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Allemagne : La culture de fraises se fait moins en plein champ

Dans le nord de l’Allemagne, la culture des fraises cultivées en plein champ est en déclin. L'intérêt de certains fraisiculteurs se portent vers les cultures abritées et le hors-sol. Faut-il y voir un impact du changement climatique ?

L’Allemagne produit chaque année environ 135 000 tonnes de fraises, principalement en plein champ. L’Allemagne est le troisième pays européen producteur de fraises derrière l’Espagne et la Pologne. Mais bien que les fraises soient plus populaires que jamais Outre-Rhin, les surfaces de fraises cultivées en plein champ diminuent. La province de Basse-Saxe, dans le nord-ouest de l’Allemagne, est l’une des zones de fraisiculture les plus importantes d’Allemagne, avec environ 20 % des surfaces de fraise du pays. Dans cette région, la culture de fraises de plein champ a connu des hauts et des bas dans un passé récent. En 2000, 1 387 hectares étaient consacrés à la culture des fraises en plein champ en Basse-Saxe. La demande, et donc les surfaces de production ont ensuite augmenté. Un sommet a été atteint en 2013 avec 3 563 ha de fraises cultivées. Depuis, ces surfaces ont fortement diminué. Elles sont estimées à 2 586 ha en 2019. Au cours des vingt dernières années, les ventes de fraises ont augmenté de façon continue, notamment parce que les enseignes de distribution se sont développées en commercialisant plus de fruits rouges. De plus, les exigences imposées au produit ont changé : détaillants et consommateurs attendent des fraises grosses, rouges et saines sur une période prolongée. A l’extérieur comme à l’intérieur, la qualité du produit doit être irréprochable.

La culture de plein champ reste risquée

Bien que les producteurs soient désireux de respecter ces normes, ils sont également confrontés à de nouveaux défis notamment celui de la main-d'oeuvre.  Alors que la culture traditionnelle en plein air nécessite beaucoup de main-d’œuvre pour récolter, les travailleurs saisonniers sont de plus en plus difficiles à trouver. Les producteurs de fraises se trouvent sous une pression croissante : ils doivent sans cesse produire mieux et plus. Une première mesure pour répondre aux exigences croissantes vis-à-vis de la production a été la culture sur buttes. Mais, malgré les  investissements considérables dans l’amélioration de la production ces dernières années, la culture de plein champ reste risquée. Elle est notamment soumise au changement climatique. Le dernier rapport de surveillance du gouvernement allemand révèle une augmentation de la température moyenne de 1,5 °C entre 1881 et 2018. Au cours des cinq dernières années, la température moyenne a augmenté de 0,3°C. « Les effets du changement climatique deviennent de plus en plus évidents », a déclaré la ministre de l’Environnement, Svenja Schulze.

L’impact de la chaleur est devenu évident

Ce constat est fait sur le terrain par les producteurs de fraises. La période de végétation des fraisiers s’est encore étendue ces dernières années et est désormais estimée à 232 jours par an. Au cours des deux dernières années, l’impact de la chaleur est devenu évident dans le nord de l’Allemagne : un été extrêmement long et intense en 2018 a été suivi d’un été avec des températures record en 2019. Les conditions météorologiques extrêmes ont provoqué des brûlures et des dégâts de stress hydrique. Les températures élevées entraînent généralement une maturation plus rapide et, dans de nombreux cas, des fruits plus mous. Afin d’éviter les processus de maturation post-récolte indésirables, les fraises récoltées à des températures élevées doivent être refroidies, ce qui entraîne une charge de travail supplémentaire et des coûts accrus. De plus, au cours de la dernière décennie, la disponibilité globale de l’eau d’irrigation s'est affaiblie avec un accroissement des faibles niveaux d’eau dans les rivières et une sécheresse croissante. Avecv les effets du changement climatique sur les cultures de fraises de plein champ, les fraisiculteurs prennent un risque toujours plus grand en cultivant en extérieur.

Un développement des cultures protégées

A cela s’ajoutent d’autres problèmes qui diminuent l’attrait de la culture de plein champ, tels que la difficulté à recruter des travailleurs saisonniers et des réglementations qui restreignent l’utilisation de pesticides. Selon une enquête récente de la VSSE et du réseau des associations d’asperges et de fruits rouges, 43 % des producteurs interrogés souhaitent réduire les surfaces de fraise de plein champ, tandis que 24 % seulement veulent les augmenter. Plus de 21 % souhaitent étendre les surfaces de cultures protégées. Aussi, les cultures sous abri ou sous serre se sont considérablement développées en Basse-Saxe au cours des dernières années. Alors qu’en 2014, 1 600 tonnes de fraises ont été récoltées sur 96 hectares de cultures protégées, ce nombre est récemment passé à près de 147 hectares avec une récolte estimée à 2 200 tonnes. En s’affranchir des conditions climatiques, les cultures protégées prennent un avantage déterminant  face à celles de plein champ. De plus, le hors-sol donne la possibilité de cultiver sur plusieurs étages, de récolter plus facilement et plus rapidement. De plus sous serre, l’exposition à des maladies comme la pourriture grise est considérablement plus faible  donnant la possibilité d’utiliser moins de pesticides. Même si les surfaces de cultures hors-sol sont encore relativement modestes à l’heure actuelle, l’avenir leur appartient. 

La période de végétation des fraisiers est aujourd’hui désormais estimée à 232 jours par an

Le changement climatique impacte les fraisiers

Selon des études menées par l’Université de Geisenheim, le réchauffement climatique a une influence indéniable sur la floraison et la dormance des fraisiers. Selon les scientifiques, un manque de froid hivernal se traduit par des tiges plus courtes et une taille réduite du feuillage. Les tiges raccourcies compliquent la cueillette des fruits et les feuilles plus petites réduisent la productivité des plantes et donc le rendement. Une dormance tardive entraîne également une floraison excessive, ce qui peut entraîner des fruits comparativement plus petits et de qualité inférieure. Cela se produit si la plante n’a pas suffisamment de nutriments au printemps pour approvisionner toutes les fraises qu’elle a formées. 

L’augmentation de la température n’est cependant pas la seule conséquence du changement climatique. Il y a aussi de plus en plus d’événements météorologiques extrêmes. La chaleur, la grêle, les pluies torrentielles, le vent et les inondations deviennent plus fréquents. « Nous constatons qu’il y a un nombre croissant de périodes prolongées d’humidité ou de sécheresse, ainsi que des vents persistants, ce qui peut être problématique pour les petits fruits », explique Tilman Keller, conseiller fruits rouges au centre d’expérimentation Obstbauversuchsring des Alten Landes e.V, à Jork, dans le nord de la Basse-Saxe, à 35 km d’Hambourg.

 

En chiffres

Allemagne

2018 Plein champ : 12 494 ha, 118 771 t

2018 Abris/serres : 1 500 ha, 22 922 t

(source : Centre fédéral d’information sur l’agriculture)

Basse-Saxe

2013 Plein champ 3 563 ha

2019 Plein champ 2 586 ha

2014 Abris/serres : 96 ha

2019 Abris/serres : 147 ha

(source : Office statistique de Basse-Saxe)

Cet article, paru sur le site internet allemand dédié aux cultures spécialisées Gabot.de, a été rédigé dans le cadre du Club de la presse international du Sival. Sept journalistes du monde entier, de la presse spécialisée de l’agriculture et des fruits et légumes, ont travaillé sur la thématique de l’impact du changement climatique sur la production de fruits ou de légumes dans leurs pays respectifs. Les articles issus de ce travail ont été présentés au cours d’une conférence au Sival 2020.

Rédaction Réussir

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