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« Déléguer la distribution de l'alimentation des vaches et génisses me fait gagner beaucoup de temps »

Bourreau de travail et très organisé, Christian Landes est seul à la barre de ses 800 000 litres de lait. Il a délégué la distribution de l’alimentation et de nombreux travaux. Et sa fille n’est jamais loin.

Christian Landes et sa fille Chloé, apprentie, avec Romain Lespinasse, un des chauffeurs de la désileuse automotrice. La machine va être changée prochainement pour une 16 m3. © B. Griffoul
Christian Landes et sa fille Chloé, apprentie, avec Romain Lespinasse, un des chauffeurs de la désileuse automotrice. La machine va être changée prochainement pour une 16 m3.
© B. Griffoul

Lorsqu’il a repris l’exploitation familiale en 1988 avec ses 106 000 litres de lait, Christian Landes se voyait déjà produire un million de litres. Éleveur à Saint-Maurice-en-Quercy, dans le Lot, il devrait frôler cette année les 800 000 litres, toujours seul à la barre pour s’occuper de ses 85 vaches et de ses 90 hectares. Comment fait-il ? Il a employé des salariés, mais il a du mal à les fidéliser. « C’est difficile de trouver de la main-d’œuvre pour traire », remarque-t-il. « Il est très vaillant », euphémise Jean-Louis Cassagnes, technicien à la coopérative Fermes de Figeac. L’éleveur débute sa journée de travail à 5 h 30 et la termine à 20 h 30 ! « Il faut du rythme, de l’organisation, un peu de passion et sans doute un brin de folie », lance-t-il. Bref, une énorme capacité de travail et une exceptionnelle faculté à aller de l’avant et gérer les imprévus.

Ne cherchant plus vraiment à rembaucher un salarié pour remplacer celui qui vient de partir, il compte beaucoup désormais sur sa fille Chloé en apprentissage au CFA voisin, une semaine à l’école, une semaine sur la ferme familiale. Une fille de la même étoffe que lui. « Elle est très motivée et donne beaucoup de sa personne. Elle très animalière, perfuse les vaches, fait les prises de sang, gère les fièvres de lait, s’occupe des vêlages… Elle fait les chantiers d’ensilage et toute la fenaison », raconte son père avec une pointe de fierté. Chloé a 16 ans ! Très proches et très soudés, ils trouvent encore du temps pour leur deux à trois footings hebdomadaires.

Un gain de temps de 1 h 30 par jour

Pour faire face à la charge de travail, Christian Landes a délégué la distribution de l’alimentation. Un groupe de huit éleveurs s’est constitué il y a six ans au sein de la Cuma communale pour acquérir une distributrice automotrice. « Avec le troupeau qui s’agrandissait, je voulais acheter un bol mélangeur, mais mon problème c’était d’abord la main-d’œuvre et il aurait fallu deux tracteurs, explique l’éleveur. J’avais donc pensé à un bol mélangeur autochargeur. Puis l’idée est venue d’une désileuse automotrice. »

Deux salariés à mi-temps assurent la conduite et l’entretien de la machine. Elle tourne pendant quatre heures tous les matins et parcourt 18 km. Le groupe comprenant un éleveur allaitant, le coût de distribution est facturé pour les trois quarts au poids de ration distribuée et pour un quart au temps passé. Pour Christian Landes, le coût de revient est de 11,50 €/1 000 l de lait. Il estime le gain de temps à une heure et demie par jour par rapport à la situation antérieure (distribution des ensilages à la désileuse et des concentrés à la brouette). « C’est ce qui me gagne le plus de temps. » La machine distribue la ration complète des vaches toute l’année. En hiver, s’y ajoutent les rations des génisses et vaches taries tous les deux jours.

Hygiène et prévention pour prévenir les problèmes sanitaires

Les vaches vont à la pâture du 15 mars à fin octobre. Christian Landes a la chance d’avoir un parcellaire parfaitement adapté. Si la surface est divisée en trois îlots, dont l’un se situe à 17 km, chacun est très groupé. Autour de la stabulation, il dispose de 40 ha dont une seule parcelle de 32 ha pour faire pâturer les vaches. Elle est divisée à l’année en dix paddocks au fil électrique avec un chemin d’accès central. Tous sont alimentés en eau. La gestion du pâturage prend donc très peu de temps, les vaches se rendant quasiment seules à l’herbe.

