[Sabots d'or] Des blondes d’Aquitaine pour « produire de la viande »
Éric Geoffroy, éleveur à Vieuvicq en Eure-et-Loir et dernier lauréat des Sabots d’or en race Blonde d’Aquitaine, base la conduite de son cheptel sur des repères techniques chiffrés. Il ne laisse pas de place au hasard, ce qui lui permet de disposer d’un élevage rentable.
Éric Geoffroy, éleveur à Vieuvicq en Eure-et-Loir et dernier lauréat des Sabots d’or en race Blonde d’Aquitaine, base la conduite de son cheptel sur des repères techniques chiffrés. Il ne laisse pas de place au hasard, ce qui lui permet de disposer d’un élevage rentable.
La reprise de la ferme familiale fut synonyme de renouveau pour Éric Geoffroy, à la tête aujourd’hui d’un troupeau de 35 Blondes d’Aquitaine sur une exploitation céréalière. Juste avant le début des années 2000, l’exploitant a vendu le troupeau charolais pour se lancer dans la race Blonde d’Aquitaine. « À cette période, j’ai eu besoin de me remettre en question. Ce changement de race fut pour moi une réelle source de motivation. L’élevage est redevenu une passion. J’ai alors commencé à suivre les réunions techniques de la chambre d’agriculture et du centre d’insémination Origenplus de Miermaigne en Eure-et-Loir. » À ce moment-là, l’éleveur a acquis un troupeau assez commun et un peu sauvage de 20 vaches pour aujourd’hui disposer d’un cheptel de 35 mères, toutes inscrites, d’un bon potentiel génétique. En atteste l’obtention des Sabots d’or cette année. « Lors de mes premières formations, j’ai retenu une phrase : mieux vaut avoir une vache moyenne mais productive qu’une bonne vache non productive. Depuis, je me suis toujours attaché à suivre cette doctrine pour atteindre l’objectif d’un veau par vache et par an », souligne l’éleveur.
Faire de la marge
Avant le changement de race, Éric Geoffroy songeait à arrêter l’élevage. Pour cette raison, il a calculé, de 2005 à 2010, le bénéfice obtenu par l’atelier bovin sur la ferme en partant de sa comptabilité analytique. « Je me suis toujours dit que si je n’arrivais pas à dégager de l’argent, j’arrêterais l’élevage. Or, cette étude m’a montré que je pouvais gagner ma vie avec mes bêtes. »
Pour monter son troupeau, il a largement fait appel aux taureaux d’insémination et utilisé des embryons. Toutes les femelles sont inséminées une fois puis mises au taureau, exception faite des génisses, en 100 % IA. La sélection des reproducteurs se base uniquement sur des chiffres. Les mâles qui sont gardés sur l’exploitation sont génotypés. « Mon objectif est de produire de la viande tout en dégageant une marge, c’est pourquoi la production laitière des vaches est un critère génétique également essentiel. Toutes les mères, dont les mâles ont un GMQ inférieur à 1,3 kg ou 1,2 kg pour les femelles, à 120 jours, sont éliminées du troupeau. On ne laisse pas non plus trop vieillir les vaches (moyenne d’âge 7 ans) pour obtenir une plus-value sur les prix de la viande. Tout est millimétré. »
Abaisser l’âge au premier vêlage n’est pas envisagé. Les vêlages sont centrés sur une seule période de deux mois, de mi-septembre à mi-novembre. Toutes les femelles qui ne rentrent pas dans ce cadre sont réformées. Les futures mères sont rentrées 15 jours avant la mise bas en bâtiment pour être surveillées et vaccinées contre les diarrhées néonatales. La minéralisation des vaches est suivie de près sur l’EARL. Le minéral est distribué en fonction de la période. L’été, les vaches en ont un à base d’ail pour faire fuir les mouches, un mois et demi avant vêlage, elles en ont un spécial vache gestante et un pour le reste de l’année.
Favoriser l’autonomie alimentaire
Toutes les génisses sont mises à la reproduction (sauf problèmes) et triées après leur premier vêlage. Seules les femelles pleines ressortent à l’herbe une fois leur veau sevré. Les autres restent en bâtiment pour être engraissées. L’hiver, les vaches en lactation sont alimentées à base d’herbe (enrubannage de ray-grass anglais et de luzerne) et de céréales de l’exploitation (blé/orge). La production herbagère de cette année va permettre à l’éleveur de nourrir les mères à l’herbe uniquement.
Les taurillons sont vendus entre 11 et 14 mois. Le dernier lot (6 mâles) a été abattu à une moyenne de 11 mois pour un poids carcasse moyen de 485 kg, classés U. Le GMQ des mâles est de 2,2 (1,32 kg de carcasse/j). « Les mâles doivent partir avant 14 mois (1er novembre) pour libérer de la place en bâtiments. On sèvre la plupart des veaux fin mars à 5-6 mois, peu avant la mise à l’herbe des mères. » Pour ne pas perdre de temps à l’engraissement, les jeunes bovins ne ressortent pas au pâturage. Ils sont commercialisés à BoviPerche dont Éric Geoffroy est administrateur. La vente des taurillons permet de dégager une marge d’environ 450 euros. Avec l’augmentation des coûts alimentaires, l’éleveur estime obtenir une marge de 350 euros pour ses jeunes bovins.
Des rations précises
L’élevage étant restreint, les matières premières utilisées pour l’engraissement des mâles et des femelles sont identiques. Seules les quantités varient. Les rations sont à base d’enrubannage d’herbe et de luzerne, de céréales produites et laminées sur l’exploitation (blé et orge) et d’un complément azoté sans OGM (tourteau de colza, tourteau de lin et tourteau de soja). Toutes les rations du troupeau ont été calculées précisément. Les femelles restent toujours en état pour les engraisser plus facilement. Depuis 2018, les vaches et génisses de réforme ont un poids moyen de 625 kg carcasse pour un classement compris entre E = et U-.
L’arrivée de Stephen Dulignée, le gendre d’Éric Geoffroy et futur repreneur, a ouvert la voie à la diversification des créneaux de commercialisation. Le jeune salarié a développé la vente directe, mais aussi auprès de GMS de son territoire (une bête tous les 2 à 3 mois pour un rendement viande de 76 %).
Chiffres clés
2019-2020
Avis d’expert - Juliette Mendy, conseillère bovins viande à Touraine conseil élevage
Juliette Mendy, conseillère bovins viande à Touraine conseil élevage : « Une conduite basée sur les chiffres »
« Éric Geoffroy s’appuie avant tout sur les chiffres. Il sélectionne les animaux de son troupeau en se basant sur les résultats du contrôle de performance.
Concernant la génétique et la sélection de ses animaux reproducteurs, elles sont axées sur des index pour favoriser la croissance (ALait) et la production de viande.
Il maîtrise très bien la sélection de ses reproductrices pour atteindre l’objectif d’un veau par vache et par an. La productivité des vaches est essentielle, et c’est l’une des lignes directrices d’Éric, en plus de la sélection de ses reproducteurs, dirigée vers son objectif de produire de la viande en étant rentable.
Il arrive à sortir des taurillons de 11 mois à 485 kg carcasse et une moyenne sur les femelles de 625 kg carcasse.
C’est un éleveur dans l’échange avec la volonté de faire évoluer continuellement son élevage. Entre autres avec l’arrivée de Stephen Dulignée, l’exploitation a développé la vente directe pour une meilleure valorisation de leur production.
Il a également à cœur de maintenir un élevage dans une région très céréalière. »
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