monilioses

L’enherbement joue un rôle tampon sur la disponibilité en eau et la température du sol. « Nous avons observé un assèchement du sol plus rapide sous le trèfle à la période où le trèfle se développe, au début du printemps, analyse le spécialiste. Mais durant tout l’été, les variations des tensiomètres sont moindres sur les rangs enherbés ». Par ailleurs, « deux années sur quatre, nous avons constaté une diminution des dégâts de monilioses sur les fruits sur les rangs enherbés », avance Claude-Eric Parveaud. D’autres travaux expérimentaux montrent qu’il peut exister un lien entre la disponibilité en eau et les dégâts de monilioses. Les fortes variations de disponibilité en eau favorisent la formation de microfissures sur les fruits, porte d’entrée des monilioses. Concernant les autres défauts et dégâts observés à la récolte, le constat est plus mitigé. Le taux de morsure sur pêche a été plus élevé trois années sur trois, par exemple.

Un projet pour étudier les effets de l’enherbement

Le rôle de l’enherbement pour favoriser la régulation biologique est aussi variable. « Certains essais sur pommier ont constaté un effet dépressif de l’enherbement sur les pucerons, analyse le spécialiste. Ce phénomène peut s’expliquer par la teneur plus faible en azote foliaire lorsque le rang est enherbé. Le végétal est alors moins appétant pour les pucerons ». A cela s’ajoute l’hébergement d’auxiliaires par les espèces présentes dans l’enherbement. Le choix des espèces est capital (voir encadré) pour limiter la concurrence. L’identification des espèces adaptées à différents systèmes de culture, la définition des modalités de leur implantation et de leur entretien font l’objet du projet Placohb. Rassemblant stations d’expérimentations, instituts techniques, l’Inra, des lycées agricoles, des chambres d’agriculture et des partenaires privés, il a aussi pour objectif d’ici 2020 de caractériser les effets d’un enherbement du rang sur la culture et leur potentiel pour favoriser la biodiversité fonctionnelle.

Campagnols et pertes de rendements

Dans les zones où des populations de campagnols sont présentes, l’enherbement est un réel risque de les favoriser. En effet, le travail du sol a le mérite de détruire leurs galeries, ce qui peut limiter leur multiplication. Avec l’enherbement, on augmente leur disponibilité en ressources alimentaires au coeur même du verger. « Ce risque doit donc être considéré avec attention. Des perchoirs implantés dans la parcelle sont peu coûteux à mettre en place et permettent de favoriser la prédation par les rapaces », signale Claude-Eric Parveaud. Un autre effet négatif redouté de l’enherbement est son impact sur la vigueur et les rendements. Sur jeunes vergers, de nombreux essais ont montré une baisse de circonférence des troncs des arbres sur rang enherbé par rapport à du désherbage chimique ou du désherbage mécanique sur leurs trois premières années de vie. « Cet effet peut être limité en choisissant des espèces moins concurrentes et restituant de l’azote. Des travaux sont en cours sur ce sujet », complète le spécialiste.

Choisir ses espèces

Selon la nature des sols et l’effet prioritaire recherché de l’enherbement, le choix des espèces à semer diffère. Dans le cas où la restitution d’azote est prioritaire, une légumineuse devra être semée. « Mais la pérennité de certaines légumineuses est parfois courte, précise Claude-Eric Parveaud. Les trèfles blanc et violet ne couvrent le sol que pendant un ou deux ans ». La luzerne a un bon taux de recouvrement la deuxième année mais il chute par la suite. Pour assurer une compétition avec les adventices, mieux vaut miser sur des espèces à développement rapide, qui occupent rapidement la surface du sol. « La fétuque ovine est longue à s’implanter mais après deux ans, elle peut occuper plus de 80 % de la surface », fait remarquer l’expérimentateur du Grab. Sud Expé Marsillargues teste depuis deux ans les effets de l’enherbement par l’achillée millefeuille et la petite pimprenelle de vergers de pommiers. « L’achillée est le plus pénalisant des deux enherbements pour la croissance des arbres car il est gourmand en eau, observe Xavier Creté, expérimentateur sur la station. Il pourrait être l’une des causes de l’augmentation de la consommation hydrique de 20 % en juillet des placettes enherbées avec cette plante ». D’autres espèces sont en observation et semblent intéressantes comme la Lysimachia nummularia de type couvre sol ou encore l’Arthoteca calendula. « Cette espèce maîtrise très bien les adventices car elle est très colonisatrice, précise Xavier Creté. Peut-être trop ».

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