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De l’herbe pour les chèvres, des euros pour l’éleveur

Faire pâturer les chèvres et produire ses propres fourrages permet d’augmenter l’autonomie alimentaire du troupeau et donc diminuer ses coûts de production et améliorer sa rémunération.

Plus de 380 personnes, éleveurs, techniciens et élèves, participaient le 24 septembre à la première journée Cap’Vert organisée par le RedCap à la plateforme expérimentale Patuchev autour de l’autonomie alimentaire en élevage caprin. « Je suis émue de voir autant de monde, confiait en introduction François Bonnet, président du Brilac et du RexCap. C’est un signal positif, cela montre que le sujet interroge et intéresse les éleveurs ».

Un supplément de rémunération de 80 €/1 000 litres pour les autonomes

Le coût de l’alimentation représente en moyenne la moitié du coût de production du lait de chèvres. Les exploitations les plus autonomes ont donc une rémunération supérieure ! Une étude conduite sur les éleveurs caprins livreurs suivis dans le cadre d’Inosys réseaux d’élevage entre 2007 et 2013 a montré que la rémunération moyenne du travail était supérieure de 80€/1 000 litres chez les éleveurs autonomes à plus de 70 % par rapport aux éleveurs les moins autonomes. Par ailleurs les exploitations les plus autonomes sont plus résilientes aux aléas économiques. D’après une étude menée sur un échantillon de 40 éleveurs livreurs de l’Ouest, une augmentation du prix des intrants conduit chez les élevages les moins autonomes à une perte de rémunération de 131 €/1 000 l, ramenant la rémunération moyenne permise par l’atelier caprin à 0,8 Smic par UMO seulement. Dans les mêmes circonstances, la perte de rémunération a été limitée à 93 €/1 000 l chez les plus autonomes, permettant de maintenir une rémunération de 1,6 Smic.

Le RedCap cherche donc à développer l’autonomie alimentaire et la part d’herbe dans la ration. « L’objectif serait d’atteindre un niveau d’autonomie alimentaire moyen de 75 % et de passer en dessous de la barre des 450 grammes de concentrés par litre de lait » souhaite Raphaël Brunet, président du GIE élevage des Pays de la Loire. « L’objectif n’est pas d’être 100 % autonome, expliquait Julia Chemarin de la chambre d’agriculture de la Vienne dans un atelier à destination des éleveurs, mais d’avoir une autonomie cohérente avec sa surface, le nombre de chèvres et leur niveau de production, la main-d’œuvre disponible et la rémunération souhaitée. » Accompagner les éleveurs vers l’autonomie alimentaire va donc nécessiter de travailler sur l’alimentation, mais aussi la reproduction, les bâtiments, la conduite du troupeau…

Une économie de 44 €/1 000 litres avec un foin de qualité

La qualité des fourrages récoltés va conditionner l’autonomie alimentaire. D’une part les chèvres vont avoir une meilleure ingestion avec du bon foin appétent. D’autre part la quantité de concentré à ajouter pour équilibrer sera inférieure si la valeur nutritionnelle du foin est élevée. Entre un foin de luzerne, fané au sol par beau temps, à 18,5 de MAT et 0,7 UFL et un foin de luzerne fané au sol par temps de pluie estimé à 14 de MAT et 0,55 UFL, on peut observer une différence d’ingestion du foin de 0,3 kilo par chèvre par jour, soit un supplément de 200 g de concentré nécessaire pour équilibre la ration avec le mauvais foin. Cela se traduit par une économie de huit centimes par jour par chèvre ou 44 €/1000 L avec du foin de qualité. Il est donc important de faire analyser son foin pour connaître sa valeur afin de bien caler sa ration et donner la bonne complémentation en concentré. « Mais attention aux fausses précisions, alerte Théophane Soulard d’Atlantic Conseil Élevage. Cette analyse ne servira à rien si on ne connaît pas à minima au préalable les quantités distribuées et consommées ».

Faire pâturer 10 heures par jour 6 mois de l’année

Le pâturage aussi est facteur d’autonomie et d’économie. Ainsi à la station expérimentale de Patuchev, un lot de chèvres sort au pâturage 10 heures par jour pendant six mois de l’année. « Avec une production laitière de trois kilos par jour, les chèvres sont complémentés avec 700 g de concentré mais pas de foin, explique Hugues Caillat, responsable de la station Patuchev à l’Inra. Cela nous a permis de faire une économie de concentré de 17 centimes d’euro par jour et par chèvre par rapport à un système foin-concentré sur la même période ».

Pour bien réussir son pâturage, il faut une prairie de qualité avec une bonne présence de légumineuses. Dans le cadre du RedCap, une trentaine d’exploitations en Poitou-Charentes et Pays de la Loire ont commencé à mettre en place sur leurs exploitations des essais avec des prairies multi-espèces dans des contextes pédoclimatiques différents avec des mélanges adaptés aux sols séchants ou hydromorphes… Le choix du mélange va dépendre de la période à laquelle on recherche de l’herbe, le mode d’exploitation prévu de la prairie, le temps d’implantation prévu, le type de sol, le climat… « Plus on sera nombreux plus on aura de résultats, a lancé Raphaël Brunet, encourageant ses collègues éleveurs à s’engager dans le dispositif. L’objectif est d’avoir des résultats dans nos exploitations, pas dans les centres de recherche ». L’intérêt des mélanges graminées-légumineuses sera aussi de produire des fourrages équilibrés en énergie et protéines en se passant d’engrais azoté. Les légumineuses restent la manière la plus efficace et la moins chère de produire des protéines sur une exploitation !

Le saviez-vous ?

Les éleveurs caprins fermiers ont un taux d’autonomie alimentaire moyen de 55 % sur la ration totale (68 % pour les fourrages et 21 % pour les concentrés) et les livreurs de 70 % (88 % pour les fourrages et 25 % pour les concentrés). Ces taux sont nettement inférieurs à ceux rencontrés dans les autres filières d’élevage ruminant.

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