Comment choisir ses chèvres pour espérer une insémination fertile ?
L’analyse de 3 500 lactations des chèvres du Pradel et de Grignon sur une vingtaine d’années montre qu’il n’y a pas de profil type pour être fertile à l’insémination. Cependant, l’analyse des courbes de NEC, de poids et de lait nous renseigne sur le choix des chèvres à inséminer.
L’analyse de 3 500 lactations des chèvres du Pradel et de Grignon sur une vingtaine d’années montre qu’il n’y a pas de profil type pour être fertile à l’insémination. Cependant, l’analyse des courbes de NEC, de poids et de lait nous renseigne sur le choix des chèvres à inséminer.
La réussite de la reproduction conditionne la production laitière, la conduite des chèvres, l’élevage des chevreaux et la réussite de la reproduction suivante. Que ce soit en saillie naturelle ou à l’insémination, le choix des reproducteurs (les chevrettes, les chèvres ou les mâles) est essentiel pour assurer la réussite de la reproduction avec des animaux aptes à se reproduire.
Vingt années de données
Afin de créer de nouvelles connaissances, la ferme de l’unité de recherche MoSAR (Inrae-AgroParisTech) à Grignon dans les Yvelines (115 chèvres de races alpines et saanens) et la ferme du Pradel en Ardèche (122 chèvres alpines) ont collecté les données issues de la reproduction de l’ensemble des lactations sur les deux sites entre 1996 et 2020. La production laitière, le poids et la note d’état corporel (NEC) sont enregistrés tout au long de la lactation au moins une fois par semaine pour le lait et au minimum tous les mois pour les deux autres caractères.
De façon assez logique, il existe une diversité de courbes de lait, de poids et de NEC. La diversité des dynamiques affecte donc différemment la capacité des chèvres à se reproduire en fonction de son niveau de lait, de poids et de NEC au moment de la reproduction, mais peut aussi être affectée par ce qui s’est passé très en amont de la reproduction.
Pas de profil type
Dans un objectif d’identifier des profils de chèvres plus aptes à se reproduire, les profils de lait, de poids et de NEC ont été croisés entre eux afin d’identifier s’il existait des « profils type » de chèvres, par exemple : production de lait élevé et NEC faible, poids faible et production faible, poids moyen et production moyenne, etc. « Non, il n’existe pas de profil type », souligne Nicolas Gafsi qui vient de finir une thèse sur le sujet à l’Institut de l’élevage et à l’Inrae. « Quand nous croisons deux à deux les sept profils de lait, les six profils de poids et les trois profils de NEC, nous obtenons au mieux 15 % des lactations dans un profil. Cela suggère une diversité de stratégie de l’utilisation de l’énergie par les fonctions biologiques des chèvres. Ces résultats confirment la diversité des réponses des chèvres en élevage. »
Et entre chaque lactation, les chèvres ne restent pas dans un même profil de lait, de poids ou de NEC. « En moyenne, seulement un peu plus de la moitié des chèvres restent dans un même profil la lactation suivante », cela complexifie d’autant plus la conduite des animaux.
Le choix des chèvres à la reproduction
« L’absence de profil type incite à identifier les moments opportuns où il est nécessaire de collecter de l’information pour adapter sa stratégie de reproduction », indique Nicolas Gafsi. En ce qui concerne la production laitière, la dynamique est plus importante que le niveau. Les chèvres présentant la persistance la plus élevée ont significativement moins de chances de réussir à l’insémination que des chèvres présentant une persistance de lactation faible. Bien évidemment, il ne faut pas interpréter de la même façon pour des animaux avec une production anormalement faible : signe d’un souci sanitaire donc à écarter de la reproduction.
En observant le poids vif des chèvres, seule la dynamique de reprise de poids autour de l’insémination est informative et favorable à la réussite à l’insémination. Pour la note d’état corporelle, c’est le niveau minimal atteint pendant la lactation qui est un indicateur pour écarter des chèvres à la reproduction. La production laitière restera cependant le critère le plus important par rapport au poids ou à la NEC.
Mise en garde
Pas de mise à la reproduction trop tôt
Le stade de lactation au moment de la reproduction reste déterminant pour la réussite à l’insémination. En reprenant les différentes formes de courbes de lait, de poids ou de NEC, il est facile de visualiser que, par rapport au stade de lactation au moment de l’insémination, l’effet des autres fonctions biologiques de la chèvre (production de lait, reprise d’état corporel) ne sera pas le même et pourra être au détriment de la fertilité. Les quelques chèvres sur les deux sites qui ne respectent pas les recommandations du groupe sur la reproduction caprine (https://idele.fr/grc/) pour une mise à la reproduction après 180 jours de lactations perdent 15 points de fertilité. Plus précisément, le maximum de fertilité est atteint entre 200 et 225 jours de lactation.