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L’élevage caprin au féminin

En ovin-caprin, 30 % des éleveurs sont des éleveuses. Agriculteurs comme les autres, elles apportent cependant une nuance féminine dans les relations avec l’extérieur ou dans l’organisation de l’activité.

L’élevage de chèvres attire les femmes. C’est la filière agricole, la plus féminisée, contre en moyenne 19 % pour les autres filières. Bien sûr, l’élevage caprin s’adresse aussi bien aux hommes qu’aux femmes, issus ou non du milieu agricole, mais les biques séduisent celles qui ont la fibre animalière et des qualités de gestionnaires. Les animaux étant de petite taille, la manipulation des animaux est moins physique que pour d’autres productions. Certaines ont été séduites par l’icône de la chevrière dans le Larzac, vivant de sa production, au contact des animaux et seule maître à bord. La polyvalence et la diversité des tâches ont pu aussi séduire.

Traditionnellement considérée comme un métier d’homme, l’agriculture se féminise. Aujourd’hui, un quart des exploitations agricoles françaises sont dirigées par des femmes alors qu’elles n’étaient que 8 % en 1970. « L’évolution des statuts offerts aux agricultrices a été le moteur, non de la croissance de l’emploi féminin en agriculture, mais de la visibilité de celui-ci » notait le centre d’étude et de prospective du ministère de l’Agriculture dans une étude de 2012 en rappelant la création des EARL en 1985, puis celui du statut de conjoint collaborateur en 1999. Malgré ces avancées, un certain nombre de femmes travaillent à la ferme sans statut officiel et ne bénéficie pas de protection sociale, ni de droits à la retraite.

À l’initiative de la vente directe ou de l’accueil à la ferme

Aujourd’hui, une nouvelle génération d’agricultrices n’entre pas dans le monde agricole par le mariage mais par l’aboutissement d’un vrai projet professionnel personnel. Ces femmes s’installent un peu plus tard que les hommes : leur âge moyen à l’installation est de 31 ans contre 29 pour les hommes. Selon les statistiques du ministère de l’Agriculture, elles ont moins souvent suivi une formation agricole et près de la moitié des exploitantes de moins de 40 ans ne sont pas passées par l’enseignement agricole, ce qui n’est le cas que d’un cinquième des hommes.

De nombreuses agricultrices se sont souvent créé une activité indépendante, en réponse au besoin d’avoir quelque chose en propre sur l’exploitation. Elles assurent ainsi plus souvent l’accueil à la ferme, la transformation ou la vente directe des produits fermiers. On observe aussi que les exploitations exclusivement féminines ont plus souvent recours à la vente en circuits courts que les exploitations exclusivement masculines (20 % contre 16 %). Les femmes sont souvent à l’initiative de marchés de proximité qui les placent directement au contact des consommateurs. Elles proposent ainsi deux fois plus souvent un hébergement touristique que les exploitations masculines, et 4,8 % proposent des activités de loisir contre seulement 0,8 % des chefs d’exploitation masculins.

Des chefs d’exploitation libres de s’organiser

S’installant généralement plus tardivement que les hommes, après avoir eu une formation non agricole et parfois une activité salariée dans un autre secteur, la nouvelle génération d’agricultrices mobiliserait d’autres compétences d’importance pour la gestion de l’exploitation : l’art de la négociation avec les organisations agricoles, une aisance plus grande dans les démarches administratives, le rapport au public… compétences qui font parfois défaut aux hommes plus centrés sur la production.

Par contre, les femmes ont souvent moins de biens fonciers en propre. Selon la tradition, l’homme hérite de ses parents et la femme épouse un agriculteur. Bien que le marché du foncier soit relativement ouvert aux femmes, la préférence des propriétaires fonciers et des cédants va plus naturellement vers des acquéreurs masculins. L’accès aux prêts bancaires n’est pas non plus toujours chose aisée pour les femmes. L’effort à fournir pour convaincre les banquiers est important car ces derniers émettent souvent des réserves sur la viabilité et la pérennité des projets d’installation.

À leur entrée dans le métier, presque toutes passent une période de test où elles sont guettées par le voisinage, sur la conduite du tracteur par exemple. Mais elles s’en acquittent aussi bien que les hommes, gagnant par là leur légitimité. Pour réduire la nécessité du recours à la force physique, elles peuvent faire appel à la mécanisation même si tous les outils ne sont pas adaptés à la morphologie féminine.

Difficulté de concilier vie familiale et vie professionnelle, imbrication des tâches : ce qui est vrai pour la majorité des femmes actives l’est particulièrement pour les agricultrices, d’autant que pour elles les temps professionnel et domestique se chevauchent souvent. Par exemple, les heures de traite correspondent au moment de la préparation des enfants pour le départ de l’école… Cependant, étant son propre chef, l’éleveuse peut gérer son temps pour se libérer pour s’occuper de sa famille.

Les éleveuses sont des éleveurs comme les autres

avis d'éleveuse

« Des femmes qui changent le visage de l’agriculture »

« Dans le cadre du projet Carma*, nous avons mené 28 entretiens pour mettre en lumières les nuances que peuvent apporter les femmes dans l’agriculture. Les femmes semblent mieux se retrouver dans un petit système avec une agriculture paysanne et fermière, ancrée dans le territoire. Plus flexibles, elles apprécient la combinaison d’activités et la souplesse d’organisation qui permettent de préserver la qualité de vie. Concernées par les enjeux environnementaux, la valorisation de savoir-faire traditionnels et d’éléments de culture locale, elles n’hésitent pas à établir des passerelles entre leur activité agricole et le patrimoine local. Les femmes investissent aussi l’agriculture avec une sensibilité qui leur est propre : des nuances esthétiques et colorées dans les jardins, une relation affective avec les animaux… Le lieu de travail est un lieu de vie qui se doit d’être agréable à vivre. Elles sont aussi plus attentives aux questions de santé et de prévention par l’ergonomie des postes de travail. »

*Contribution des agricultrices dans le renouvellement des métiers agricoles

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