Bien penser ses clôtures pour un pâturage serein
Partie intégrante d’une exploitation et outils du quotidien, les clôtures, fixes ou mobiles, doivent être installées de manière à faciliter le travail de l’éleveur.
![La clôture permanente (au fond) délimite la parcelle, alors que la clôture mobile (premier plan) permet d'optimiser le pâturage en refendant la parcelle principale. © D. Hardy](https://medias.reussir.fr/chevre/styles/normal_size/azblob/2023-06/_RCH345_ELEVER_CLOTURE_LEADER_1.jpg.webp?itok=Q_6VEY2p)
![Le grillage de type ursus est largement utilisé en chèvre, les empêchant de passer en dessous, sans besoin d'électrifier. © D. Hardy](https://medias.reussir.fr/chevre/styles/normal_size/azblob/2023-06/_RCH345_ELEVER_CLOTURE_LEADER_2.jpg.webp?itok=OkeABloy)
![L’utilisation du filet permet à l'éleveur une installation rapide d'un parc de contention, déplaçable à l'envi. © D. Hardy](https://medias.reussir.fr/chevre/styles/normal_size/azblob/2023-06/_RCH345_ELEVER_CLOTURE_LEADER_3.JPG.webp?itok=bMTnUFe6)
![Le boîtier VigiFence se fixe rapidement à un piquet où il pourra être raccordé à la clôture. © Pampaas](https://medias.reussir.fr/chevre/styles/normal_size/azblob/2023-06/_RCH345_ELEVER_CLOTURE_LEADER_4.png.webp?itok=1up-L_v2)
![Après un paramétrage simple, l'éleveur peut dessiner ses parcelles sur son smartphone afin de recevoir une alerte lorsque la chèvre franchit la ligne. © B. Morel](https://medias.reussir.fr/chevre/styles/normal_size/azblob/2023-06/_RCH345_ELEVER_CLOTURE_LEADER_5.JPG.webp?itok=nys_-0VT)
Choisir sa clôture
Il n’existe pas une norme ou une référence de clôture pour chaque type de conduite de troupeau, de gestion de parcelles ou d’enjeux environnementaux. Chaque éleveur aura son fonctionnement propre auquel il associera la bonne combinaison de clôtures pour délimiter son exploitation et assurer la contention qu’il souhaite pour ses chèvres. « Il est intéressant de mélanger différents types de clôtures, puisque chacune d’entre elles a une utilisation bien particulière », explique Fabienne Launay, chef de projet pastoralisme, systèmes fourragers, pâturage et gestion agricole des espaces naturels à l’Institut de l’Élevage. Les clôtures permanentes vont servir principalement de barrière physique pour délimiter l’exploitation, une parcelle, un parcours. Le grillage à mouton, dit « ursus » (nom commercial) est très répandu parmi les éleveurs caprins, séduits par la sûreté de l’installation. Bien que celle-ci coûte environ 1,30 €/m et que son installation soit chronophage avec une implantation de poteaux tous les deux à trois mètres sur terrain plat, la hauteur du grillage et l’espacement progressif des fils horizontaux apportent de la sérénité à l’éleveur dans la surveillance de ses chèvres et chevrettes. De plus, l’entretien est limité, la clôture n’étant pas électrifiée, et il n’est pas gênant qu’il y ait de la végétation autour, sans excès.
La deuxième clôture en vogue et qui se répand le plus aujourd’hui est la clôture électrifiée à fils lisses du type high tensile. Elle est moins coûteuse que le grillage à mouton (environ 0,50 €/m) et s’avère également résistante dans le temps, à condition d’implanter solidement les poteaux de départ et d’angle. Pour Fabienne Launay, « la principale difficulté avec le high tensile sera de bien penser son installation électrique, notamment au niveau des franchissements. De nombreux éleveurs font passer le courant dans la poignée de leur porte d’accès, mais les déperditions électriques sont très importantes ! ». Elle conseille alors de faire passer le fil conducteur sous la porte pour garantir une bonne électrification. « Nous avions commencé par une clôture à quatre fils, mais nous nous sommes rendu compte que deux fils étaient suffisants pour la même efficacité », se souvient Aurélien Mourier, qui élève avec sa femme Karine, 125 chèvres en Ardèche.
L’électrification, paramètre à ne pas négliger
Une clôture électrique est un circuit ouvert qui se schématise en deux parties : d’un côté, on trouve les fils conducteurs sur lesquels l’électrificateur va envoyer des impulsions électriques à partir de sa borne positive; de l’autre, la borne négative du circuit est reliée au sol via la prise de terre. Lorsque le circuit se ferme, c’est-à-dire qu’un corps conducteur entre en contact avec les fils, le courant passe et le corps conducteur (ici l’animal) reçoit une décharge. Il faut alors que cette décharge, mesurée en Joule, soit assez puissante pour que l’animal ressente de la douleur, recule et s’en souvienne afin qu’il considère la clôture comme infranchissable. Pour garantir une décharge électrique, rien ne vaut de brancher son électrificateur sur le secteur. Les boîtiers électriques commercialisés peuvent alors développer des tensions maximales et des décharges électriques importantes en continu et sans que l’éleveur n’ait le souci de devoir recharger la batterie. Le bon fonctionnement de la clôture électrique dépend aussi de la prise de terre qui doit être convenablement dimensionnée. « Il faut compter un mètre de prise de terre pour un joule délivré et ce principe doit être scrupuleusement respecté ! », martèle Alain Mathé. Il rappelle également que dans 90 % des cas de dysfonctionnement d’une clôture, le problème est lié à la prise de terre.
