Au Gaec du Pont, des salariés autonomes et bien dirigés
Avec un grand troupeau de chèvres et une grande surface, les trois frères du Gaec du Pont font appel à une main-d’œuvre nombreuse pour faire tourner la ferme. Une organisation rigoureuse et une confiance partagée permettent un travail efficace.
« L’organisation, c’est la clef d’une journée réussie ! » Au Gaec du Pont, dans le Cher, c’est Patrick Van Iersel qui gère les plannings des trois ouvriers et des trois apprentis. Avec ses deux frères, Joël et Dennis, ils s’occupent d’une ferme de 550 hectares avec 1 200 chèvres alpines qui produit un million de litres de lait, dont 250 000 sont transformés en fromage à la ferme.
Patrick tient les plannings de travail de chacun et c’est lui qui est référent pour toute la gestion de la main-d’œuvre des cultures et des animaux (Dennis s'occupe de la main d'oeuvre en fromagerie). Chaque matin, il donne les consignes à chaque salarié en direct ou par message. Et si Joël a un besoin de main-d’œuvre sur l’alimentation du troupeau ou les cultures, ou si Dennis a besoin d’un coup de main sur la fromagerie ou les animaux, ils en réfèrent en premier à Patrick qui gérera le planning en fonction du travail et des besoins de chacun.
Toutes les heures sont payées
Pour que la ferme tourne bien, les associés et leurs parents encore actifs sur la ferme soignent une ambiance de travail, à la fois conviviale et respectueuse. « On fait deux repas festifs par an, pour la moisson et à Noël, explique Patrick. On essaie de leur offrir un cadeau à Noël et de créer un cadre où ils se sentent bien. » La rémunération est un facteur important de satisfaction. « Ici, toutes les heures travaillées sont payées, et quand on dépasse les horaires ou que l’on travaille le week-end, c’est majoré, apprécie Loïc Bouchet, l’un des ouvriers spécialisés de la ferme. On n’a pas l’impression de se faire avoir. » Des primes viennent aussi parfois récompenser un travail bien fait.
Au Gaec, chacun a ses responsabilités, mais tout le monde participe aux tâches les plus ingrates. « Salariés et associés participent au travail pénible mais, quand il y a du boulot, il faut que ça avance », décrit Patrick, en se rappelant les 550 chevrettes triées et vaccinées en cinq heures de temps.
De la confiance dans le travail
Les associés travaillent deux week-end sur trois et les salariés un week-end sur trois. Le planning des congés est anticipé, mais « on ne refuse jamais un jour de congé », car la fidélisation des employés est un enjeu crucial pour le Gaec. Le travail est inéquitablement réparti au cours de l’année avec des pointes en été et des creux en hiver. « Quand les récoltes arrivent, on doit souvent faire appel à des saisonniers. Cela demande une organisation minutieuse pour garantir que tout le monde soit bien informé de ses tâches », explique Patrick.
L’équipe partage également une grande autonomie. Patrick et ses frères, conscients de leur propre charge de travail, font confiance aux salariés pour noter leurs heures de travail. Pour les salariés, cette confiance est une marque de respect qui traduit une relation saine avec les employeurs : « S’il n’y a pas de confiance, ça ne marche pas. »
Des candidats spontanés
Quand il cherche un employé, le Gaec du Pont met une petite annonce sur les réseaux sociaux ou via la chambre d’agriculture ou la laiterie. Mais les recrutements se font plutôt via les relations ou en embauchant les anciens apprentis. Plusieurs salariés sont venus directement se présenter et d’autres ont été recommandés par des personnes de confiance.
Les candidats envoient une lettre de motivation et un curriculum vitæ, puis ils rencontrent les associés. « On regarde aussi ce que les candidats postent sur les réseaux sociaux, admet Joël. Cela permet de donner une première impression sur la personne. » Après avoir passé une journée de test, ils sont encore observés pendant leur période d’essai de deux mois.
Des échanges réguliers entre associés et salariés
Le Gaec du Pont est plutôt bien équipé en machines agricoles et les salariés sont formés aux maniements des outils. « Quand nous avons acheté de nouveaux tracteurs, nous avons demandé au concessionnaire une formation des salariés sur l’utilisation du GPS », explique Patrick. « Former nos salariés aux nouvelles techniques agricoles est crucial, complète Dennis. Cela leur permet d’être plus autonomes et efficaces dans leur travail. »
Une communication ouverte entre les gérants et les salariés est essentielle pour le bon fonctionnement de l’exploitation. Des réunions régulières au moment du café permettent de discuter du travail et du matériel. « C’est un moment important où chacun peut s’exprimer. On essaie d’être à l’écoute et de trouver des solutions ensemble », précise Patrick. « Et c’est le dernier qui a fait une bêtise qui ramène les croissants », complète Joël en souriant.
L’autonomie alimentaire des chèvres au Gaec du Pont
Si le Gaec du Pont cherche à avoir des salariés autonomes, ils sont aussi à la recherche d’autonomie pour l’alimentation des chèvres. Pour nourrir 1 200 chèvres et 400 brebis, l’objectif est clair : réduire au maximum les achats d’aliments extérieurs tout en optimisant les cultures produites sur place. Pour y parvenir, l’exploitation cultive de la luzerne, des mélanges suisses et 75 hectares de protéagineux (lupin, soja, pois et féveroles).
Le tournant stratégique vers davantage d’autonomie date de la crise caprine de 2010-2012. À cette époque, les coûts d’alimentation dépassaient les 150 000 euros. « Ça pesait très lourd sur la structure de l’exploitation », se souvient Patrick Van Iersel. Aujourd’hui, le Gaec n’achète plus que deux camions de soja par an pour un lot de 600 chèvres. Une partie des crottins de Chavignol étant vendue pour Carrefour, l’autre lot de 600 chèvres est 100 % autonome et ne reçoit pas de soja.