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Des boucs éclairés suppriment la saisonnalité

Des études franco-mexicaines montrent que des boucs, rendus actifs sexuellement par un éclairement, peuvent induire des chaleurs chez les chèvres en contre-saison. Résultats de recherche.

Les boucs de l’Inra de Nouzilly ont bénéficié de 16 heures d’éclairage et 8 heures de sombres pendant deux mois et demi pour être rendus sexuellement actifs. © D. Hardy
Les boucs de l’Inra de Nouzilly ont bénéficié de 16 heures d’éclairage et 8 heures de sombres pendant deux mois et demi pour être rendus sexuellement actifs.
© D. Hardy

On a sous-estimé l’effet des mâles ! Des études franco-mexicaines menées par l’Inra de Nouzilly et l’université de Torréon ont montré que des boucs rendus sexuellement actifs par un traitement lumineux annulent la saisonnalité de la reproduction des chèvres. En effet, la présence permanente de boucs sexuellement actifs empêche l’arrêt saisonnier de l’activité sexuelle chez la chèvre.

Dans l’expérience menée au Mexique, des boucs ont été rendus sexuellement actifs par une exposition à de longues durées d’éclairement pendant l’automne et l’hiver précédents. Puis, mis en présence des chèvres de janvier à juin, ces mâles ont maintenu les chaleurs chez 12 des 14 femelles. Ces mâles ont été remplacés par d’autres naturellement actifs de juillet à décembre. La présence permanente des mâles sexuellement actifs a rendu les chèvres cycliques toute l’année pendant deux années consécutives. Un an et demi après le début de l’expérimentation, lorsque ces différents mâles actifs ont été retirés sur une partie des femelles, les chèvres ont immédiatement cessé d’ovuler.

Des boucs rendus sexuellement actifs par les jours longs

« Cette méthode permet de se passer d’hormone en contre-saison, s’enthousiasme Philippe Chemineau, directeur de recherches à l’Inra. Ce traitement est facile à mettre en place et peu onéreux. On a juste besoin de néons ! » D’autant que cette expérience mexicaine a été reconduite en France, sous nos latitudes tempérées. À l’Inra de Nouzilly, en Indre-et-Loire, 21 boucs ont été divisés en deux groupes. Le premier groupe a été soumis à un traitement photopériodique du 1er novembre au 15 janvier, puis est passé à la photopériode naturelle, tandis que l’autre groupe est resté entièrement sous la photopériode naturelle. Six semaines après l’éclairement, les boucs soumis aux traitements lumineux présentaient un volume testiculaire et un niveau de testostérone supérieurs. À la fin du mois de mars, les mâles ont été placés pendant 15 jours au milieu de 41 chèvres alpines. 86 % des femelles sont rentrées en chaleurs dans le groupe des boucs éclairés contre 5 % pour l’autre groupe.

Philippe Chemineau, Inra : « Jusqu’à présent, les variations d’éclairement étaient considérées comme le principal facteur externe responsable du saisonnement de la reproduction. Or, nos résultats montrent que les relations socio-sexuelles jouent un rôle important dans le contrôle de la reproduction saisonnière des caprins. » © D. Hardy
L’efficacité de l’effet mâle semble aussi bonne avec des mâles familiers du troupeau qu’avec des boucs inconnus. Mieux, les chèvres peuvent rester avec des mâles avant de rencontrer des mâles actifs. Dans une expérimentation mexicaine, 31 chevrettes ont été complètement isolées des mâles pendant 46 jours, puis placées en contact direct avec de jeunes mâles pendant la période de reproduction. Un autre groupe de 29 chevrettes a été en contact avec des boucs vasectomisés pendant 46 jours puis en contact direct avec d’autres boucs pour la reproduction. La réponse ovarienne et la fécondité ont été similaires entre les deux groupes, signe que c’est l’introduction de nouveaux mâles actifs qui déclenche les chaleurs.

Des boucs accélérateurs de puberté

Pour tenter de gommer la saisonnalité naturelle des mâles, un essai est en cours au Mexique en alternant pour les boucs un mois de jours longs et un mois de jours courts en bâtiments ouverts. Capgènes applique un protocole similaire dans sa bouquerie étanche à la lumière extérieure en alternant 60 jours longs et 60 jours courts.

Les mâles actifs peuvent aussi accélérer la puberté des chevrettes (voir La chèvre n° 349). Placées à côté des boucs actifs, les chevrettes sont rentrées en chaleur à l’âge de six mois, soit un mois et demi avant l’âge normal. Les chevrettes ont ainsi commencé leur cycle régulièrement sans qu’aucun problème de fertilité ne soit détecté par la suite. « La présence des mâles permet de lancer la machine sexuelle, résume Manon Chasles qui a mené sa thèse à l’Inra sur ce sujet. Les boucs aident à la cyclicité des chevrettes sans les importuner ». Des mâles très très bien !

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