L’histoire des races caprines retracées par leurs gènes
L’analyse des génomes des chèvres françaises et étrangères permet de suivre l’histoire évolutive des races caprines.
Rassemblant l’Inra, l’université et l’école vétérinaire de Toulouse, le laboratoire GenPhySE, a comparé les génomes de huit races françaises (Alpine, Angora, Corse, des Fossés, Poitevine, Provençale, des Pyrénées, Saanen) ainsi que celui de chèvres iraniennes et de chèvres sauvages. En repérant les différences dans le génome, les chercheurs ont ainsi dressé un arbre phylogénétique qui retrace l’histoire évolutive des races caprines françaises.
L’arbre ainsi construit montre l’histoire de la différenciation en différentes races. « Les races sont bien différenciées les unes des autres, commente Claire Oget de GenPhySE. Sans connaître a priori les races des 223 animaux analysées, notre logiciel a séparé les génotypes en huit groupes distincts, chacun correspondant effectivement à une race. » Les races Alpine, Angora, Corse, Poitevine et Saanen forment des groupes homogènes par rapport aux chèvres des Fossés, Provençale et des Pyrénées qui sont plus hétérogènes. Cette hétérogénéité se retrouve d’ailleurs dans les robes variées de ces races.
La race Provençale recroisée avec des chèvres orientales ?
Autre enseignement de l’étude, la consanguinité est globalement faible pour les races françaises (de 3 à 7 %) à l’exception des races Angora (14 %), des Pyrénéennes (11 %) et Poitevine (11 %).
L’analyse phylogénétique montre que les chèvres Angora et les chèvres domestiques iraniennes forment un sous-groupe dans l’arbre, témoin de leur ancienne séparation des races occidentales. La race Angora est en effet originaire de Turquie et a été importée en France dans les années quatre-vingt. Les races originaires de France forment un sous-arbre avec un fonds génétique commun important. « La race Provençale présente une particularité originale puisque son génome est lié à celui des populations ancestrales, détaille la généticienne. Peut-être est-ce dû à un croisement ultérieur avec des chèvres orientales issues du berceau de domestication ? »
La preuve d’une sélection sur la caséine et la couleur
En repérant l’origine des mutations du génome dans la puce caprine à 54 000 marqueurs SNP, les chercheurs ont détecté des signatures de sélection dans cinq régions du génome, précisément dans les chromosomes 5, 6, 11, 13 et 20. Trois de ces régions contiennent des gènes codants pour des caractères fonctionnels souvent sélectionnés par les éleveurs. Le premier d’entre eux, sur le chromosome 5, code pour la couleur du pelage avec la présence d’une ceinture blanche. Un deuxième gène sélectionné a été repéré sur le chromosome 6 ; c’est celui codant la sécrétion de la caséine alpha s1, responsable de la coagulation du lait. Enfin, sur le chromosome 13, un troisième gène repéré code pour l’apparition de la couleur blanche. La sélection s’est sûrement opérée sur d’autres caractères, la production de lait ou la docilité notamment, mais le lien avec la génétique n’a pas été montré dans cette analyse. Ces caractères plus complexes sont déterminés par de nombreuses régions du génome.