Les mammites cliniques chez la chèvre
Peu fréquentes chez la chèvre, les mammites restent un critère d’alerte sur la santé des mamelles du troupeau et devront faire l’objet d’une investigation par l’éleveur et son vétérinaire.
Peu fréquentes chez la chèvre, les mammites restent un critère d’alerte sur la santé des mamelles du troupeau et devront faire l’objet d’une investigation par l’éleveur et son vétérinaire.
Qu’est-ce qu’une mammite ? Un état inflammatoire de la glande mammaire, essentiellement d’origine infectieuse bactérienne (nous ne parlerons pas ici des origines traumatiques ou de la photosensibilisation), se manifestant par des symptômes locaux au niveau de la mamelle et éventuellement par des signes généraux. Hormis les cas aigus, la chèvre exprime discrètement les signes de mammite. On parlera de mammite subclinique.
Les mammites aiguës restent rares
Les mammites aiguës ont une expression clinique sévère. On note ainsi une congestion du quartier avec des douleurs et des rougeurs associées à une dénaturation du lait par la présence de mèches. Les signes généraux peuvent être marqués avec un abattement, une chute de lait et une perte d’appétit. Notons que l’on ne peut pas caractériser le germe en cause par les symptômes hormis le cas des mammites gangreneuses. C’est la bactériologie sur un prélèvement de lait qui nous renseignera sur les bactéries en cause : staphylocoques, mycoplasmes, germes pyogènes et plus rarement germes d’environnement (colibacilles, Pseudomonas).
Le taux de mammite clinique est souvent inférieur à 5 % dans les élevages. En général ces cas restent isolés avec une incidence limitée. C’est le début de lactation qui est le plus propice.
Deux formes de mammites aiguës sévères
Deux entités sont quelquefois sévères : les mammites gangréneuses et la mycoplasmose aiguë. Pour les mammites gangréneuses. Après une brève phase inflammatoire intense, le quartier atteint devient vite violacé, froid avec des signes généraux très marqués de type toxiniques. Le lait devient sanieux, il prend l’aspect de sang. Le pronostic vital est engagé. L’agent en cause est un staphylocoque doré producteur de toxines. Dans certains élevages, des cas à répétition apparaissent sur de jeunes chèvres en début de lactation. C’est à mettre en relation avec des états immunitaires déficients autour de la mise bas et favorisés par un manque d’hygiène générale.
La mycoplasmose aiguë entraîne une congestion quelquefois très marquée (pis de bois), du lait plus ou moins dénaturé et des signes généraux de type septicémiques (fièvre, abattement, œil rouge) souvent en association avec des signes d’arthrites aiguës touchant une ou plusieurs articulations. Faut-il envisager un traitement ? Oui pour éviter la mort et la souffrance. Ces chèvres, dont l’avenir économique est fortement compromis, seront isolées et orientées vers la réforme.
Les mammites subaiguës et subcliniques
Plus couramment les symptômes sont peu marqués, on parle alors de mammites subaiguës et subcliniques. C’est tout le tact de l’éleveur qui va faire une bonne détection des mammites à la traite. En absence de signes généraux, il faudra repérer de légers signes locaux comme des mamelles légèrement congestionnées ou, à l’inverse, plus flasque (baisse de lait). L’aspect du lait devient plus séreux (transparence) avec des micromèches ou filaments blanchâtres d’où l’intérêt de l’éjection des premiers jets en cas de doute. On pourra aussi se référer aux derniers comptages cellulaires individuels. L’usage du test CMT, très utilisé chez la vache, peut apporter un plus. Son interprétation est plus délicate en caprin du fait de sa positivité dès le niveau du million de cellules. Ces cas de mammite peuvent être isolés ou répétés, notamment suite à un évènement déclenchant : stress de traite (trayeur ou machine), modifications de l’alimentation ou de l’environnement.
L’évolution est variable : rare guérison spontanée, plus souvent passage à la chronicité avec niveau cellulaire élevé, induration du quartier, tarissement progressif, hypertrophie ganglionnaire… Attention, conserver ces chèvres porteuses devient dangereux pour le troupeau par contamination du matériel de traite. Il est donc indispensable de suivre leur niveau cellulaire.
Pour connaître le germe en cause il est indispensable de réaliser une analyse bactériologique éventuellement complétée d’un antibiogramme. Dans la grande majorité des cas (90 %), il s’agit d’infection à staphylocoques, le germe majeur des mammites caprines, plus rarement des mycoplasmes. Ces bactéries résident dans les quartiers et, de ce fait, la transmission au sein du troupeau s’effectue à la traite par contact avec les manchons. Dans des cas plus rares, il peut s’agir de germes d’environnement proliférant dans les litières comme le Streptococcus uberis.
Soigner les mammites, ou pas…
L’administration d’anti-inflammatoires non stéroïdiens traitera l’inflammation et la douleur. L’antibiothérapie des mammites n’est pas évidente : locale ou générale, choix de la spécialité, posologie et durée… Une bonne sensibilité sur le germe visé est indispensable : l’antibiogramme peut aider dans le choix de la famille d’antibiotique. Il dépend aussi des caractéristiques pharmacologiques des molécules : capacité du passage du secteur sanguin vers les tissus mammaires, concentration dans les cellules mammaires et dans le lait… On utilisera préférentiellement des spécialités à base de Betalactamines résistantes aux bétalactamases des staphylocoques (ampicilline, amoxicilline), de macrolides (si mycoplasme) ou du trimethoprim. On privilégiera la voie générale ou l’association des voies locales et générales dans les cas aigus. Dans tous les cas, il faut traiter précocement et suffisamment longtemps (trois à cinq jours).
Cependant, le jeu n’en vaut parfois pas la chandelle. Le bilan de la thérapeutique mammaire est souvent décevant : la guérison bactériologique rarement atteinte, perte du quartier et niveau cellulaire élevé. Dans le cas de mammites subcliniques on prendra en considération le potentiel laitier de l’animal et l’évolution du niveau cellulaire. En cas de doute, mieux vaut l’isoler et l’orienter vers la réforme.
Le traitement « hors lactation » au tarissement est envisageable de façon ciblée sur les chèvres ayant fait une mammite clinique en cours de lactation et celles dont le niveau cellulaire reste élevé. Dans les cas de mammites cliniques en chaîne dues au staphylocoque, la mise en place d’un protocole de vaccination avec le vaccin Vimco peut être positive.
Prévenir plutôt que guérir
Les mesures préventives rejoignent les mesures de lutte contre les cellules. Il faut soigner l’hygiène générale, au moment des mises bas notamment. La prévention passe aussi par la maîtrise des bonnes pratiques de traite et le bon réglage de la machine. Enfin, une alimentation équilibrée et bien pourvue en vitamines est à rechercher.