Pour habituer les chevrettes à la présence de la clôture, Aurélien et Karine Mourier, éleveurs en Ardèche, les sortent pour la première fois dans un enclos collé au bâtiment. « On met alors l’électrificateur au maximum, comme ça on est sûr que si elles touchent une fois, elles ne recommenceront pas », explique Aurélien. « Cependant, ça nous prend souvent du temps pour que les chevrettes comprennent le concept de la clôture et on est obligé de rester avec elles au début, sinon elles essayent à tout prix de nous rejoindre », continue Karine.
Un gardien virtuel pour la clôture
Commercialisé depuis début 2017 par la société Pampaas, le dispositif VigiFence a pour vocation de veiller au bon fonctionnement de la clôture électrique. Très robuste et imperméable, le boîtier comporte une partie électronique reliée à la clôture et une antenne qui va communiquer avec l’entreprise, laquelle décidera ou non de déclencher une alerte par SMS sur le téléphone de l’éleveur. Le boîtier coûte 250 € avec un an d’abonnement, puis 50 €/an ensuite. L’antenne utilise un réseau spécial pour les objets connectés et ne nécessite pas de carte Sim et le boîtier fonctionne sur piles, avec une autonomie de deux ans. « Lors du lancement de VigiFence, nous avions proposé un forfait test à 30 € pour un mois. 95 % des personnes qui l’ont testé ont investi dans la version définitive, se félicite Martin Coudière, représentant commercial pour l’entreprise haut-savoyarde. C’était vraiment un besoin chez les éleveurs, d’ailleurs le créateur du concept en est un lui-même ! ».
Surveillance permanente des animaux...
L’Institut de l’Élevage mène actuellement, sur fond de Casdar (1), une réflexion sur le concept de capteurs embarqués sur les animaux, avec le fonctionnement en duo d’un GPS et d’un accéléromètre, sous le nom de projet CLOChèTE. Le GPS présente trois fonctionnalités : la localisation des animaux, la délimitation des zones de pâturage et des zones interdites aux animaux et une aide à la gestion pastorale avec une visualisation précise des circuits de pâturage. L’accéléromètre aurait pour rôle, lui, de connaître les activités des animaux, autant au niveau de leurs déplacements que de leurs temps de repos et de rumination. Il pourrait aussi servir dans la lutte contre les sources de stress des animaux et contre la prédation, puisque l’éleveur pourrait détecter des comportements anormaux de ses chèvres, tels que des mouvements très rapides et désordonnés ou à l’inverse une immobilité très longue. « On souhaite répondre au mieux aux besoins des éleveurs en élaborant un cahier des charges très précis, en collaboration étroite avec une trentaine d’entre eux », explique Pierre-Guillaume Grisot, en charge du projet CLOChèTE pour l’Institut de l’Élevage. « Il y avait une demande importante sur le terrain en matière de référence sur l’utilisation des GPS, comment s’en servir et lequel choisir. Nous souhaitons aller plus loin en exploitant les données fournies par les accéléromètres, présents dans les GPS, comme des indications sur le comportement des animaux ». L’intelligence du dispositif combinant GPS et accéléromètre est développée par Aguila technologies, un bureau d’études axé sur les objets connectés. La société a mis sur le marché en septembre 2017 le collier GPS Epasto (2), conçu au Pays basque et fabriqué en France. Adaptable à toutes espèces, le logiciel est consultable sur ordinateur et smartphone. Le boîtier coûte 299 €, ce prix comprenant un an d’abonnement, puis l’abonnement est à 69 € HT/an.
...connectée au smartphone de l'éleveur
Sur le même principe, Philippe Gros et Jean-Michel Coquin ont créé en 2015 leur entreprise (3) dans la région grenobloise avec pour leitmotiv la géolocalisation d’animaux. Leur produit phare est un collier comportant un boîtier imperméable et résistant aux chocs dans lequel se trouve une balise GPS. La balise coûte autour de 300 € et l’abonnement se fait sur une durée définie par l’éleveur (à titre indicatif, l’abonnement pour un an est de 40 €). L’éleveur décide de l’activation ou non de telle ou telle balise et choisit la fréquence d’émission de celle-ci. Après avoir téléchargé l’application sur son smartphone, l’éleveur voit chacune de ses balises actives sur un fond de carte. « Nous avons deux types de clients : les éleveurs qui veulent juste savoir où sont leurs animaux et les éleveurs qui veulent aussi d’autres informations sur leurs comportements, les chemins qu’ils empruntent, les zones qu’ils préfèrent, si la rumination se passe bien, etc. », détaille Philippe Gros, cofondateur de cette start-up en pleine expansion. Chaque balise est caractérisée par la distance qui la sépare du smartphone, l’autonomie qui lui reste, la couverture satellite à laquelle elle a accès, la vitesse de déplacement de l’animal et sa dernière émission. L’éleveur peut dessiner virtuellement les zones de pâturage et celles où les animaux ne doivent pas se trouver. La start-up travaille avec l’Inra de Montpellier pour orienter l’éleveur dans ses choix d’équipement. « En général, on équipe 10 à 20 % du troupeau, selon la pression de la prédation », explique l’entrepreneur isérois.