Les automates de désinfection en salle de traite (manchons, trempage, dermatite) apportent du confort de travail. La traite dure 1 h 30 avec un équipement 2 x 5. © B. Griffoul
Les automates de désinfection en salle de traite (manchons, trempage, dermatite) apportent du confort de travail. La traite dure 1 h 30 avec un équipement 2 x 5. © B. Griffoul

 

Conduire seul une telle exploitation demande aussi une solide organisation et beaucoup de rigueur pour éviter au maximum les imprévus. « Je planifie le travail selon que Chloé est présente ou pas, détaille Christian Landes. Les semaines où elle n’est pas là, je ne m’occupe que des vaches. Nous sommes très à cheval sur les horaires de traite. Nous essayons d’être vigilants sur l’hygiène pour éviter au maximum les problèmes sanitaires, dermatites, cellules… Nous faisons de la prévention : les vaches sont vaccinées au tarissement contre les diarrhées néonatales et les veaux à 3 semaines contre les problèmes respiratoires. Nous mettons des conservateurs dans les ensilages d’herbe et de maïs. J’ai beaucoup sélectionné sur la facilité de traite… »

« Une situation très fragile »

« La situation de Christian Landes est très fragile, notamment an cas d’accident de santé, s’inquiète néanmoins Jean-Louis Cassagnes. Mais, c’est vrai pour toutes les exploitations de notre secteur. Il n’y a plus de main-d’œuvre qualifiée capable de remplacer un agriculteur qui produit 800 000 litres de lait. Et, quand on est seul, l’astreinte et les imprévus sont beaucoup plus compliqués à gérer. » Il y a deux ans, à 48 ans, l’éleveur s’est fait poser la même année deux prothèses de hanche et une prothèse dorsale. Il a retrouvé toutes ses capacités physiques. Lors de ses séjours à l’hôpital, il a fait appel au service de remplacement, son épouse donnait la main après sa journée de travail à l’extérieur et Chloé assurait déjà pendant ses congés scolaires.

L’avenir passe à l’évidence par l’installation de Chloé dans quelques années. « S’il y a de nouveau une lueur d’espoir dans le lait de vache, nous pourrons augmenter la production sans beaucoup de travail supplémentaire », disent-ils en chœur. Le million de litres que visait l’éleveur il y a trente ans sera allègrement dépassé. Si « cette lueur d’espoir » ne vient toujours pas, ils envisagent de démarrer plutôt en complément une autre production, par exemple du lait de chèvre.

De nombreux travaux sont délégués

Pendant que l’autochargeuse récolte l’herbe, l’éleveur confectionne et tasse le silo. © C. Landes
Pendant que l’autochargeuse récolte l’herbe, l’éleveur confectionne et tasse le silo. © C. Landes
° Une partie des travaux extérieurs sont réalisés par une ETA voisine. Elle est notamment équipée d’une autochargeuse pour récolter l’ensilage d’herbe. D’un volume de 50 m3 compressés, elle permet de récolter un hectare de ray-grass (5 t MS/ha) à la fois en l’affaire de 25 minutes. Le temps nécessaire à l’éleveur pour confectionner et tasser le silo. En une journée, les 23 ha d’ensilage d’herbe sont stockés. « Nous avons fait ce choix parce qu’il n’y avait plus assez de main-d’œuvre pour constituer une équipe d’ensilage, explique Christian Landes. Les trois éleveurs qui nous entraidons, nous sommes tous dans la même situation. »

Il délègue à la même ETA le labour pour le maïs (26 ha). Le même entrepreneur effectue le semis du maïs avec un semoir 6 rangs de la Cuma. L’ensilage de maïs est réalisé par une autre ETA mais l’éleveur fait appel à son voisin entrepreneur qui vient renforcer l’équipe avec un tracteur et une benne. Il délègue enfin les traitements phytosanitaires et l’épandage de la chaux à la coopérative Fermes de Figeac et le parage à un vétérinaire.

° Dans un an, la gestion des effluents sera entièrement sous-traitée dans le cadre d’un projet de méthanisation. Accompagné par la coopérative, le projet (Méthaseli) est décliné sur quatre sites et réunit 33 agriculteurs, tous situés à moins de 4 km d’un méthaniseur. Les effluents seront amenés par camion toutes les semaines pour les produits de raclage, tous les 15 jours pour les lisiers et cinq fois par an pour les fumiers d’aires paillées. Les digestat bruts ou liquides (au choix) seront stockés dans une trentaine de poches souples (900 m3) et stockages existants disséminés sur tout le territoire. Ce service sera assuré par la Cuma Lot Environnement adossée à Fermes de Figeac. Elle pourra faire aussi l’épandage du digestat. « En faisant sous-traiter l’épandage, nous gagnerons 250 heures de tracteur par an », anticipe l’éleveur.

Chiffres clés

90 ha de SAU dont 26 ha de maïs ensilage
85 prim’holstein à 8 950 l
720 000 l de lait produit en 2019
1,5 UMO (avec Chloé apprentie)

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